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L'imagination n'est pas la simple somme de « fantasmes » qu'un sujet se formule à lui-même. Elle est au fondement de la perception même, et elle se nourrit du désir de voir et de conserver une certaine puissance « transgressive » de scruter l'invisible, d'en retenir des sensations et des sensibles. L'instauration du « point de vue », subjectif et pré-subjectif, en marquant à la fois la langue et le perçu, le vécu complexe ou simple et « natal », introduit la notion de temps comme tension, rythme, flux, toujours dans des traditions historiques et culturelles bien spécifiques.

Comme chez Dante, la vision de Christine de Pizan explore un espace hallucinatoire dans lequel l'esprit doit s'orienter, à la fois comme langue et comme hallucination.

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 Entrer dans les couleurs était une invitation à entrer dans un monde de signes et de manifestations sensibles et visibles – parfois à la limite du visible. L'enquête se poursuit. Au seuil des croyances et des apparences, un « milieu » semble se dessiner, dans et par lequel nous nous établissons comme « point d'inflexion », « pivot-sujet » de nos perceptions et représentations. Une philosophie de la lumière semble soutenir un vaste ensemble de questions concernant la nature de nos croyances perceptives. À travers les siècles, les formes symboliques, les concepts de diaphane, de prégnance, de « species » apportent tous des éléments de compréhension de ce que veut dire voir, percevoir, imaginer 

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Nous explorons encore ce qu'est la représentation – l'étonnement est la point de style d'une pensée qui nous guide dans un dédale d'apparences. Notre enquête s'apparente à une « archéologie cognitive » des concepts et des perceptions. Qu'en est-il au juste de la question philosophique des couleurs ?  Ce sont d'abord des variétés de manifestations contingentes. Elles sont pensées telles des qualités secondes dérivées et/ou ajoutées aux qualités premières (l'étendue, la forme comme contour fermé). Mais dans le voir, d'emblée, elles peuvent être données originaires, survenir et être identifiées en premier.    Aristote, Goethe, Yeats, Itten, Kandinsky et bien d'autres ont déjà semé notre route de leurs cailloux blancs.   

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Parler de la représentation et de ses obscurcissements, c'est parler de la philosophie comme recherche de la vérité. Notre métaphore directrice est celle de la lumière. Le « mythe » de la Caverne de Platon nous sert de viatique. Les paradigmes et exemples de la représentation du monde sont aussi les paradigmes de nos activités de percevoir et de penser. Qu'on évoque une caverne, une pupille, une rétine, une tablette de cire, un miroir... les dualités de l'activité et de la passivité, de la pensée agente et de la réceptivité se reproduisent dans l'histoire et à différents degrés des élaborations philosophiques.  Et comme à chaque pas de nos méditations, les penseurs nous restituent l'étonnement devant l'étrangeté et le paradoxe d'un monde qui nous situe.   

Références : 

 F. Kafka, La Toupie.   P. Valéry, Cahiers, II, Gallimard, coll. Pléiade, 1974. Platon, République, Livres V, VI, VII, X. Timée.    Sophiste. Aristote, De l'âme. Dante, Le Paradis, Chant XXXIII. Lie Tseu, Le vrai classique du vide parfait, Gallimard, 1961.  Averroès, L'intelligence et la pensée. Grand Commentaire du De Anima, Livre III, introduction et notes d'A. de Libéra, GF-Flammarion, 1998.  J.-B. Brenet, Que veut dire penser ? Arabes et Latins, Payot & Rivages, 2022.  A. G. Wersinger, Platon et la dysharmonie. Recherches sur la forme musicale, Vrin, 2001.  G. Droz, Les mythes platoniciens, Seuil, 1992.  G. Simondon, Cours sur la perception (1964-1965), Editions de la Transparence, 2006.  E. Alloa, Partages de la perspective, Fayard, 2020.  E. Husserl :     Idées directrices pour une phénoménologie, t. 1, avec l'Introduction et la traduction de P. Ricoeur, Gallimard, 1950.   Expérience et jugement, traduction de D. Souche, PUF, 1979.   Phantasia, conscience d'image, souvenir, De la phénoménologie des présentifications intuitives, Textes posthumes (1898-1925), trad. R. Kassis et J.-F. Pestureau, Millon, 2002.  G. Bachelard, L'air et les songes.    M. F. Molder, « A propósito de mimēsis », in Estudos Filosóficos, n.° 1, éd. de Université Nouvelle de Lisbonne, 1982. F. Gil, Mimēsis e negação, Lisbonne, Imprensa nacional – Casa da Moeda, 1984. 

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Être en mesure de s'étonner, c'est être en mesure de se questionner sur ce qui nous frappe d'étonnement. C'est aussi, sur la trajectoire d'un chemin, procéder et rétrocéder, être en mesure de revenir sur ses pas. Le pathos et les affects nous assaillent à vrai dire à tout moment du trajet de nos questions. Nous sommes appelés à nous interroger sur nos représentations. Avant de parler dans le cadre d'une représentation du monde comme tableau ou totalité, il nous faut aborder la représentation comme « détail », d'une informe complexion de matière et d'affects et de leur aspiration à la forme. L'histoire des représentations nous étonne aussi en tant que philosophie de la représentation. Le monde se dévoile par des signes, un pied nu émergeant d'une surface de matière peinte, un bas-relief de pied nu qui semble doué de vie, la « pointe de style » qui est déjà concept et diagnostic où l'hallucination n'est pas une simple pathologie irréalisante.

H. de Balzac, Le chef-d'oeuvre inconnu.

Louis Lambert.

La recherche de l'Absolu.

O. Hamelin, Le système d'Aristote, Vrin, 1920.

G. Didi-Huberman, La peinture incarnée, Minuit, 1985..

S. Freud,  Délire et rêves dans la « gradiva » de Jensen, Gallimard, 1949.

S. Freud, L'inquiétante étrangeté, in Essais de psychanalyse appliquée, Gallimard, 1933..

M. de Certeau, La fable mystique, XVIè-XVIIè siècle, II, Gallimard, 2013.

Poètes du XVIè siècle, Pléïade/Gallimard, 1953.

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Prendre un mot pour un autre, ou encore se demander pourquoi les choses sont ce qu'elles sont ; se tenir dans l'ignorance et en prendre conscience ; préserver l'étonnement tout en cherchant les moyens de le transformer en question prometteuse. Tous ces égarements et précieux premiers pas dessinent une dramaturgie philosophique à l’œuvre chez tous les penseurs de l'étonnement, et, au plus près, dans les dialogues platoniciens.

Prendre un mot pour un autre, ou encore se demander pourquoi les choses sont ce qu'elles sont ; se tenir dans l'ignorance et en prendre conscience ; préserver l'étonnement tout en cherchant les moyens de le transformer en question prometteuse. Tous ces égarements et précieux premiers pas dessinent une dramaturgie philosophique à l'oeuvre chez tous les penseurs de l'étonnement, et, au plus près, dans les dialogues platoniciens.

Questionner le thème de l'étonnement, c'est questionner les manières de poser question, et tout à la fois le début du sentiment d'être entré en philosophie. Les déceptions et les « pathologies de l'étonnement » peuvent aussi nous guider vers le sentiment intelligible du vrai, ou d'une question cruciale. Inévitablement, et comme dans la plupart des traditions intellectuelles et artistiques, on commencera d''interroger la nature de la représentation et ses limites, des traces mouillées de pieds sur le sol aux mythes fondateurs de la peinture.

Bibliographie sommaire.

Platon, Théétète.

Aristote, Métaphysique (A & B).

Hésiode, Théogonie.

G. Bachelard, Le droit de rêver, P.U.F., 1970.

Philosophie japonaise (éd. M. Dalissier, S. Nagai, Y. Sugimura), Vrin, 2013.

M.-A. Ouaknin, C'est pour cela qu'on aime les libellules, Calmann-Lévy, 1998.

Th. W. Adorno, Dialectique négative, Payot, 1978 [1966].

P. Villey, Le monde des aveugles. Essai de psychologie, José Corti, 1984 |1914].

Pline L'Ancien, Histoire naturelle, XXXV, La peinture, Les Belles Lettres, 1997.

T.S. Eliot, The Love Song of J. Alfred Prufrock.

F. Gil, Mimēsis e negação, Lisbonne, Imprensa nacional – Casa da Moeda, 1984.

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