Du 22 avril au 3 mai 2019 s’est tenu à New York l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions des peuples autochtones. Ce fut l’occasion de rappeler l’urgence de la reconnaissance, par la France, de ces communautés comme peuples autochtones et de respecter leurs droits.
France Libertés a accompagné plusieurs représentants autochtones français. Parmi eux, Subama Mapou, une Kanak de Nouvelle-Calédonie, très active sur la question de la protection des savoirs traditionnels et de la lutte contre la biopiraterie.
* Avec Subama Mapou
Vous préparez actuellement une thèse à Marseille…. autour de l’usage des plantes traditionnelles en cosmétique. Vous vous êtes intéressée très tôt aux vertus des plantes médicinales. De quelle manière ?
« Cela vient de ma famille. On a grandi quotidiennement avec les pratiques médicinales à base de plantes que les grands-mères et les grands-pères préparaient au quotidien. Mon arrière-grand-père était tradipraticien. On a plusieurs usages qui nous ont été transmis. C’est comme une mission. Chaque enfant a plus ou moins des rôles dans la famille. Notre organisation sociale est comme cela. Ma mission était d’utiliser les plantes. C’est quelque chose qui est venue très jeune. J’ai poursuivi mes études en métropole sur les plantes médicinales parce qu’il fallait comprendre ce que les chercheurs venaient voir chez nous. »
Ces savoirs traditionnels, vous avez souhaité très tôt qu’ils soient reconnus, protégés et valorisés. C’est l’objet de votre projet de recherche. Quel est son objectif ?
« J’ai commencé une thèse à l’université de Nouvelle-Calédonie en 2017 sur la cosmétopée en Nouvelle-Calédonie. Cela correspond à toutes les plantes décrites pour leur usage en cosmétique. Dans le cadre de ma thèse, j’ai voulu qu’il y ait une reconnaissance de ces pratiques. J’ai fait une comparaison entre les extraits réalisés selon les méthodes traditionnelles et les extraits aux solvants. On a eu des grandes surprises. Les pratiques traditionnelles peuvent parfois montrer une activité plus importante que les extraits conventionnels. »
Vous avez le projet de créer Gardénia cosmétique.. une société un peu particulière qui entend valoriser les savoirs kanaks. Dans quel but et avec quelle philosophie ?
« La philosophie de ce projet est de valoriser ces connaissances traditionnelles, mais en intégrant totalement les populations du pays, au niveau des tribus. Gardénia cosmétique a pour objectif de produire des extraits végétaux à partir d’un procédé d’extraction écologique innovant. C’est le cœur de mon projet : créer un prototype d’extraction écologique à 100%. Les extraits vont être obtenus à partir des plantes des matières qu’on va collecter au niveau des tribus. L’idée est qu’il y ait de jeunes qui puissent s’orienter vers ces filières d’avenir, développement durable et commerce équitable. L’idée est de récupérer la matière au niveau des tribus, créer des pépinières de proximité pour permettre un développement économique de manière raisonnée et écoresponsable au niveau des tribus. »
Dans votre recherche, comme dans Gardénia cosmétique, votre démarche est d’associer au maximum les différentes communautés et de ne rien faire sans leur accord. Vous avez élaboré un document de consentement préalable à la collecte des savoirs locaux.
« C’est le cœur du projet de recherche. Je n’ai pas réalisé d’enquête ethnobotanique tant que je n’avais pas ce document de consentement préalable libre et éclairé avec les détenteurs de savoirs. C’est le cœur du processus. Il faut que tous les acteurs soient d’accord pour qu’on puisse valoriser telle ou telle plante. L’idée est qu’il y ait un lien entre les détenteurs ...