Dans le cadre de la série Afrique du Sud et la Suisse, une « amitié » en or pour geneveMonde.ch et Histoire Vivante (RTS), l’historienne Sandra Bott, professeure à l’Université de Lausanne, lève le voile sur l’un des chapitres les plus sensibles de la diplomatie économique suisse : ses relations avec le régime de l’apartheid.

Spécialiste de l’histoire économique internationale, Sandra Bott a consacré sa thèse – primée par la Faculté des lettres de l’UNIL – aux liens étroits entre la Suisse et l’Afrique du Sud durant la guerre froide. Elle y décrypte avec précision les mécanismes financiers, bancaires et commerciaux qui ont permis à la Suisse de préserver ses intérêts tout en affichant une posture officiellement neutre.

Activités troubles de Glencore

Dans un entretien dense et sans détours, elle revient sur les circuits de l’or sud-africain, le rôle ambigu de la Banque nationale suisse, les activités troubles de certaines sociétés de négoce comme Glencore ou encore les crédits massifs accordés à Pretoria jusque dans les années 1980. Des flux économiques souvent invisibles, parfois volontairement opaques, qui interrogent la frontière entre prudence diplomatique et complicité passive.

Loin de l’image d’un petit État détaché des grands conflits du monde, Sandra Bott montre comment la Suisse a su tirer profit de sa neutralité pour maintenir un accès privilégié à l’or, aux marchés et aux ressources, quitte à fermer les yeux sur les violations massives des droits humains.

Résistance au devoir de mémoire

À l’heure où les appels au devoir de mémoire se multiplient, son analyse met en évidence les résistances politiques à une relecture critique de ce passé, et interroge les héritages encore visibles dans le système financier suisse d’aujourd’hui.

Un entretien qui permet de comprendre pourquoi l’histoire économique n’est jamais neutre, et pourquoi celle de la Suisse et de l’Afrique du Sud reste, encore aujourd’hui, une histoire en or… et en ombres.

Entretien réalisé par David Glaser

Photo : Félix Imhof UNIL

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