Éditorial de la 501ème
Ça y est, nous le redoutions, nous voilà de nouveau confinés. Même si le confinement est beaucoup moins strict, l'ambiance a changé. Au premier confinement, on attendait l'été et les copains en faisant des apéros sur Zoom. Maintenant, il fait trop froid pour ouvrir la fenêtre à 20 heures. La grisaille est là. On râle. On crie à l'injustice.
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Selon les derniers chiffres publiés par Santé Publique France, le pays a enregistré 39 865 décès liés à la Covid-19 depuis le 1er mars, dont 405 dans les dernières 24 heures à l'hôpital. Soit à peu près l'étiage que nous avions connu fin mars peu après avoir été confinés une première fois. Autant dire que le couvre-feu instauré mi-octobre n'a pas servi à grand-chose pour enrayer l'emballement épidémique.
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Dans son adresse au Français du 28 octobre dernier, Emmanuel Macron, pour annoncer le nouveau confinement évoque une "deuxième vague qui (...) sera, sans doute, plus dure et plus meurtrière que la première". En avril dernier, pourtant, au plus fort de la première vague, la France avait enregistré plusieurs pics journaliers à plus de 1400 décès. Nous en sommes encore loin aujourd'hui, même si les projections épidémiologiques sont assez préoccupantes. Au-delà de ces modélisations qui ont parfois été trop alarmistes ou surestimées, comme celles Neil Ferguson de l'Imperial College de Londres, ce qui affole les décideurs actuellement, c'est le taux d'occupation des lits de réanimation qui frôle la saturation.
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Le taux d'occupation des lits en réa est-il pertinent ?
Toutefois, cet indicateur pose problème pour deux raisons. On compte désormais 19 825 nouvelles hospitalisations sur les 7 derniers jours dont 2 948 en réanimation. Mais ces chiffres sont surestimés : d'une part, parce que, comme nous l'avons vu dans notre dernier édito, cet indicateur établit un taux d'occupation des services de réanimation théorique et que, d'autre part, la communication des chiffres officiels repose sur le rapport entre ce nombre de lits théorique (un peu plus de 5000) et tous les patients Covid-19 hospitalisés "en soins critiques", c'est-à-dire pas seulement les patients admis en réanimation (ce qui explique aujourd'hui pourquoi certains hôpitaux dépassent un taux d'occupation de 100%). Quand le Gouvernement évoque une saturation des lits en réanimation, les chiffres comptabilisent des patients qui ne sont pas en réa...
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Tout indicateur a ses limites qui doivent clairement être identifiées dans la méthodologie. Le parcours d'un patient admis à l'hôpital n'est pas linéaire et sa prise en charge adaptée ne rentre pas dans les cases d'un fichier Excel.
Le problème de saturation des lits de réanimation n'est pas inconnu; il est même récurrent à chaque épisode grippal aigu. Par définition, depuis la mise en place de la T2A (et ce n'est pas Jean Castex qui nous contredira), un hôpital doit fonctionner avec un taux d'occupation le plus proche de 100% pour être rentable. Un service de réanimation, en temps normal, dispose d'un taux d'occupation de ses lits de 90% voire plus.
Dans un document de synthèse d'août 2017, la FHP-MCO dresse un état des lieux des services de réanimation. Logiquement, le taux d'occupation des lits de réanimation est plus élevé dans le secteur privé (99 %) que dans le secteur public (93 %). Grosso modo, la logique comptable de l'hôpital l'incite plus à fermer des lits qu'à en créer, pour avoir une occupation optimale de ses ressources. Du coup, à chaque pic de grippe, c'est la saturation pour accueillir les patients.