DESTINS DE VERDUN

#E14 - Pierre-Alexis Muenier, par Léa Wiazemsky - FR


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Pierre-Alexis Muenier

"Au milieu des flammes de Bras-sur-Meuse"

La voiture a fait un bond en avant et s’est arrêtée net. Impossible de la redémarrer.

En cette nuit du 25 février 1916, Pierre-Alexis Muenier et son camarade Martin sont bloqués avec leur ambulance, au beau milieu du village de Bras-sur-Meuse, en plein bombardement.

Rien ne prédestinait Muenier à rejoindre une unité sanitaire. Son domaine de prédilection, c’est plutôt l’étude des lettres et le professorat ! Fils de peintre, le jeune Franc-Comtois avait tout juste commencé sa thèse lorsque la guerre a éclaté. Comme il sait conduire, il a été mobilisé pour piloter les ambulances. 

Même s’il a déjà vu de terribles souffrances lors des premières années du conflit, rien ne le prépare à la violence inouïe qu’il découvre en arrivant à Verdun. Et le voilà maintenant fourré dans cette situation très dangereuse, en plein milieu de Bras-sur-Meuse… 

Avec Martin, ils tentent de faire repartir leur ambulance, mais rien n’y fait... Elle s’est empêtrée dans un réseau de fils de fer. Et les obus tombent autour d’eux, à une cadence effroyable d’une dizaine par minute. Un obus toutes les 5 secondes ! Ils sont plaqués contre le sol, entourés par les flashes des explosions et le souffle chaud des détonations. Les éclats claquent sur les façades des maisons d’où sortent des flammes…

Il faut abandonner là le véhicule… Ils s’engagent alors dans une course haletante pour s’extraire de la commune en feu. En route, un éclat d’obus vient percuter Muenier. Il en est quitte pour cette fois-ci : le projectile en fin de course n’a fait que rebondir sur son uniforme… Enfin, ils atteignent la sortie du village. Ils retrouvent leurs camarades des trois autres ambulances, miraculeusement indemnes…

Un des conducteurs a localisé le poste de secours. Ce qui implique, malheureusement, de retourner dans le village… Au milieu des explosions, ils atteignent l’abri où ont été regroupés les blessés. De cette cave renforcée sortent, affolés, des tirailleurs algériens et des soldats européens aux bandages ensanglantés. Il faut fuir… Fuir cette zone de mort où depuis plus de 5 jours maintenant on s’entretue. Voilà ce qui obsède tous ces hommes de la 37e Division, qui hurlent en français et en arabe…

Mais il est impossible aux ambulanciers d’emmener tous les blessés. Dans la cohue, les brancardiers, aussi épuisés qu’eux, n’arrivent pas à les canaliser. Seule l’intervention d’un aumônier permet de rétablir l’ordre et d’évacuer en priorité les plus atteints. Dans l’ambulance sur laquelle s’est rabattue Muenier, douze blessés s’entassent. Le convoi quitte le village sous la fureur des obus, qui continuent leur œuvre de destruction. Par miracle, il atteint sans dommages Baleycourt, où les blessés finissent par être pris en charge…

Pierre-Alexis Muenier connaîtra quatre autres passages sur le front de Verdun… Servant dans les services automobiles jusqu’à la fin de la guerre, il termine le conflit après avoir été mobilisé durant quarante-deux mois. Il publie, fin 1918, le témoignage de son expérience sous le titre évocateur de « L’Angoisse de Verdun ».

Après la guerre, il parvient enfin à terminer sa thèse, et devient critique littéraire.

 

#DestindeVerdun, un podcast écrit et produit par l'équipe du Mémorial de Verdun : Nicolas Czubak, Quentin Poulet et Charles Poisson

Adaptation des textes pour l’audio  : Delphine Peresan-Roudil et Florence Guionneau-Joie

Voix-off : Léa Wiazemsky

Musique originale et fonds sonores : Christian Holl et Hicham Chahidi

Réalisation : FGJ/Art Expo - Post-production : Plisken Production - Enregistrement : Hope So Production 

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DESTINS DE VERDUNBy Mémorial de Verdun - Champ de bataille