Les histoires de Benoît Broyart

Ce matin, Fanilo va chercher son amie Riana qui habite la case d’à côté. Ils ont rendez-vous sur la plage avec papy Joro, le plus vieux pêcheur du village. Il connaît l’océan comme sa poche. Il a passé toute sa vie sur les flots.

Les enfants courent et papy Joro leur fait de grands signes.

– On y va. Ma pirogue vous attend.

L’embarcation avance lentement sur l’eau transparente. Jusqu’à la barrière de corail, l’océan est peu profond. C’est l’idéal pour pêcher des poissons. Papy Joro est un expert. Leur forme, leur nom, il connaît ça sur le bout des doigts.

– On va s’arrêter ici, les enfants.

Le vieil homme montre quelque chose sous l’eau. Fanilo et Riana regardent, intrigués...

Châtaigne est un pirate doué. Il assomme ses ennemis d’un coup de poing et les jette en entier aux requins. Il découpe en rondelles les plus gros avant de les envoyer à l’eau. Le capitaine Crosne devrait être ravi. Le problème, c’est que Châtaigne tape aussi sur ses amis.

Susceptible, irascible, coléreux, hargneux, il ne supporte pas la moquerie. Une blague et il devient incontrôlable. C’est un petit pirate. Et dans la piraterie, on fait souvent des plaisanteries.

Châtaigne, tu veux un tabouret ? Pour une fois, tu casseras peut-être un nez !

Les nerfs en pelote, Châtaigne entre dans une colère noire et se met en boule. Ses bras font de grands moulinets.

Je vais te réduire en compote !

Au royaume d’enfer, c’est un grand jour pour tous les jeunes dragons. C’est le jour du tournoi du meilleur cracheur de feu, catégorie junior. Le gagnant sera celui qui lancera la flamme la plus longue.

Les dragons se déplacent en famille pour assister et participer au spectacle. Certains volent deux jours sans s’arrêter pour arriver à temps au rendez-vous.

Blaise Charbon a toujours été un petit dragon. Le plus petit de la caverne. Le plus petit de la crèche. Le plus petit de la classe. Alors forcément, il est aujourd’hui le plus petit du tournoi.

Le public est assis dans les gradins. La famille Charbon a trouvé une place au premier rang. Monsieur Charbon est un costaud aux écailles râpeuses. Madame Charbon est une dragonne aux écailles luisantes. Ils s’installent et donnent les dernières recommandations à leur fils Blaise...

Quand vient le printemps, les oiseaux paradent pour séduire leur belle. Chacun a sa technique : gonfler ses plumes, chanter, faire des cadeaux… On peut tout imaginer pour charmer !

Le paradisier, qui vit en Nouvelle-Guinée, a une technique incroyable. Pour séduire sa promise, il danse le tango ! Écoute bien cette histoire, je vais te raconter pourquoi les paradisiers savent aussi bien danser.

C’était il y a longtemps, au printemps. La saison des amours venait de commencer. Partout, dans les arbres, les couples se formaient.

Pourtant, le paradisier était triste. C’était un grand timide. Il était amoureux mais se demandait comment faire pour aborder sa jolie promise.

Sais-tu pourquoi un renne salue toujours un lièvre arctique quand il croise son chemin ? Il se souvient de l'histoire qui est arrivée à l'un de ses ancêtres, il y a longtemps déjà, dans un pays lointain, en Laponie.

Il faisait très froid cet hiver-là. Un troupeau de rennes s'apprêtait à partir vers le Sud pour trouver à manger. Les rennes aiment le lichen et ils connaissent l’endroit où poussent le plus tendre du pays.

L'un d'entre eux s’abîma la patte en glissant dans un fossé. Obligé de rester sans bouger pour que sa blessure guérisse, il regarda ses amis partir avec envie et tristesse. Lui qui d'habitude était très gai perdit la joie et l'appétit.

C’était l’automne. Ilrestait encore quelques feuilles sur les chênes. Mais cette nuit-là, le vent souffla comme jamais. Tous les animaux de la forêt se cachèrent pour se protéger. Le ragondin rejoignit son terrier. Le hérisson fila sous un tas de brindilleset le mille-pattes se réfugia sous une pierre. Au matin, le vent se calma enfin.

Le hérisson était heureux. Il y avait un épaistapis de feuilles sur le sol. En cherchant un peu, il trouverait un  abri parfait pour l’hiver. Il fut surpris de voir pour la première fois desfeuilles très colorées. Des vertes, des rouges, des bleues. De quoi égayer son nid douillet. Et le mille-pattes, affamé, trouva ces drôles de feuillesà son goût...

Ce matin-là, un jeune héron se rendait à la rivière. La tête haute, fier, ne regardant personne, il descendait un chemin de terre. Il était sûr de trouver pour son repas, un peu plus bas, le plus beau des poissons. Il faut dire que l'animal se refusait à manger n'importe quoi. Pour contenter le héron, il fallait de jolis poissons lisses et parfaits.

Les pattes dans l'eau, l'oiseau était confiant. Il trouverait un repas à sa mesure.

Une tanche vint à passer. Au moment où le héron se penchait pour l’attraper, elle dit : « Monsieur le héron, ne me mangez pas ! Ma chair est bien moins bonne que celle du gardon. Et un héron mérite un met de choix. »

Le héron, flatté, laissa échapper sa proie et répondit :

« Merci pour ce conseil, la tanche. Passe ton chemin. Je préfère de loin manger un gardon. »

La tanche partit, rassurée, nager vers d'autres horizons.

Le héron attendit… et deux heures plus tard, un gardon frétillant passa près de lui. Avant qu'il ne puisse le saisir, le jeune poisson lui dit :

« Hep, le héron ! Tu sais, le gardon, c'est bon, mais la chair de l'ablette est plus tendre. Tu devrais attendre. »

Après une courte hésitation, le héron laissa filer le gardon et dit :

« Merci pour ta proposition. Si l'ablette est plus goûteuse que le gardon… passe ton chemin, gamin ! »

Le jeune gardon partit, rassuré, nager vers d'autres horizons.

Le tigre est une panthère. Le léopard aussi. La panthère noire, bien sûr que oui. Rayures, tâches ou robe de nuit, on les distingue très bien ainsi. Mais cela n’a pas toujours était comme ça.

Au commencement du monde, les trois félins ont la même robe beige. Cela leur cause des soucis. On les confond sans arrêt. On les prend l’un pour l’autre. Dès qu’un problème survient dans la jungle, on se trompe de coupable. Le tigre est puni quand le léopard a mal agi. La panthère se fait huer quand le tigre a volé. Et le léopard est battu quand la panthère mérite d’être grondée. Cela entraîne des disputes interminables entre les trois félins.

Dans cette colonie de manchots, en Antarctique, tout se passait bien. Lespapas avaientcouvé les œufsjusqu’à l’éclosion. Les mamans étaient partieschercher à manger. Et les petits avaient cassé leurs coquilles.

Mais une des familles se tenait à l’écart. Elle était embarrassée. Leur petit ne voulait pas jouer avec les autres.

‒ Pourquoi ne veux-tu pas rejoindre tes amis lui demanda son père ?

‒ Je n’ai pas envie.

Il agitait ses ailes avec vigueur.

‒ Commentça pas envie, renchérit la mère ?

‒ Je veux voler, m’élever au-dessus de la banquise.

‒ Mais enfin, mon enfant, reprit la mère. Les manchots ne volent pas.

Il faisait froid mais les oisillons cassèrent leurs coquilles ce jour-là. La chouette rayée regarda ses quatre petits, attendrie.

« Vous avez faim ? Je vais vite vous chercher à manger. Maman revient. » Les petites chouettes eurent bientôt leurs vers de terre. Elles se régalèrent.

Dès que l’aigle apprit l’événement, il alla trouver la chouette rayée pour la féliciter. Il observa les oisillons et dit : « C’est curieux. Ces trois-là sont identiques. Mais le quatrième ne serait-il pas beaucoup plus grand ?

– Pas du tout ! lança la chouette rayée, vexée. Que vas-tu chercher ? »

Une fois l’aigle parti, la chouette observa ses petits de plus près. Cet aigle n’avait pas la vue aussi perçante qu’on le disait ! Les quatre oisillons n’étaient pas identiques, bien sûr, chacun avait son caractère. Mais physiquement, rien ne les différenciait.