André Chervel (1988, 1998) puis Annie Bruter (1997) proposent d’appeler « paradigme pédagogique » « un ensemble de pratiques enseignantes articulées autour de finalités durables : un modèle pédagogique fondant une tradition d’enseignement ». J’identifie, sous-jacent aux contenus, pratiques et finalités dominant l’histoire-géographie en France un « paradigme pédagogique positiviste ». La finalité principale en est la formation d’un « citoyen éclairé » fondant son action et ses décisions sur la Raison et sur la Science. L’essentiel des méthodes vise à transmettre ces connaissances par une leçon d’histoire avant 1960, par un cours magistral dialogué étayé de documents ensuite. Toutefois des changements ont été introduits dans cette discipline (évolution discrète des finalités, introduction timide de savoirs conceptuels et de controverses, nouvelles compétences attendues). Ceci s’insère dans des changements sociaux et politiques qui affectent le sens même de la démocratie et de la citoyenneté. Il peut en résulter de nouvelles pratiques de classe, dont certaines sont recommandées par les formateurs (situation-problème, débat) et parfois l’institution. J’interprète ces changements à travers un autre paradigme (« constructiviste-critique ») ce qui permet de leur donner cohérence et de les mettre en relation avec les évolutions sociales. Je présenterai de façon argumentée ces deux paradigmes et esquisserai des pistes sur leur pertinence théorique et pratique pour analyser une discipline scolaire et des situations d’enseignement-apprentissage.
Nicole Tutiaux-Guillon
Professeure, sciences de l’éducation didactique de l’histoire-géographie
IUFM du Nord Pas de Calais
Laboratoire THEODILE
Lille, France