L'Épopée des musiques noires

Le disco n’est pas une musique inoffensive


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Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le disco n’est pas qu’une célébration festive d’un hédonisme échevelé. Si cette forme d’expression suscita d’abord le dédain, elle provoqua par la suite une poussée d’urticaire des oreilles les plus conservatrices. Les adeptes de la danse étaient-ils des frondeurs ? Masquaient-ils des revendications politiques ? L’exposition « Disco, I’m coming out », à la Philharmonie de Paris, tente de répondre à ces interrogations. 

Les ritournelles disco continuent de hanter nos esprits 50 ans après la frénésie de cadences syncopées longtemps jugées simplistes. Notre lecture de ce qui s’apparentait à un genre musical sans lendemain révèle aujourd’hui un engagement citoyen plus affirmé. Les enjeux sociétaux du début des années 80 se fracassaient, aux États-Unis, contre un pouvoir politique rétif aux idées progressistes héritées de la génération hippie. La présidence rigide de Ronald Reagan contrastait singulièrement avec celle de Jimmy Carter et défiait les partisans d’une Amérique inclusive. Face à ce nouveau paysage social étriqué, la vigueur insolente du disco devenait un acte de résistance.

Le Funk et la Soul-Music ont profondément nourri cette nouvelle forme d’expression qui jouait sur une emphase rythmique indéniable martelée par des instrumentistes de grand talent mais, derrière le vernis sonore clinquant de cette époque charnière, les postures des différents protagonistes traduisaient en filigrane un combat pour la liberté de vivre pleinement sa sexualité et sa citoyenneté. Les discriminations de toutes sortes menaçaient encore. Le mouvement « Peace & Love » n’avait pas totalement éteint les rancœurs injustifiées d’une partie de la population américaine. Le 12 juillet 1979, lors d’un match de base-ball à Chicago, une triste cérémonie de destruction rageuse et systématique de disques disco s’apparenta d’ailleurs à un autodafé dont les relents racistes étaient évidents.

Les divas du disco portaient un message qu’il fallait savoir déceler. Les classiques « I’m coming out » et « I’m every woman », incarnés respectivement par Diana Ross et Chaka Khan, ne sont pas des titres anodins. Ils invitent insidieusement à un examen de conscience qui, par ricochets, épouse aujourd’hui les prises de parole d’orateurs téméraires. Les acteurs effrontés des années disco ont certainement fait bouger les lignes dans une surenchère de lumières, certes, outrageusement étincelantes mais suffisamment visibles pour susciter le débat et parvenir à une jouissance artistique redoutablement efficace.

L’exposition « Disco, I’m coming out » se tient jusqu’au 17 août 2025 à la Philharmonie de Paris.

 

La vidéo

Titres diffusés cette semaine :

  • « I’m coming out », Diana Ross - Compilation « Disco – I’m coming out » (Universal Music)
  • « Get Lucky », Daft Punk & Nile Rodgers – Album « Random Access Memories » (Columbia Records)
  • « I’m every woman », Chaka Khan - Compilation « Disco – I’m coming out » (Universal Music)
  • «  Don’t leave me this way », Thelma Houston - Compilation « Disco – I’m coming out » (Universal Music)
  • «  I feel love », Donna Summer - Compilation « Disco – I’m coming out » (Universal Music)
  • « Free Man », South Shore Commission – Compilation « Singles Chronology » (Wand Records)
  • « Let’s groove », Earth Wind & Fire – Album « Raise ! » (Columbia Records).
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L'Épopée des musiques noiresBy RFI