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Or
Lauréate du prix du meilleur jeune économiste en 2023 et du prix Yrjö Jahnsson en 2024, Julia Cagé est professeure à Sciences Po. Invitée de l’Atelier politique, elle revient sur ses travaux consacrés aux médias, à la démocratie et au financement de la vie politique.
Le pluralisme, au cœur de la démocratie
Pour Julia Cagé, « le pluralisme dans les médias, c’est le fait d’exposer les citoyens à l’ensemble des différentes opinions qu’on peut porter sur un sujet, sachant que ce que j’entends par opinion, ça doit quand même rester des opinions factuelles ». Elle distingue un pluralisme externe, qui suppose « une offre qui va couvrir l’ensemble du spectre politique », et un pluralisme interne, devenu essentiel dans l’audiovisuel : « Les gens qui écoutent la télévision, la radio… en général, ils ont au-delà de 60 ou 65 ans ».
Or, ces publics « vont regarder une ou deux chaînes de télévision, une seule chaîne d’information ». En l’absence de diversité interne, « vous allez mettre la télé, et vous tombez par exemple sur Cnews, et vous allez être confronté uniquement aux opinions politiques de l’extrême droite ». Ce n’est plus une information équilibrée, alerte-t-elle, mais une distorsion du débat.
« Oui, bien sûr », répond-elle à la question de savoir si toutes les idées peuvent s’exprimer, « mais la question qui se pose, c’est de savoir quel poids, quel temps d’antenne… » Et de rappeler que « l’Arcom […] a décidé de faire une représentation pluraliste des différentes opinions en fonction […] de leur poids électoral et de leur poids dans les sondages. »
Un système d’aides en panne
Julia Cagé critique un système d’aides à la presse construit sur la rente : « Plus vous réussissez comme médias, plus vous allez toucher d’aides ». Or, cette logique pénalise les petits titres et freine le pluralisme. Elle retrace « une accumulation historique », des aides fiscales de 1920 aux soutiens au Minitel dans les années 1990, sans cohérence d’ensemble.
Elle propose de redistribuer ces aides via « des bons pour l’indépendance des médias », pour que chaque citoyen puisse désigner les médias qu’il souhaite soutenir avec l’argent public.
L’information, un bien public
« L’information est un bien public », affirme-t-elle, au même titre que l’éducation. « Une personne informée, une voix » : tel est pour elle le fondement démocratique. À ses yeux, le projet de holding de l’audiovisuel public porté par Rachida Dati « remet en cause l’indépendance des médias », en concentrant les pouvoirs et en floutant les missions.
Elle insiste : « Le podcast, c’est une des rares activités […] qui n’est pas confrontée à la concurrence internationale. Fragiliser la radio […] pour aider la télévision publique […] c’est aussi une erreur d’un pur point de vue industriel. »
Une démocratie biaisée par l’argent
Dans son livre Le prix de la démocratie (Éditions Fayard), elle met en lumière le poids des plus aisés dans le financement politique. « Les dons […] sont concentrés parmi les 1% […] voire les 0,1% des Français aux revenus les plus aisés ». Elle propose de plafonner ces dons à 200 ou 300 €, afin de « permettre d’égaliser le poids des individus face au financement de la démocratie ».
Elle critique aussi les réductions fiscales qui, selon elle, favorisent les plus riches : « Si vous donnez 7 500 €, l’État vous rembourse 5 000 €. […] Si vous êtes dans les 50% des Français les plus défavorisés, même si vous donnez 100 €, vous allez payer 100 €. » « j’aimerais bien,» conclut-elle, «que quelqu’un ait des arguments entendables sur le fait de dépenser plus d’argent pour financer les préférences politiques des plus riches que celles des plus modestes».
Lauréate du prix du meilleur jeune économiste en 2023 et du prix Yrjö Jahnsson en 2024, Julia Cagé est professeure à Sciences Po. Invitée de l’Atelier politique, elle revient sur ses travaux consacrés aux médias, à la démocratie et au financement de la vie politique.
Le pluralisme, au cœur de la démocratie
Pour Julia Cagé, « le pluralisme dans les médias, c’est le fait d’exposer les citoyens à l’ensemble des différentes opinions qu’on peut porter sur un sujet, sachant que ce que j’entends par opinion, ça doit quand même rester des opinions factuelles ». Elle distingue un pluralisme externe, qui suppose « une offre qui va couvrir l’ensemble du spectre politique », et un pluralisme interne, devenu essentiel dans l’audiovisuel : « Les gens qui écoutent la télévision, la radio… en général, ils ont au-delà de 60 ou 65 ans ».
Or, ces publics « vont regarder une ou deux chaînes de télévision, une seule chaîne d’information ». En l’absence de diversité interne, « vous allez mettre la télé, et vous tombez par exemple sur Cnews, et vous allez être confronté uniquement aux opinions politiques de l’extrême droite ». Ce n’est plus une information équilibrée, alerte-t-elle, mais une distorsion du débat.
« Oui, bien sûr », répond-elle à la question de savoir si toutes les idées peuvent s’exprimer, « mais la question qui se pose, c’est de savoir quel poids, quel temps d’antenne… » Et de rappeler que « l’Arcom […] a décidé de faire une représentation pluraliste des différentes opinions en fonction […] de leur poids électoral et de leur poids dans les sondages. »
Un système d’aides en panne
Julia Cagé critique un système d’aides à la presse construit sur la rente : « Plus vous réussissez comme médias, plus vous allez toucher d’aides ». Or, cette logique pénalise les petits titres et freine le pluralisme. Elle retrace « une accumulation historique », des aides fiscales de 1920 aux soutiens au Minitel dans les années 1990, sans cohérence d’ensemble.
Elle propose de redistribuer ces aides via « des bons pour l’indépendance des médias », pour que chaque citoyen puisse désigner les médias qu’il souhaite soutenir avec l’argent public.
L’information, un bien public
« L’information est un bien public », affirme-t-elle, au même titre que l’éducation. « Une personne informée, une voix » : tel est pour elle le fondement démocratique. À ses yeux, le projet de holding de l’audiovisuel public porté par Rachida Dati « remet en cause l’indépendance des médias », en concentrant les pouvoirs et en floutant les missions.
Elle insiste : « Le podcast, c’est une des rares activités […] qui n’est pas confrontée à la concurrence internationale. Fragiliser la radio […] pour aider la télévision publique […] c’est aussi une erreur d’un pur point de vue industriel. »
Une démocratie biaisée par l’argent
Dans son livre Le prix de la démocratie (Éditions Fayard), elle met en lumière le poids des plus aisés dans le financement politique. « Les dons […] sont concentrés parmi les 1% […] voire les 0,1% des Français aux revenus les plus aisés ». Elle propose de plafonner ces dons à 200 ou 300 €, afin de « permettre d’égaliser le poids des individus face au financement de la démocratie ».
Elle critique aussi les réductions fiscales qui, selon elle, favorisent les plus riches : « Si vous donnez 7 500 €, l’État vous rembourse 5 000 €. […] Si vous êtes dans les 50% des Français les plus défavorisés, même si vous donnez 100 €, vous allez payer 100 €. » « j’aimerais bien,» conclut-elle, «que quelqu’un ait des arguments entendables sur le fait de dépenser plus d’argent pour financer les préférences politiques des plus riches que celles des plus modestes».