Maison, maison de Montblainville,Abri d’une nuit frissonnanteEntre les coups de feu du soir et ceux de l’aube !Tes habitants étaient partisMais la vie en toi persistaitComme la forme et la chaleurD’un corps au creux d’un lit.Contre ton âtre raniméJe suis resté blotti des heuresPendant que les autres dormaient.Je regardais, je regardaisChaque objet fidèle à sa place ;J’imaginais toute une vieOii je m’étais servi de lui ;Et j’étreignais de tout mon coeur,Humble maison de paysan,Ton vieux bonheur intact encore.J’avais toujours connuTes assiettes sur le mur,Ta lampe et son abat-jour,Ton seau de bois et ta huche ;Et j’écoutais sans m’en lasser le balancierDe la haute horloge sonoreQui m’assurait avec lenteurDe l’égalité de la nuit.Maison, maison de Montblainville,Le lendemain tu flambais touteEt l’herbe, aujourd’hui, à ta placeDoit recouvrir un éboulis de pierres.Je pense à ceux qui t’ont perdueCeux dont je fus le dernier hôteEt qu’un autre toit que leur toitAbrite aujourd’hui quelque part.Ils ne me connaîtront jamais ;Et pourtant nous sommes peut-être,Eux et moi, les seuls au mondeEn qui survive ô maison morteLa douce image de ton coeur.Charles Vildrac, Montblainville