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Pour changer, je vous propose une interview qui va vous faire un peu voyager. Mais attention, ça risque de vous donner envie de partir !
Partir où ? Au Ladakh qui est aussi surnommé le « petit Tibet ».
J’ai posé quelques questions à Alex Le Beuan, qui est le directeur de l’agence de voyage Shanti Travel et qui connaît très bien cette région. A travers cette interview vous allez découvrir le Ladakh et le trekking au Ladakh. On y parle aussi (enfin surtout Alex, je n’ai fait que poser des questions ;-)) un peu de Shanti Travel et des spécificités des treks organisés.
Je vous laisse découvrir cela par vous-même en audio juste en dessous ou par écrit un peu plus bas. N’hésitez pas à me dire si ce genre d’interview, plutôt axée « treks à l’étranger » vous plaît pour que je sache si je renouvelle l’expérience à l’avenir ou pas.
Pour illustrer l’interview et vous faire rêver encore plus, voici une petite vidéo sur le Ladakh réalisée par Shanti Travel.
François Jourjon : Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle interview du blog Randonner Malin. Je suis actuellement avec Alex Le Beuan qui est le directeur de Shanti Travel et je vais lui poser quelques questions sur le Ladakh, et les treks au Ladakh, qui est une région que, si j’ai bien compris, il aime particulièrement. Donc Bonjour Alex.
Alex Le Beaun : Bonjour et merci de m’accueillir.
François Jourjon : Alors, pour commencer, est-ce que vous pourriez vous présenter rapidement ? En fait, quel est votre parcours, qu’est-ce qui vous a amené à atterrir là où vous êtes ?
Alex Le Beuan : Au départ, l’amour de la montagne, parce que mes parents ont fait longtemps de l’alpinisme et notamment en Himalaya et dans les Karakoram. Et donc ils m’ont donné leur passion de l’alpinisme et du trekking, de la randonnée, très tôt. Et ensuite, je suis tombé amoureux du monde indien, de ce continent indien, de sa culture et de la vie plus généralement. Donc j’ai étudié à L’INALCO, l’institut national des langues et civilisations orientales.
François Jourjon : D’accord.
Alex Le Beuan : Et ensuite, j’ai passé le diplôme de l’AMM (l’accompagnateur en moyenne montagne), à Briançon, dans le briançonnais. J’ai donc commencé à travailler comme guide de trekking pour des agences de trek françaises, surtout en Himalaya, mais aussi dans le Sahara et en Afrique australe.
François Jourjon : D’accord.
Alex Le Beuan : Et puis, dans d’autres pays en Asie. Et ensuite, j’ai bossé comme chef produits dans des tour-opérateurs à Paris, sur le voyage aventure et trekking sur l’Asie. Et ensuite, j’ai monté Shanti Travel il y a maintenant 9 ans, en 2005. D’abord à New Dehli et maintenant on est sur différentes destinations en Asie, on a différentes agences en Asie.
François Jourjon : D’accord, très bien. Donc c’est un parcours en commençant directement en tant que guide et après en employant des guides, donc c’est pour voir les différentes facettes du métier. Et qu’est-ce qui vous a vraiment plu en Asie et spécialement en Inde, vu que c’est un peu là que ça a commencé si je comprends bien ?
Alex Le Beuan : C’est vrai, tout à fait. C’est en Inde qu’on a eu notre première agence, qui est le siège social de Shanti Travel aujourd’hui. En fait, l’Inde c’est d’abord une culture très vaste, très grande, très riche et puis c’est une culture qui est très antinomique de notre culture occidentale et européenne.
Et c’est aussi ça qui m’a plu, parce que ça permet quand on s’intéresse à la culture indienne de remettre en question, pas forcément en cause, mais d’avoir peut-être des idées un peu nouvelles et de voir le monde de manière peut-être un peu plus large ou différemment que ce qu’on nous a inculqué en Occident.
François Jourjon : D’accord, d’accord. Et vous habitez du coup en Inde en ce moment ou vous n’avez pas d’endroit fixe ou vous habitez en France ?
Alex Le Beuan : Non, j’habite à New Dehli où est notre siège social. Et puis comme on a aussi des agences, on a une agence en Inde du Sud, une à Katmandou, une à Colombo au Sri Lanka, une en Indonésie à Bali où je me trouve actuellement. Donc, je suis pas mal sur les routes et aussi sur les chemins de trek de temps en temps encore heureusement.
François Jourjon : Oui d’accord, donc vous amenez encore des clients sur les treks ?
Alex Le Beuan : J’accompagne malheureusement très rarement, mais en revanche je suis assez souvent sur les routes et les chemins de treks plutôt pour la logistique, du repérage, pour aussi ramener des outils de communication comme de la vidéo, de la photo, des textes de blog, etc.
François Jourjon : D’accord, et du coup vous allez aussi tester les différents treks que vous proposez ? Ou il y a d’autres personnes qui les testent pour vous ?
Alex Le Beuan : Ah non, il y a d’autres personnes. Malheureusement, je ne peux pas tout tester.
François Jourjon : Oui j’imagine.
Alex Le Beuan : Mais, c’est toujours un plaisir de le faire. Là j’étais avec Alexis, le général manager de l’agence de Bali et on était il y a quelques jours sur Java Est, notamment toute la région volcanique de Bromo.
Donc on a randonné, on a découvert des nouveaux itinéraires qui étaient très intéressants, où il y a personne, très peu de voyageurs, de trekkeurs et ça c’est des moments absolument fabuleux – j’ai la chance de faire ce métier. Mais ce n’est pas non plus mon quotidien malheureusement toujours.
François Jourjon : Oui j’imagine.
Alex Le Beuan : Il y a quand même pas mal de bureau aussi.
François Jourjon : Oui, d’ailleurs par rapport à ça, avant de se recentrer sur le Ladakh, je me demandais comment en fait vous choisissez d’ouvrir une agence dans un nouveau pays. Est-ce que c’est parce que vous y voyez uniquement un potentiel économique ? Ou est-ce que c’est aussi parce que vous avez trouvé un trek là-bas ? Ou c’est un repérage coup de chance on va dire ou un coup de cœur qui fait qu’au final vous décidez de proposer après des treks dans une certaine région et d’ouvrir une agence dans une certaine région ?
Alex Le Beuan : Alors il y a différents critères. Il y a d’abord un critère, je vais dire de sécurité, sécurité pour les clients, sécurité aussi pour notre activité économique. C’est un critère.
Le deuxième critère il est sur notre valeur ajoutée en tant qu’agence locale francophone basée dans différents pays. C’est-à-dire, quel type d’activité on peut développer et ces activités, est-ce qu’on a une réelle valeur ajoutée ou pas ? C’est-à-dire que vendre des séjours package en hôtels, notre agence Shanti Travel n’aurait aucune valeur ajoutée ou presque. En revanche, développer des nouveaux treks avec des guides francophones qu’on forme, avec des hébergements de charme authentiques chez l’habitant, etc. Là on va avoir une vraie valeur ajoutée.
Donc voilà, c’est les deux critères principaux, c’est l’aspect sécurité pour les clients et pour l’agence d’un point de vue économique et le type d’activité qu’on peut proposer. Il y a aussi la saisonnalité, parce qu’on a par exemple des programmes en Mongolie – sachant que la Mongolie c’est 4 mois la saison – c’est assez court. Et c’est vrai que par exemple sur l’Indonésie on peut rayonner toute l’année et sur l’Inde c’est pareil. Donc ça aussi, ça fait partie des critères de sélection qui font qu’on décide de s’implanter dans un pays ou pas.
François Jourjon : Et là, vous avez parlé de guides francophones, c’est des guides francophones mais locaux ou est-ce que c’est des guides qui ne sont pas locaux, que vous employez ?
Alex Le Beuan : Ca dépend des destinations et ça dépend du niveau des trekkings. C’est-à-dire qu’on a tendance et on préfère travailler avec des guides locaux, et ce qu’on appelle des tours leaders, c’est-à-dire des accompagnateurs locaux, parce que ça favorise l’économie locale, ça permet aussi d’avoir un échange intéressant sur le plan culturel entre le client et le guide.
Maintenant, il y a quelques régions où c’est difficile de trouver ce type de profils d’une part. Et puis, il y a d’autres régions aussi où pour des treks qui sont très engagés et qui demandent des connaissances au niveau sécurité et montagne, que n’ont pas forcément les locaux parce qu’ils fonctionnent différemment dans certains coins d’Asie encore beaucoup.
François Jourjon : D’accord, d’accord, je comprends oui. Peut-être que maintenant on va se recentrer un peu plus sur le Ladakh. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus sur le Ladakh pour ceux qui ne connaissent pas cette région ? Alors, je fais partie de ces gens-là, je connais juste de nom, je n’y suis jamais allé. Est-ce que vous pouvez resituer un peu où c’est, ce que c’est ? Parce qu’il y a des gens qui ne savent pas si c’est plutôt un pays, alors que c’est plutôt une région.
Alex Le Beuan : Alors le Ladakh, qu’on appelle aussi souvent le petit Tibet, se situe au Nord-Ouest de l’Inde à la frontière avec le Tibet – donc la Chine aujourd’hui et le Pakistan. C’est une région qui se trouve en fait au Nord de la grande barrière himalayenne sur le plateau tibétain avec une altitude moyenne de 3500 mètres d’altitude. La capitale, Leh, est d’ailleurs elle-même située à 3500 m d’altitude. Qui dit nord de la barrière himalayenne, dit qu’on ne subit pas la mousson d’été, contrairement à tout le reste de l’Inde.
François Jourjon : D’accord.
Alex Le Beuan : Ce qui veut dire que c’est une région très propice au trek, en Juin, Juillet, Août, Septembre, parce qu’il fait beau et parce qu’il ne fait pas trop froid. Le reste de l’année, en tout cas de début Novembre jusqu’à la fin Mars, la nuit il fait largement en dessous de zéro, en Janvier-Février il peut faire -20°C, -30°C à 3500, 4000 mètres d’altitude.
Par ailleurs, seulement 4 mois de l’année les routes sont ouvertes. Il y a deux routes qui vont au Ladakh depuis la plaine indienne. Il y a une route qui part du Sud depuis Manali jusqu’à Leh par plusieurs cols à 5000. Et une autre route qui part de Srinagar la capitale du Cachemire avec là aussi deux cols à pas très loin de 5000. Et ces cols sont fermés 8 mois de l’année à cause de la neige et donc le seul moyen pendant ces mois de fermeture de route de se rendre au Ladakh, c’est par avion.
François Jourjon : D’accord. Et c’est toujours possible de faire des treks en cette saison-là, ou ça devient quand même des treks un peu différents, plutôt orientés neige.
Alex Le Beuan : Alors, pour ce qui est de l’hiver, il y a un trek qui est maintenant un classique exceptionnel qui est le Tchadar. Le Tchadar, c’est le nom de la rivière Zanskar qui est gelée l’hiver. Il y a d’ailleurs eu de très beaux livres d’Olivier Föllmi, photographe sur cette région et en particulier sur le Tchadar l’hiver.
Et là, on fait un trek sur la rivière gelée. Donc, c’est une manière un peu différente de marcher, puisqu’on glisse et on dort sous tente dans des espèces de caves qui sont en bordure de la rivière. C’est un trek qui n’est pas très soutenu physiquement mais par contre il fait très froid, on voit peu le soleil, donc il faut un mental d’enfer et un très bon matériel pour ne pas avoir trop froid (rires).
François Jourjon : D’accord oui.
Alex Le Beuan : Sinon, il y a des treks de printemps, automne, à relativement basse altitude. C’est relatif, c’est bas au niveau du Ladakh, aux alentours de 3000, 3500. Ils sont très sympathiques au printemps et à l’automne, parce qu’il y a très peu de trekkeurs à cet endroit-là. Et les ladakhis, les locaux, ont beaucoup plus de temps pour échanger avec les trekkeurs que l’été, puisque l’été la saison agricole et pastorale est très courte donc ils travaillent beaucoup sur les mois d’été.
Et enfin, il y a un trek qui est très intéressant pour les personnes qui s’intéressent à la faune. C’est le trek du léopard des neiges – le fameux léopard des neiges qu’on a beaucoup de mal à voir – mais qu’on organise comme ça l’hiver sur les pas du léopard des neiges, où là, les conditions sont moins – on va dire – moins extrêmes, puisqu’on peut dormir dans des lodges ou mêmes des maisons d’hôtes et petites guest houses, où il y a du chauffage et aller dans la journée randonner pour aller voir cet animal mythique.
François Jourjon : D’accord. Et du coup les treks, ils empruntent, j’imagine qu’il n’y a pas de chemins de randonnée qui ont été faits pour, mais c’est des chemins qui étaient utilisés pour quoi à l’origine ?
Alex Le Beuan : Ce sont effectivement des chemins traditionnels de communication de village à village et qui donc sont utilisés aujourd’hui l’été aussi par les randonneurs, par les trekkeurs.
François Jourjon : Mais ils sont toujours aussi utilisés par les locaux pour la logistique ?
Alex Le Beuan : Oui tout à fait, parce qu’il y a énormément de villages qui n’ont pas accès à la route en fait, qui sont loin des routes, où il faut parfois 5 heures, parfois même plusieurs jours de marche avant de rejoindre une route.
François Jourjon : D’accord. Et actuellement, c’est très fréquenté par les randonneurs et les touristes ou pas encore, ou c’est en train de se développer ?
Alex Le Beuan : Alors, la capitale Leh est très courue par les touristes indiens mais surtout en Avril, Mai, Juin qui coïncident avec la période des vacances scolaires. Et puis, les temples, les monastères qui sont autour de Leh, la capitale, sont aussi courus à cette période-là. Mais par contre, pour ce qui est du trekking, c’est encore une région qui n’est pas très courue.
Alors après, ça dépend des treks. Le trek du Zanskar ou de la Marka qui sont des classiques, qui peuvent être assez courus entre le 15 juillet et le 15 août. Et puis, il y a des treks beaucoup plus en dehors des sentiers battus. Pendant 15 jours ou 10 jours de randonnée, si on croise un ou deux groupes de trekkeurs, c’est le maximum.
François Jourjon : D’accord, d’accord, donc ça va encore. Donc vous avez parlé qu’il y avait des touristes indiens à la capitale. Est-ce que c’est des touristes que vous retrouvez aussi sur les treks ou pas ou est-ce que les locaux ne pratiquent pas vraiment la randonnée ? C’est uniquement un public étranger ?
Alex Le Beuan : Pas encore, mais c’est en train de changer. On a un type de tourisme indien qui n’est pas très sportif, outdoor, nature pour l’instant, mais on commence à avoir une nouvelle génération d’étudiants ou de post-étudiants qui se mettent au VTT, qui se mettent au trekking, voire même à l’alpinisme.
François Jourjon : D’accord.
Alex Le Beuan : C’est les balbutiements pour l’instant.
François Jourjon : D’accord, donc c’est en train de changer un petit peu. Et comment la population locale accueille les randonneurs, les trekkeurs ? Dans les villages, comment l’accueil est en général ?
Alex Le Beuan : L’accueil est assez exceptionnel. Ben parce que d’abord, ils ne voient pas grand monde la plupart du temps et surtout les 8 mois d’hiver. C’est assez exceptionnel aussi parce que ce sont des gens extrêmement ouverts, ouverts aux autres cultures. Alors, il y a forcément souvent la barrière de la langue, puisqu’ils parlent très peu anglais – d’où l’intérêt d’avoir un guide francophone qui peut faire un peu la liaison si vous voulez.
Et puis l’accueil, quand on dort en maison d’hôte plutôt qu’en tente – puisqu’on a le choix sur certains itinéraires – l’accueil est très sympathique parce qu’ils nous proposent – si on souhaite – de les aider à préparer à manger, donc on apprend à préparer des plats tibétains, ladakhis. Donc, il y a de vrais échanges, c’est des gens qui sourient, qui rigolent beaucoup. Donc l’accueil est vraiment très très bon.
François Jourjon : D’accord, et donc ça c’est pour les treks organisés. Je me demandais, est-ce que c’est possible, est-ce qu’il y a des gens qui font des treks au Ladakh, mais seuls et qui s’organisent seuls. Est-ce qu’il y a des difficultés particulières pour ce qui est l’eau, les itinéraires, les cartes, ou est-ce que la plupart des gens prennent les services d’une agence pour faire des treks ?
Alex Le Beuan : Oui tout à fait. La plupart des trekkeurs passent par des agences. Beaucoup plus que sur des circuits par exemple au Népal, très classiques, comme le grand tour des Annapurnas ou le sanctuaire des Annapurnas.
Pourquoi ? Parce que d’une part, il n’y a pas du tout autant de lodges, il y a seulement deux itinéraires de treks classiques au Ladakh, où on a des maisons d’hôtes, où on dort chez l’habitant. Donc ça c’est la première raison. Ça veut dire que sur de nombreux treks, il faut avoir le matériel de camping, de tente. Et ainsi que toute la nourriture pour le trek, donc ça pèse lourd.
La deuxième raison, c’est que en dehors de 2-3 itinéraires où les chemins sont très bien tracés, il y a pas mal d’itinéraires plus hors des sentiers battus, où il est plus difficile parfois de trouver son chemin.
François Jourjon : D’accord.
Alex Le Beuan : Cela dit, par contre, il y a d’excellentes cartes, les cartes Olizane sont très bonnes, elles sont divisées par 3 sur tout le secteur du Ladakh, avec les courbes, avec l’altitude et elles sont très très bien faites en revanche.
François Jourjon : Et c’est facile de se les procurer ou pas ? Parce qu’il y a certains pays du monde ou c’est…
Alex Le Beuan : Oui, oui.
François Jourjon : Là c’est facile d’accord, il n’y a pas de censure ou quoique ce soit ?
Alex Le Beuan : Alors, c’est facile de se les procurer en France. Une fois au Ladakh non, il vaut mieux les acheter en Europe.
François Jourjon : D’accord, il vaut mieux se les procurer avant. Donc en gros, pour quelqu’un qui a une certaine expérience, qui sait se débrouiller seul, ce n’est pas impossible de faire un trek au Ladakh seul, mais il faut avoir un peu d’expérience, c’est ça ?
Alex Le Beuan : Oui, tout à fait, il faut avoir une bonne expérience. Il faut savoir aussi qu’il est interdit d’avoir avec soi un téléphone satellite en Inde. C’est tout simplement interdit, donc ça veut dire que sur des treks vraiment engagés, où ça peut prendre plusieurs jours de marche pour arriver à une route, s’il arrive quoi que ce soit et qu’en plus on n’est pas avec une équipe, enfin un guide ou des muletiers, ça peut devenir vite problématique.
François Jourjon : Oui j’imagine. Et quelle est la raison pour l’interdiction des téléphones satellites ?
Alex Le Beuan : Ce sont des raisons liées à la sécurité purement, au niveau de l’Inde, qui a été il y a plusieurs années maintenant, où il y a eu des extrémistes qui ont malheureusement posé quelques bombes. Ca fait, la dernière était en 2008, et du coup pour des raisons de sécurité, les autorités indiennes interdisent les téléphones satellites.
François Jourjon : D’accord, très bien. Donc là je parlais un peu du trekking seul, quel est l’avantage en gros de prendre un guide, de prendre une agence de voyage dans ces cas-là. C’est quoi pour vous, en gros le plus gros avantage ?
Alex Le Beuan : Si vous voulez, les avantages c’est d’avoir un avantage sécurité comme on le disait tout à l’heure. Il y a un autre avantage, c’est un avantage culturel. C’est-à-dire que le guide professionnel il est en quelques sortes l’interface entre la culture et les attentes des trekkeurs et sa propre culture à lui.
Donc c’est beaucoup plus facile par l’intermédiaire d’un guide de rentrer en contact avec les villageois, de rentrer dans les maisons, d’aller boire le thé. Bref, ça permet aussi d’apprendre tout un tas de notions sur l’environnement physique et culturel de la région du Ladakh. Voilà, c’est essentiellement sécurité et échange culture.
François Jourjon : D’accord et pour la logistique c’est plus facile j’imagine, pour les gens qui n’ont pas l’habitude.
Alex Le Beuan : Tout à fait, sachant que ce n’est quand même pas très cher, ça permet aussi de ne pas porter un sac de 25 ou 30 kilos, puisque la plupart du temps, ce sont des mules et parfois des yaks qui portent les bagages, c’est quand même beaucoup plus confortable.
François Jourjon : D’accord, ben c’était ma prochaine question en fait. Vous avez déjà répondu, je me demandais s’il y avait un portage, d’accord donc c’est un portage par des mules et des yaks. Très bien, et est-ce qu’il y a une particularité – mis à part le côté culturel, le fait d’être dans un pays différent – d’un trek au Ladakh par rapport à un trek en France ? Est-ce qu’il y a des choses qui sont vraiment différentes, à part que ça ne se passe pas au même endroit ? Est-ce qu’il y a des particularités ?
Alex Le Beuan : Alors, si vous voulez, on est sur une extension, enfin sur l’extrême nord-ouest du plateau tibétain donc déjà la grande différence c’est qu’on est en haute altitude tout de suite.
François Jourjon : D’accord.
Alex Le Beuan : On a beaucoup de cols à plus de 5000 qui sont des cols de trekking, on n’est pas dans l’alpinisme.
François Jourjon : Oui d’accord.
Alex Le Beuan : Donc il y a cette notion de haute altitude. Il y a aussi cette notion de « grands paysages » de « grands espaces », qu’on n’a pas dans les Alpes ou les Pyrénées, ni le Massif central par exemple en France. Puisqu’on est sur le plateau, on est parfois proche de paysages types de ce qu’on va rencontrer en Mongolie, mais en beaucoup plus haut et avec d’immenses sommets. Et par ailleurs en termes de paysages, on est sur des paysages très arides, c’est un désert d’altitude, c’est un désert himalayen avec quelques oasis, villages par-ci par-là.
François Jourjon : D’accord, et là vous avez parlé de cols assez hauts, est-ce que du coup vous êtes obligés de demander aux personnes d’êtres acclimatées un petit peu avant ou ça fait partie du trek aussi, vous faites l’acclimatation pendant le trek ?
Alex Le Beuan : Alors, c’est quand même plus simple que sur des régions comme le Solukhumbu, l’Everest ou les Annapurnas au Népal, puisqu’on est sur des vallées plus larges et si vous voulez on n’est pas obligés de suivre les paliers de manière à ne pas avoir un mal aigüe des montagnes. On peut quand même marcher pas mal d’heures dans la journée, parce qu’on n’a pas des pentes aussi raides que sur le sud de l’Himalaya.
Néanmoins, l’arrivée à 3500 mètres à Leh peut poser problème de temps en temps et du coup c’est la raison pour laquelle on a systématiquement – puisque ce sont des vols qui arrivent le matin sur Leh – on a systématiquement la première journée à un rythme très cool, on se repose. Et le lendemain et le surlendemain, on a des visites de monastères dans la région de Leh autour de 3500 m avec des courtes marches qui permettent de bien s’acclimater avant de commencer le trek proprement dit.
François Jourjon : D’accord, parce qu’à 3500 m il y a des personnes qui souffrent du mal aigüe des montagnes. Même en dessous, à 3000 m, j’ai déjà vu des personnes qui avaient du mal à dormir.
Alex Le Beuan : Tout à fait.
François Jourjon : Du coup, là, peut-être pour se recentrer un peu plus, donc là il n’y a pas d’agence au Ladakh ? L’agence qui s’occupe des treks au Ladakh elle est à New Dehli ?
Alex Le Beuan : On a notre agence en conseils voyages, en vente, qui se trouve à Dehli. En revanche, on a une agence de logistique qui se trouve à Leh au Ladakh. Notre propre agence, c’est une antenne où on accueille les trekkeurs et où on organise les treks proprement dits, avec les guides, avec les muletiers, avec les cuisiniers, avec toute la logistique de camping.
François Jourjon : D’accord, et est-ce que vous travaillez toujours avec les mêmes personnes, vous travaillez avec des locaux, est-ce que vous travaillez aussi avec des étrangers ?
Alex Le Beuan : Tout l’aspect accompagnement, c’est-à-dire les muletiers, les guides et les cuisiniers sont locaux. Ceci dit, on a aussi des cuisiniers qui sont népalais parce que les népalais sont très bons cuisiniers de trekking depuis des années, bien avant même que le Ladakh s’ouvre au tourisme en 1974 d’ailleurs.
Et du coup il y a pas mal de népalais qui viennent travailler à la saison au Ladakh parce qu’au Népal, dans la plus grande partie du Népal, c’est la mousson et donc il n’y a plus beaucoup de treks. Mais donc on a principalement des locaux. En revanche, pour le conseil voyage, pour la vente et pour l’accueil, on a aussi des français dans l’équipe Shanti Travel.
François Jourjon : D’accord, donc vous avez beaucoup de clients français, ou est-ce que vous essayez d’offrir les treks à un autre public, dans d’autres pays ? Est-ce que vous avez cette possibilité ? Ou vous vous centrez sur la France surtout ou sur les francophones ?
Alex Le Beuan : Ce sont essentiellement des francophones, mais on a aussi de plus en plus de voyageurs anglophones et germanophones.
François Jourjon : D’accord, très bien. Et bien merci en tout cas, je pense que j’ai fait un peu le tour des questions que j’avais envie de vous poser. Merci beaucoup d’avoir répondu à mes questions. Est-ce qu’il y a quelque chose que vous voulez ajouter sur le Ladakh ou peut-être sur Shanti Travel ?
Alex Le Beuan : Ben d’abord, je vous remercie de m’avoir invité, c’était très agréable d’échanger avec vous. Ce que je pourrais rajouter peut-être, c’est qu’il y a énormément de voyageurs, de trekkeurs, qui rêvent de découvrir le Tibet.
Il se trouve que le Tibet est aujourd’hui chinois, que ce n’est pas toujours facile de se rendre au Tibet et la situation n’est pas toujours très bonne pour les tibétains eux-mêmes. Et la chance du Ladakh, c’est que c’est un petit Tibet, mais c’est un Tibet libre où le gouvernement indien non seulement autorise mais favorise la culture tibétaine, ladakhie – que ce soit sur le plan linguistique, culturel, religieux. Et donc on est au Tibet, mais dans un Tibet libre.
François Jourjon : D’accord, et d’ailleurs d’où vient le nom « petit Tibet » originellement ?
Alex Le Beuan : En fait, si vous voulez, c’est la même culture. Les ladakhis parlent un dialecte tibétain, il y a énormément de mélanges. Des tibétains qui se sont mariés avec des ladhakis et vice-versa. C’est vraiment la même culture.
Simplement, ils sont coupés par une frontière purement politique et non pas géographique et culturelle ou religieuse. Et le fait qu’on l’appelle le petit Tibet, c’est parce que c’est une région qui doit faire en superficie pas plus du cinquième du Tibet, mais qui lui ressemble énormément.
François Jourjon : D’accord très bien. Et ben merci beaucoup Alex pour cette interview, c’était très intéressant surtout pour les personnes qui s’intéressent au Ladakh, et puis bonne continuation.
Alex Le Beuan : Merci beaucoup et j’espère à bientôt.
François Jourjon : Oui ça marche.
[Interview] A la découverte du Ladakh avec Alex Le Beuan de Shanti Travel est un article de Randonner Malin, le blog avec des conseils pratiques et techniques pour la randonnée pédestre.
Pour changer de l’Europe des livres et de l’Europe des lois, Julia Gaubert et Mathieu Sabourin se sont lancés dans une grande aventure : une diagonale de l’Europe à pied de Tallinn (Estonie) à Lisbonne (Portugal) – 7000 kilomètres pour découvrir l’Europe des territoires et l’Europe des gens.
Dans cette interview, Julia et Mathieu nous racontent leur aventure passionnante : pourquoi ils sont partis, comment ils se sont préparés, comment ils gèrent la logistique, ce qui les a marqués (en bien et en mal), et bien d’autres choses que je vous laisse découvrir.
C’est une interview qui devrait particulièrement vous intéresser si vous souhaitez vous lancer dans une randonnée au long cours. Je pense notamment aux nombreuses personnes en préparation des chemins de Saint Jacques de Compostelle qui lisent le blog.
Pour écouter cette interview, appuyez simplement sur le bouton “Play” du lecteur ci-dessous. Vous pouvez aussi télécharger le fichier MP3 en faisant un clic droit sur “Télécharger” et en sélectionnant “Enregistrer la cible sous”.
François Jourjon : Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle interview du blog Randonner Malin. Je suis actuellement avec Julia et Mathieu qui sont en train de vivre une aventure un peu particulière, qui s’appelle « l’Europe des petits pas ». Bonjour Julia, bonjour Mathieu.
Mathieu Sabourin : Bonjour.
Julia Gaubert : Bonjour François.
François Jourjon : Alors, est-ce que pour commencer vous pouvez peut-être vous présenter et présenter un peu votre projet.
Julia Gaubert : Alors, moi j’étais avant juriste en droit de la santé et on a tous les deux démissionné pour vivre cette aventure.
Mathieu Sabourin : Moi, je travaillais dans le conseil aux territoires et sur les politiques européennes. Et du coup, on a quitté nos boulots et nos vies pour se lancer dans une grande traversée de l’Europe, uniquement en marchant, de Tallinn à Lisbonne – ce qui fait à peu près 7000 km.
Julia Gaubert : Avec pour objectif de rejoindre les deux capitales les plus extrêmes de l’Union européenne.
François Jourjon : D’accord, donc ce n’est pas uniquement un projet personnel de marche, il y a aussi quelque chose derrière, j’imagine en plus, avec le titre de votre projet : « L’Europe des petit pas ». Il y a quelque chose derrière, ce n’est pas ça ?
Julia Gaubert : Je crois qu’on voulait un projet aussi qui ait un écho avec notre parcours professionnel. Moi je suis juriste en droit de la santé, mais spécialisée dans les questions européennes. Et Mathieu, est consultant en politique publique et spécialisé dans les questions européennes aussi.
Donc, je pense qu’on en avait marre de l’Europe des livres, de l’Europe des lois et on avait envie de connaître l’Europe telle qu’elle est vraiment : l’Europe des gens, l’Europe des territoires. Donc ça fait écho à notre parcours aussi, professionnel avant.
François Jourjon : D’accord. Et donc actuellement, vous en êtes où ? Vous m’avez dit qu’il y avait 7000 km à parcourir, vous avez marché combien de kilomètres, vous êtes actuellement où ?
Julia Gaubert : Alors là, on a marché je dirais 4600 km, on a traversé 10 pays et ça fait 9 mois que nous marchons.
François Jourjon : D’accord. Et il reste à peu près ?
Julia Gaubert : Il reste un tiers, un peu moins d’un tiers, il reste 2500 km pour atteindre Lisbonne en fin mai, mi-juin plutôt. Mi-juin 2014.
François Jourjon : D’accord. Vous vous étiez fixé un planning ou vous vous êtes dit : « on verra quand on arrive » ou vous aviez à peu près estimé une date d’arrivée ? Enfin, vous aviez une envie d’arriver à un certain moment ou pas du tout ?
Mathieu Sabourin : Oui, en fait on s’était donné un an. Alors, après pour estimer le temps, la distance, c’est un petit peu compliqué parce qu’en fait on ne suivait pas un grand GR (ndlr : chemin de grande randonnée) ou un itinéraire pré-balisé, on définissait notre route au jour le jour. Ce qui fait qu’en fait, on n’avait pas même véritablement d’idée de quelle était la distance à pied entre Tallinn et Lisbonne.
Donc on a essayé d’estimer au mieux. Au final, il se trouve qu’on s’est plutôt pas mal débrouillés pour l’instant, on a plutôt respecté les temps jusqu’à maintenant – où Julia a un problème de santé qui nous oblige à nous arrêter.
François Jourjon : D’accord. Peut-être qu’on reviendra sur le problème de santé un petit peu plus tard. Juste pour revenir sur l’itinéraire, vous avez dit que vous faisiez ça au jour le jour. Vous n’aviez pas du tout défini d’itinéraire. C’était de Tallinn à Lisbonne, rien de plus ? Ou il y avait quand même des grandes lignes ?
Julia Gaubert : Alors si, on avait quand même dessiné une diagonale. Une diagonale un peu courbée quand même, pour éviter de traverser toutes les Alpes dans le sens de la longueur.
François Jourjon : D’accord.
Julia Gaubert : On avait défini les capitales et les pays par lesquels on voulait passer, mais voilà, c’est tout !
Mathieu Sabourin : On avait les grands jalons et chaque semaine on organise notre parcours, on définit nos étapes, on essaye de passer par les petits sentiers, on évite les routes. Pour ça, on s’appuie, on a une tablette avec nous, on utilise des petits logiciels de carto (ndlr : cartographie) embarquée. Et on trace notre itinéraire par les chemins, les sentiers forestiers. Et donc voilà, ça fonctionne plutôt pas mal.
François Jourjon : Donc vous faites un peu de logistique au jour le jour, pour ça. Et comment vous gérez tout le reste, tout ce qui est matériel, eau, vivres, pour dormir, tout ça ?
Julia Gaubert : Alors, c’est pour ça que ce n’est pas une petite logistique, mais une grosse (rires).
François Jourjon : (rires).
Julia Gaubert : Parce que ça demande à peu près 2h de travail par soir, que ce soit la définition de l’itinéraire pour le lendemain – enfin le préciser. Les hébergements, c’était facile jusqu’à fin novembre parce que nous privilégions la tente. C’était plus difficile en hiver, donc on a beaucoup eu recours au site internet de couchsurfing qui nous a pas mal aidés.
Et puis voilà, quand on n’en avait pas, ça nous arrivait de sonner des fois chez des prêtres pour qu’ils nous ouvrent la salle de catéchisme pour qu’on passe la nuit, puisqu’on a nos petits matelas gonflables. On est quand même assez autonomes. Donc c’est quand même une logistique et d’autant plus que le blog et le documentaire nous prennent du temps après la marche elle-même.
François Jourjon : D’accord, donc ça fait pas mal de choses à voir tous les soirs après la marche ! Du coup, ça c’est la préparation pendant. Mais j’imagine qu’avant il y a eu une grande préparation ? Comment en gros ça s’est déroulé ? Comment vous avez fait ça ? Est-ce que vous aviez déjà l’habitude de ce genre d’expérience ou pas du tout ?
Mathieu Sabourin : Alors, il y a eu 2 volets. Il y a eu la préparation du projet un peu sur le plan institutionnel, trouver des partenaires, on est soutenus par la commission européenne, on a un partenariat avec une école : la Maison de l’Europe.
Ensuite, il y a un volet de préparation plus technique. Notamment, la grosse question c’est toujours le choix du matériel. Donc on s’est beaucoup renseignés, on a fouillé un peu sur internet, on s’est basés sur notre expérience, on s’est appuyés sur des ressources comme Randonner Malin, justement aussi, pour avoir des retours d’expérience et faire notre liste de matériel. On est plutôt contents parce qu’on ne s’est pas trop trop trompés sur notre liste de matériel. La difficulté étant effectivement d’arriver à marcher léger, le maximum, et ne prendre que le nécessaire et éviter le superflu. Donc au final, on a des sacs à dos de 50L chacun.
François Jourjon : D’accord.
Julia Gaubert : Et pour l’entraînement, la bulle ! Zéro entraînement ! (rires)
François Jourjon : (rires).
Julia Gaubert : Moi, j’ai soutenu ma thèse 4 jours avant de prendre la route. Mais c’est ça qui est bien avec la marche, c’est que l’entraînement peut se faire dès le premier jour en y allant progressivement. Faire 15 km, 20 km et au bout de 10 jours finalement on est entraînés.
François Jourjon : Oui, de toute façon vu que là ça s’étale sur très longtemps, si tu marches 5 ou 10 km de moins les premiers jours, ce n’est pas très grave on va dire…
Julia Gaubert : Oui.
Mathieu Sabourin : Exactement.
François Jourjon : L’objectif est tellement grand, il vaut mieux partir doucement j’imagine. Et du coup, à peu près la préparation vous a pris combien de temps avant de partir pour cette année de marche ?
Mathieu Sabourin : Le volet institutionnel, on a commencé 6-7 mois en avance. Pour le matériel, c’était 3-4 mois, le temps de récupérer le matériel, de faire les tests aussi des différents matos. Ça prend un peu de temps, sachant qu’il faut bien peser les choix.
Julia Gaubert : Et de défaire les liens administratifs, que ce soit travail, maison, toutes ces choses-là, ça prend aussi du temps.
François Jourjon : Oui, j’imagine.
Mathieu Sabourin : Le plus dur c’est de partir (rires).
François Jourjon : (rires) Oui c’est sûr. Une fois que tu es parti, c’est bon ! Enfin, c’est bon… Il y a déjà une grande partie qui est faite. Et du coup, est-ce qu’il y a des gens qui vous aident au fur et à mesure pour ce qui est logistique ? Par exemple, j’imagine que 7000 km, vous allez avoir plusieurs paires de chaussures nécessaires ? Comment vous faites ? Vous vous arrêtez sur le chemin, vous avez prévu un peu des endroits où vous pouvez vous ravitailler en matériel, il y a des gens qui vous envoient du matériel ?
Julia Gaubert : Alors, 2 choses. Concernant les chaussures, on a simplement changé une fois après 3500 km, c’était en Italie, avant de passer les Alpes pour arriver en France. Je pense qu’on avait des bonnes chaussures. Et l’autre question, c’était quoi déjà ?
François Jourjon : Est-ce qu’il y a des gens qui vous aident ?
Mathieu Sabourin : Oui, il y a des gens qui nous en amènent, car il y a des petites variations dans le matériel. Après, on est en multicouches (ndlr : plus d’informations sur les systèmes multicouches ici), on fait l’oignon, donc du coup on ajoute, on ne change pas grand-chose. Pour l’hiver, on a simplement rajouté une couche, des doudounes en plume. Voilà !
Julia Gaubert : Et là, il y a régulièrement des personnes qui viennent marcher avec nous que ce soient des amis ou de la famille, voilà. Et donc, on profite de ce voyage pour qu’ils nous amènent le matériel nécessaire.
François Jourjon : D’accord, c’est bien, ça doit vous faire un petit support, tout ce qui est un contact avec les gens… J’imagine que si vous dormez chez les gens, vous en avez, mais des fois ça doit être peut-être peu dur. Si vous êtes tous les deux à des moments, peut-être que vous êtes contents de voir quelqu’un d’autre ?
Mathieu Sabourin : En fait, des contacts on en a plutôt trop que pas assez. Parce que l’idée de notre voyage, c’est d’aller à la rencontre au maximum. Et en fait, il se trouve que l’on ne s’interdit pas de dormir à l’hôtel, même si après il y a forcément une question de budget pour nous.
Au final, on dort peut-être deux ou trois nuits par mois dans un hébergement. Le reste du temps, on est dans des familles, ou on campe près de chez des gens. Donc en fait au final, parfois on aimerait bien un peu plus de solitude (rires).
François Jourjon : D’accord, d’accord. Et du coup, pour revenir sur ta blessure Julia, j’avais prévu de vous poser comme question si vous aviez eu des moments qui étaient un petit peu difficiles. Alors j’imagine que la blessure, c’est un moment difficile… Est-ce qu’il y en a eu d’autres ? Ou, est-ce que c’est simplement… Enfin non, on ne va pas dire simplement… Mais est-ce que c’est juste la blessure ?
Julia Gaubert : En fait, c‘est vrai que jusque-là, l’aventure s’est vraiment déroulée presque tellement bien qu’on nous disait toujours « ben c’est trop facile en fait de traverser l’Europe à pied ! » (rires) et on disait « ben oui, c’est vrai que c’est facile de traverser l’Europe à pied ! ».
Et en fait, le coup dur, c’est vraiment maintenant. C’est de savoir que ce n’est pas nous qui décidons de s’arrêter, c’est mon corps qui me l’impose. Et je n’ai pas du tout envie d’arrêter de marcher là. Et j’espère vraiment que dans quinze jours je vais pouvoir continuer parce que là c’est ça qui est difficile.
Mathieu Sabourin : Après on n’a pas non plus eu que des moments faciles. Récemment, on a marché dans les tempêtes de neige. On a fait le passage des Alpes en raquettes. On a eu quelques journées de galère. On a eu des périodes, l’été en Pologne, où on a quand même beaucoup souffert de la chaleur parce que c’était vraiment la canicule, plus de 40°C – c’était des conditions très difficiles.
Et puis après, traverser une chaîne de montagnes en continu, avec l’usure physique, il y a quand même des moments qui sont physiquement difficiles, mais jusqu’à présent on avait toujours plutôt bien passé les choses. C’est vrai que, ce que dit Julia, ce qui est terrible c’est quand la volonté seule ne suffit plus et qu’on est bloqués malgré nous, ça c’est dur.
François Jourjon : Là, pour les auditeurs qui écoutent l’interview, Julia tu as une fracture de fatigue, c’est ça ?
Julia Gaubert : Oui, un truc pas très grave dans la vie normale, parce qu’on peut quand même continuer à faire des choses. Mais, quand on a un défi sportif comme ça à réaliser, ça peut être très très gênant. Et si je marche sur cette blessure, je peux garder ce handicap à vie, donc voilà !
François Jourjon : D’accord, et donc c’est un repos de 2 semaines avant de reprendre la route, j’imagine un peu plus tranquillement, le temps de voir les sensations, avant de reprendre complètement ou…
Julia Gaubert : Oui, je pense que comme là je marche avec des béquilles. Donc, je ne vais pas mettre le pied par terre pendant quinze jours. Donc, la reprise va être effectivement assez progressive pour éviter, parce que mes muscles se seront peut-être affaiblis en quinze jours, et pour l’os aussi.
François Jourjon : D’accord. Et là c’est pour le moment difficile. Et est-ce qu’il y a des moments positifs, très positifs, des moments qui vous ont vraiment marqués ? Peut-être une petite anecdote sympa ? J’imagine que vous en avez plein, des rencontres vraiment marquantes ?
Julia Gaubert : Alors, concernant un évènement positif, ça a été pour moi de traverser les Alpes à pied, d’être en bas de cette immense montagne et de se dire « bon ben voilà, ça y est c’est le dixième pays, je rentre dans le dixième pays, mon pays, en plus la France ». Traverser ces Alpes à pied, alors qu’on n’est pas du tout alpinistes.
Mathieu Sabourin : Oui, pour les souvenirs, je pense que c’est globalement la rencontre, toutes les super rencontres qu’on a faites en Europe de l’est, où c’était compliqué de communiquer parce qu’on était dans les campagnes, personne ne parle anglais. Donc on était obligés de se débrouiller avec les mains, en dessinant et en apprenant les 2-3 mots qu’on pouvait apprendre dans chaque pays.
Et on a fait plein de rencontres fantastiques. Alors, c’est difficile d’en sortir une du tas. Mais des gens qui nous connaissaient pas, qu’on a croisés à un moment et qui 5 minutes après nous invitaient chez eux. Voilà, on en a eu plusieurs des moments comme ça et c’est vrai c’est des choses – même quand on a des petites difficultés, même quand on a des ampoules – c’est des choses qui nous portent le lendemain matin et qui nous donnent l’énergie pour surmonter tous les obstacles.
François Jourjon : D’accord, et vous n’avez pas eu envie de rester un petit peu à certains endroits quand il y a des gens qui vous ont accueillis ?
Julia Gaubert : Alors, c’était ça un peu la difficulté, parce que nous, on s’est quand même accordés le cadre de un an. Et 7000 km sur un an, il faut quand même avancer. Donc on ne s’est pas trop autorisés de s’arrêter. Maximum une journée par semaine ou deux. Donc des fois, on a quelques frustrations et on se dit qu’on reviendra dans des paysages qui nous ont plu ou chez des gens avec qui on a passé un super moment. Mais, c’est le point un peu frustrant de notre voyage.
Mathieu Sabourin : C’est ce qui fait la spécificité du voyage en marchant je pense. C’est qu’on est à la fois très lent, on a le temps, on parcourt, on ne saute pas d’un pays à l’autre, on n’a pas de décalage, mais paradoxalement, on est toujours en mouvement, c’est-à-dire qu’on ne s’arrête jamais, on est très lents en s’arrêtant jamais.
François Jourjon : D’accord, d’accord. Et là, vous dites que vous vous arrêtez un peu, vous avez un rythme à peu près de combien ? Est-ce que vous vous êtes fixés un nombre de kilomètres par jour, un nombre de dénivelé ? En gros, combien d’heures vous marchez par jour à peu près ?
Julia Gaubert : En gros, je dirais qu’on fait entre 25 et 30 km par jour. Les dénivelés, ça dépend du terrain et on s’adapte.
Mathieu Sabourin : Oui sinon, quand on est en montagne, on tourne autour des 1000 (ndlr : 1000 m de dénivelé cumulé positif).
Julia Gaubert : Et ça fait en gros 8 heures de marche par jour de moyenne.
François Jourjon : Ah oui, donc ça vous fait des bonnes journées avec une ou deux journées de repos par semaine.
Julia Gaubert : Une journée par semaine et tous les mois on s’en accorde 2.
Mathieu Sabourin : Mais on prend le rythme, en fait, au fil du temps. C’est vrai que les deux premiers mois peut-être qu’on marchait un petit peu moins, quoique. Et c’est vrai, que petit à petit on acquiert la condition. Enfin, le corps arrive beaucoup plus facilement à supporter ce type d’effort. Sauf les os de Julia (rires)…
François Jourjon : (rires). D’accord, et est-ce que vous aviez déjà fait des randonnées de plusieurs jours avant ou pas du tout, ou juste des randonnées à la journée ? Vous aviez une expérience ou pas du tout ?
Julia Gaubert : Alors moi, j’avais déjà un certain goût pour la marche et j’espère, enfin je pense, que j’ai transmis le virus à Mathieu. Quand j’étais plus jeune à 15 ans, toutes les 3 semaines, je faisais une portion du sentier de Saint Jacques de Compostelle. Ça a été les prémisses des randonnées au long cours. Et on est partis ensuite tous les deux marcher sur les chemins de Stevenson, une semaine. On est également partis sur le sentier des douaniers en Bretagne juste avant notre voyage, une semaine aussi.
Mathieu Sabourin : Moi, j’ai pas mal marché dans les Pyrénées, mais en fait aussi, globalement, c’est vrai que ce que ça montre tout ça, c’est qu’il n’y a pas besoin d’une grande préparation, il n’y a pas besoin d’avoir fait des semaines et semaines de rando pour s’engager dans ce type d’aventure. Et c’est ça que je trouve qui est fantastique avec la marche, c’est une activité qui est ouverte à plein de gens.
François Jourjon : D’accord. En gros, quelle est la différence, la difficulté en plus que vous avez vue pour une préparation d’un an, pour une aventure comme ça, par rapport à par exemple une randonnée d’une semaine ou de quelques jours ? Est-ce qu’il y a eu une grande difficulté en plus, à part tout ce qui est administratif ou pas du tout ?
Julia Gaubert : Ben, voilà, c’est ce que tu dis : à part l’aspect logistique et administratif, la préparation physique, ben voilà elle vient au jour le jour. Le sac lui-même, que tu partes un an ou que tu partes une semaine, il est le même.
François Jourjon : Oui, à part que tu es obligé de laver tes vêtements de temps en temps j’imagine. En rando sur une semaine, en général tu le fais de temps en temps, des fois tu ne le fais pas. Mais sur un an…
Mathieu Sabourin : C’est ça qui change en fait. Il n’y a pas trop d’aspect technique ni physique. Ce qui change fondamentalement, c’est quand même le rapport au voyage et le rapport aux autres. Déjà on marchait beaucoup en pays étranger, ce qu’on fait rarement quand on part sur des sentiers de rando.
On a tous beaucoup plus tendance à aller en randonnée en France. Le fait d’être à l’étranger, ça impose une autre communication avec les gens. Donc on est en plus dans le voyage, dans la découverte un peu plus de l’inconnu. Et l’autre chose, moi je trouve qui a été quand même surprenante, c’est l’apprentissage du vagabondage. C’est-à-dire que partir une semaine, dormir une semaine ou 10 jours en rando, chaque jour sous la tente, dans un endroit différent, c’est une chose… Le faire sur 6 ou 7 mois, c’est différent, parce qu’au bout d’un moment, on ne sait plus où on habite. Paradoxalement, on apprend à se sentir chez soi un peu partout. C’est un sentiment étrange.
François Jourjon : Oui, on prend des habitudes à des endroits où d’habitude on ne se sentirait pas forcément chez soi, on va dire…
Mathieu Sabourin : Exactement.
François Jourjon : D’accord, c’est intéressant au moins de voir qu’un peu n’importe qui – enfin pas n’importe qui – mais qu’on peut se lancer assez facilement d’après ce que vous dites. Il faut juste faire attention aux fractures de fatigue et aux petits désagréments.
Après, j’imagine aussi qu’il y a le côté mental, après ça dépend des gens, vous avez l’air de prendre les choses plutôt bien, même les moments difficiles, de les retourner en moment faciles. Vous avez parlé d’ampoules, vous avez parlé de tempêtes, de tout ça… Il y a des gens qui ne sont pas près à affronter tout ça.
Mais après, j’imagine que vous vous êtes peut-être rendus compte que vous oubliez au bout d’un moment. Vous passez un moment difficile, trois jours de tempête, puis après 2 jours de beau temps, et puis on rigole de la tempête. Non, vous n’avez pas vécu ça ?
Julia Gaubert : Oui voilà. On partait vraiment pour une aventure. Moi je m’étais vraiment faite à l’esprit que ça allait être dur, qu’il allait falloir lutter contre les éléments, ce nomadisme il allait falloir s’y habituer. Ça, je m’y étais préparée et au final j’aime ça, là je suis bloquée ici ! (rires)
François Jourjon : (rires).
Julia Gaubert : J’ai envie de repartir. Ça en fait, on s’y prépare psychologiquement, on peut s’y préparer.
Mathieu Sabourin : Oui, et puis je pense que la marche même l’apprend. C’est-à-dire que la marche c’est aussi un apprentissage de la patience et de la volonté. On sait bien que quand on marche on est à 4 km/h ou un peu plus, un peu moins. Ça ne sert à rien de se presser. Quand il y a une difficulté, il faut avoir la patience et toujours continuer à avancer et on se rend compte que c’est comme ça qu’on passe les moments difficiles. Et je trouve que sur le plan personnel, c’est vraiment ça que la marche au long cours apprend : la patience et la volonté.
François Jourjon : D’accord. Et je vais revenir sur un des trucs que tu as dit, je crois que c’était toi Mathieu. Tu as parlé de logiciel de cartographie. Est-ce que vous avez eu des difficultés un peu à trouver des cartes ? Alors en France, je sais que c’est assez facile, mais dans d’autres pays, notamment les pays de l’Est est-ce que vous avez eu des difficultés au niveau des cartes ou vous n’avez pas eu de problèmes pour vous orienter, pour trouver des sentiers, pour trouver des itinéraires ?
Mathieu Sabourin : Alors, c’est vrai qu’il n’y a pas de carto de type IGN. Parce qu’en plus, on ne passe pas forcément que dans des parcs nationaux où on a des super cartographies. Donc en fait, on a du fonctionner un petit peu autrement. Donc, on utilise une application de cartographie qui s’appelle Locus, qui permet de multiplier différents fonds cartographiques. Et on utilise beaucoup les fonds de cartographie Google en fait, qui sont très très bons.
François Jourjon : D’accord.
Mathieu Sabourin : Sur les visions plans et aussi sur les visions satellites, on vérifie comme ça un certain nombre d’itinéraires. Et en fait, au final, le problème qu’on a, c’est qu’ils indiquent tellement bien les sentiers, qu’ils indiquent y compris les voies privées. Donc du coup, on s’est retrouvés souvent à l’intérieur des jardins des gens, à traverser des exploitations agricoles qui étaient fermées. Donc bref, on a eu plusieurs moments comme ça, où il a fallu négocier, discuter, mais bon c’est rigolo, ça fait partie du charme du voyage.
François Jourjon : D’accord, mais les fonds Google, il n’y a pas beaucoup d’indications dessus à part la topographie, les sentiers, les routes… Il n’y a pas tout ce qui est bâtiments et tout ça si ?
Mathieu Sabourin : Si si, il y a tout. Après en vision satellite, on peut…
François Jourjon : Ah oui, en vision satellite…
Mathieu Sabourin : Non non, c’est très bon, d’une manière générale, il y a énormément de choses, les chemins forestiers et pistes, mais aussi un certain nombre de sentiers qui sont indiqués. Vraiment, la difficulté réside dans le fait qu’il y a un certain nombre de sentiers qui sont indiqués sur les cartes, qui sont existants mais qui ne sont pas entretenus.
Ça c’est le problème qu’on a eu dans les états Baltes sur un certain nombre de sentiers forestiers. Et ensuite effectivement, il y a un certain nombre de voies qui sont des voies privées ou que des gens se sont privatisés. Donc voilà, on n’est pas comme sur les chemins de Saint Jacques (ndlr : Saint Jacques de Compostelle) où il y a eu des servitudes de passage qui ont été négociées par la fédération de randonnée. C’est sûr qu’on n’était pas sur les chemins balisés de ce type-là.
François Jourjon : D’accord.
Mathieu Sabourin : Après, globalement, ça fonctionne bien. Je pense que c’est quand même un gros apport des nouvelles technologies. Parce que nous, on a regardé les voyageurs au long cours qui étaient partis quelque années avant où il n’y avait pas les tablettes et toutes ces technologies là et on a vu qu’ils avaient beaucoup marché sur l’asphalte, le bitume, le long des grosses routes nationales. Et nous, on a plutôt réussi grâce aux nouvelles technologies, à éviter cet écueil là et à passer sur des chemins assez agréables la plupart du temps. Même si des fois on a fait un peu de route.
François Jourjon : Oui, j’imagine, c’est plus facile aussi quand tu ne sais pas plutôt que de tourner en rond sur des sentiers qui existent ou n’existent pas.
Julia Gaubert : Oui.
Mathieu Sabourin : Exactement.
François Jourjon : Et tout à l’heure, vous avez parlé de documentaire. Vous prévoyez de faire un documentaire sous quelle forme ? Vidéo ? Vous avez du matériel vidéo avec vous ?
Julia Gaubert : Oui, en fait l’Union européenne nous ont sponsorisés, je ne sais pas comment on dit, nous accompagne pour la réalisation de ce documentaire et a financé tout ce qui est audio/vidéo.
Donc, on a embarqué avec nous une caméra petite dimension mais qui a un assez bon format et surtout une très bonne qualité. Et l’objectif c’est de réaliser in fine, un 52 minutes sur notre aventure, sur cette Europe du quotidien, cette Europe des gens, cette Europe des territoires.
François Jourjon : Et vous avez improvisé ou vous aviez quelques notions de vidéo ?
Julia Gaubert : Alors, on a quand même essentiellement improvisé. On avait pris quelques conseils auprès de quelqu’un de ma famille qui travaille chez M6 et qui est caméraman. Donc on avait quelques petites notions avant de partir. C’est quelque chose qu’on a appris aussi beaucoup en regardant d’autres documentaires, les effets d’images, voilà, les effets de caméra. Et donc voilà, on est autodidacte là-dessus, on ne garantit pas qu’on soit bons, mais en tout cas on essaye de l’être.
François Jourjon : Ben ça peut être intéressant, on verra le résultat final. Et ça sera un documentaire que vous diffuserez sous quelle forme ? D’une manière privée ? C’est-à-dire que vous ? Une vidéo, quelque chose de payant avec quelqu’un vous aide à le vendre ? Ou vous n’avez pas encore défini ?
Julia Gaubert : On ne sait pas trop encore. Là on a quelques propositions. Nous, on ne sait pas encore ce qu’on va en faire. L’objectif initial était de le montrer dans des festivals de voyage au long cours.
François Jourjon : D’accord.
Julia Gaubert : C’est notre objectif, après on verra. On verra ce qu’il en est, on verra surtout si on arrive à sortir quelque chose de bien ou pas. Voilà.
François Jourjon : D’accord, d’accord, très bien. Et après, vous avez des idées après cette aventure ? Vous allez vous poser quelque part ? Vous aurez envie de repartir, vous ne savez pas ?
Julia Gaubert : Moi ce que j’aime dans notre voyage, c’est qu’il y a un début mais aussi une fin. Je serai contente de retourner à notre vie, pas d’avant, mais une vie plus « normale ». Ce qu’on va faire, je pense qu’on va reprendre nos activités mais pas de la même façon.
Et puis, entre le documentaire – parce qu’on veut également écrire un livre, notre histoire. Ça c’est post-voyage, ça va pas mal nous occuper en terme de temps, je pense qu’il faut bien compter un an après le retour. Donc de mi-Juin 2014 à mi-Juin 2015. Cet après voyage va être aussi important.
François Jourjon : Ca va peut-être permettre aussi de faire une transition entre la vie en voyage et la vie entre « normale ».
Julia Gaubert : C’est ça.
François Jourjon : Ca va peut-être permettre de voyager un petit peu tout en devenant sédentaire (rires)…
Julia Gaubert : C’est ça.
Mathieu Sabourin : Exactement.
François Jourjon : Et bien, merci en tout cas pour vos réponses à mes questions. Alors, je mettrai un lien vers votre blog sous l’interview, comme ça les personnes qui seront intéressées pourront vous suivre directement ou même voir – parce qu’il y a pas mal d’informations, il y a des photos. On peut voir où vous en êtes, combien de kilomètres vous avez faits. Donc si ça intéresse certaines personnes, ils pourront y aller directement. Merci en tout cas et puis bonne continuation.
Julia Gaubert : Merci beaucoup François.
Mathieu Sabourin : Merci.
[Interview] L’Europe des petits pas de Julia et Mathieu est un article de Randonner Malin, le blog avec des conseils pratiques et techniques pour la randonnée pédestre.
Vous êtes-vous déjà demandé qui va venir à votre secours si jamais vous êtes perdu ou que vous vous blessez en randonnée ?
J’ai eu l’occasion de poser des questions à l’adjudant-chef Denis Ramelet du PGM (Peloton de Gendarmerie de Montagne) de Hohrod qui intervient, entre autres, sur l’ensemble du massif vosgien – côté alsacien.
J’ai notamment pu lui poser les questions suivantes :
C’est une interview très intéressante, que je vous conseille d’écouter, qui permet d’en savoir plus sur ces personnes qui « veillent » sur la montagne et ses pratiquants.
Vous pouvez retrouver le PGM de Hohrod sur leur site internet : http://pgm68.free.fr/
Pour écouter cette interview, appuyez simplement sur le bouton “Play” du lecteur ci-dessous. Vous pouvez aussi télécharger le fichier MP3 en faisant un clic droit sur “Télécharger” et en sélectionnant “Enregistrer la cible sous”.
François Jourjon : Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle interview du blog Randonner Malin. Alors, je suis actuellement avec l’adjudant-chef Ramelet du PGM de Hohrod. Alors, pour ceux qui ne le savent pas, PGM signifie Peloton de Gendarmerie de Montagne. Alors, pour commencer, est-ce que vous pouvez vous présenter et présenter le PGM de Hohrod assez rapidement ?
Adjudant-Chef Denis Ramelet : Oui, alors écoutez, bonjour, je suis l’adjudant-chef Denis Ramelet du peloton de gendarmerie de montagne du Haut-Rhin. Le peton de montagne a été créé en 1985, le 16 septembre, pour répondre à des demandes de secours en montagne tout simplement. Je suis donc adjoint au commandant du peloton.
François Jourjon : D’accord. Alors, en gros, quel est votre rôle au sein du PGM ? En fait, plutôt concrètement, qu’est-ce que vous faites au jour le jour ?
Denis Ramelet : D’accord, alors écoutez, nos principales activités plus exactement : nous sommes là pour secourir les personnes qui sont en difficulté et rechercher les personnes disparues – ça c’est notre principale mission.
Après, on est là aussi pour contrôler le respect des réglementations et constater les infractions qu’on pourrait trouver en milieu montagnard. Ensuite, on est là aussi pour surveiller un peu le secteur montagneux puisque c’est un petit peu dans ce cadre-là que nous agissons.
On est là aussi pour donner des conseils aux usagers de la montagne. On participe à des commissions de sécurité, on fait des relations publiques et on participe également à des jurys d’examens pour des diplômes en montagne.
François Jourjon : D’accord. Quand vous parlez de diplômes en montagne, c’est les mêmes diplômes que vous avez passés pour votre formation, ou c’est d’autres diplômes ?
Denis Ramelet : Voilà, alors au niveau de la formation on a plusieurs volets. Donc, comme je vous l’ai dit, on est avant tout des gendarmes et également des montagnards. Donc, pour servir chez nous, on a une formation qui est une formation gendarmique et qui est interne à notre institution.
François Jourjon : D’accord.
Denis Ramelet : Et puis, on a également des diplômes dans le civil, que vous connaissez : le titre de guide de haute-montagne, de moniteur de ski, accompagnateur en montagne.
François Jourjon : D’accord, et est-ce que du coup, votre rôle au sein du PGM dépend de votre formation que vous avez faites ? Par exemple, si vous êtes moniteur d’escalade ou si vous êtes guide de haute-montagne, est-ce que ensuite votre rôle au sein du PGM dépend de ça ou pas ?
Denis Ramelet : Non, ben disons qu’au sein de notre formation – après vous savez qu’il existe des PGM et des PGHM. Donc après, en fonction du choix de carrière, on a si vous voulez une formation qui est commune, qui est à Chamonix.
Alors, pour rentrer un peu dans les détails, au niveau de notre formation, on a plusieurs volets. On a une formation de base. On a une formation élémentaire, on a une formation de qualification technique et puis après, on a une formation qui est beaucoup plus spécialisée. Alors, si vous voulez, on peut rentrer un peu dans les détails, non ?
François Jourjon : Oui oui, je pense que ça peut être intéressant.
Denis Ramelet : Donc alors, une formation de base qui s’appelle « certificat élémentaire montagne » qui dure deux fois 5 jours. C’est une formation qui est principalement destinée à des gendarmes qui ont peu ou pas de connaissances en montagne – notamment à des brigadiers.
Et, c’est nous qui gérons leur formation au sein de notre unité. Donc, pour la partie été, on va leur apprendre à se déplacer en montagne en sécurité, préparer un sac, apprendre de l’escalade.
François Jourjon : Oui
Denis Ramelet : Et l’hiver, c’est plutôt tout ce qui est apprendre à faire du ski, à se déplacer dans des conditions un petit peu rudes.
François Jourjon : D’accord, donc en fait au départ les gens sont d’abord gendarmes avant d’intégrer des PGM ?
Denis Ramelet : Oui
François Jourjon : C’est pas l’inverse ?
Denis Ramelet : Non non non, d’abord ils sont tous gendarmes. Ensuite, on a une formation qui est un petit peu plus poussée pour ceux qui désirent aller un petit peu plus loin dans la formation – ce qu’on appelle le « diplôme de qualification technique montagne » – qui elle n’est plus gérée par le PGM mais par contre elle est gérée par le CNISAG à Chamonix. C’est le Centre National d’Instruction au Ski et à l’Alpinisme de la Gendarmerie et cette formation dure 12 semaines.
Alors, il y a 3 volets : il y a un volet été, un module été, là c’est de l’escalade, un petit peu plus d’autonomie. Il y a un module hiver, alors là c’est pareil, c’est du ski en haute-montagne sur glaciers, déplacements à skis. Et puis, il y a également un module secourisme.
Et puis, pour ceux qui veulent continuer après – parce que déjà on peut s’arrêter là – une fois qu’ils ont le DQTM (ndlr : Diplôme de Qualification Technique Montagne), ils peuvent demander à subir des tests sur Chamonix, toujours au CNISAG, pour rentrer après en spécialité, en unité de secours.
Donc là, ça dure une semaine. Ils doivent présenter les courses qu’ils ont déjà réalisées et éventuellement présenteraient au proba (ndlr : examen probatoire) de l’aspirant guide. Ce sont des tests surtout sur le physique, sur le technique. Ils sont vraiment observés dans tous les compartiments. Voilà !
Et après, une fois qu’ils sont entrés en spécialité et qu’ils ont réussi cette partie de test, ils ont le brevet de spécialiste montagne qui lui est beaucoup plus long – qui dure quand même 16 semaines. Toujours pareil, un module secours, un module judiciaire et puis un module été-hiver qu’on retrouve forcément. Le module judiciaire, parce qu’à chaque fois qu’on intervient sur un secours, il y a la partie secours et la partie enquête également.
François Jourjon : Donc ça, c’est vous qui gérez ça tout ensemble, je veux dire, que ce soit la partie secours et la partie enquête ?
Denis Ramelet : Oui, alors, il faut savoir que sur une intervention en elle-même, quand je vous dis qu’il y a deux volets. En premier, c’est la partie secours qu’on va gérer avec le médecin. Et la partie enquête après, en deuxième partie, là c’est essayer de déterminer s’il y a des responsabilités sur l’accident. Et après, on rédigera un procès-verbal qui sera adressé à différentes autorités judiciaires ou administratives.
François Jourjon : D’accord. Et quand vous dites que vous avez un médecin, c’est un médecin qui est gendarme également ou c’est un médecin qui est civil ?
Denis Ramelet : Non, ce sont des civils. Bon, on va peut-être un peu détailler. Si vous voulez, quand on a besoin d’intervenir sur des opérations. Sur chaque intervention, on va intervenir avec un médecin urgentiste. Ces médecins prennent des permanences.
Alors, il y a 2 cas de figures. Soit on intervient avec l’hélicoptère de la sécurité civile de Strasbourg. Là, si vous voulez, on a un médecin qui est de permanence, qui appartient au Samu 67. Et quand l’hélicoptère de la sécurité civile n’est pas disponible, on intervient avec l’hélicoptère de la gendarmerie qui est basé pas très loin de chez nous à Meyenheim. Et cet hélicoptère est médicalisé par des médecins pompiers.
François Jourjon : D’accord, donc vous avez toujours un médecin sur chaque intervention ?
Denis Ramelet : Donc en principe, à chaque fois qu’on intervient avec un hélicoptère, oui. Après, on n’intervient pas seuls, on intervient en collaboration avec une équipe de pompiers – l’équipe de première intervention en milieu montagneux, l’EPIMM. Ça c’est prévu par le plan de secours de chez nous. On travaille en collaboration, bien sûr. Nous, on partira avec notre équipe et on fera jonction avec l’équipe de pompiers qui sera sur place.
François Jourjon : D’accord. Et comment faites-vous la limite entre les interventions que prennent les pompiers et celles que vous prenez en charge ?
Denis Ramelet : Ben écoutez, chez nous c’est simple, c’est prévu par le plan de secours. C’est-à-dire que chaque fois qu’il y a une intervention en montagne, on est obligé de faire une conférence à 3 sur une alerte. Et nous, en tant que commandant des opérations de secours en montagne ici, on gère nos moyens. C’est-à-dire qu’on va dire : « nous on va intervenir avec nos moyens » et on associera bien sûr les pompiers, tel qu’il est prévu par le plan. Donc, eux, ils interviendront avec nous.
François Jourjon : Donc, ça va être surtout une limitation géographique ?
Denis Ramelet : Oui, mais là chez nous, pour vraiment parler sur le massif, les pompiers qui interviendront avec nous ne seront que des pompiers de montagne, EPIMM, les équipes de montagne. Après, si on n’a pas besoin d’hélicoptère, on demandera une ambulance, enfin un VSAV (ndlr : Véhicule de Secours et d’Assistance aux Victimes) des sapeurs-pompiers.
François Jourjon : D’accord.
Denis Ramelet : Après, sur des recherches de personnes, on peut intervenir seuls. Après, quand c’est des grosses opérations, on peut les associer bien évidemment.
François Jourjon : Est-ce que vous faites appel à d’autres aides extérieures en plus des pompiers ?
Denis Ramelet : Ben disons, que nous, en tant que gendarmes, on est un petit peu autonomes, on a nos moyens, on a créé récemment ce qu’on appelle des groupes montagnes de gendarmerie (des GMG). Sur le département, nous avons une quinzaine de personnels.
Ce sont des gendarmes qui sont facilement mobilisables et récupérables dans la journée et dans la nuit pour prêter main forte à l’unité, au PG. Et c’est des personnes qui sont dans des PSIG (ndlr : Peloton de Surveillance et d’Intervention de la Gendarmerie), des personnes que l’on peut facilement rappeler. Et ils viennent en renfort du PGM.
François Jourjon : D’accord.
Denis Ramelet : On peut également faire appel, comme il y a quelques années, à des accompagnateurs de moyenne montagne, aux brigades vertes de la région et éventuellement aux EPIMM. Car, sur des grosses affaires, c’est arrivé sur des recherches de personnes d’avoir de gros moyens pour rechercher.
François Jourjon : D’accord. Là vous parlez de recherche de personnes, vous avez parlé de secours, est-ce que vous pouvez en gros me dire quels sont les différents types d’intervention que vous faites ?
Denis Ramelet : Alors, les interventions les plus courantes. Actuellement, on est en hiver, malheureusement on n’a encore pas beaucoup de neige. Mais si vous voulez l’hiver, c’est principalement les accidents de ski, les accidents de ski de randonnée, les accidents de randonnée en raquette. Donc, voilà, ça c’est des personnes qui se retrouvent bloquées dans les couloirs.
On a également des accidents de cascade de glace. On a deux sites ici où on peut faire de la cascade de glace. Et puis on a eu également des avalanches, chaque année. Pas forcément avec des personnes qui sont prises dedans, mais chaque année, comme le massif alsacien – partie vosgien, mais côté alsacien – est très abrupt, on a des couloirs et régulièrement, il y a des coulées de neige.
François Jourjon : D’accord.
Denis Ramelet : Ensuite, l’été c’est principalement des accidents de randonnée, de VTT, de parapente. Ça va aussi être des personnes qui se blessent en escalade, des accidents d’escalade. Là dernièrement on a eu un accident d’escalade. Après, c’est tout ce qui est malaises, recherches de personnes.
François Jourjon : Quand vous dites « recherche de personnes », c’est des personnes qui sont perdues ?
Denis Ramelet : Oui, ce sont des personnes qui s’égarent ou qui ne connaissent pas ou peu le massif. Il y a beaucoup de touristes bien sûr. Donc, après, ce sont des personnes qui accumulent du retard et puis la famille s’inquiète et ils ne sont pas forcément blessés. Ce sont des gens qui ont simplement accumulé un retard et les proches s’inquiétant, forcément nous, il va falloir qu’on réagisse. Voilà.
François Jourjon : D’où l’intérêt de prévenir ses proches quand on part. (ndlr : voir cet article)
Denis Ramelet : Voilà, bien sûr.
François Jourjon : Et, par rapport aux interventions que vous faites, est-ce que vous avez plutôt des personnes expérimentées qui prennent certains risques, notamment des sports assez risqués, ou vous avez plutôt des personnes qui ne sont pas expérimentées et qui ont pris des risques sans s’en rendre compte et sans prendre les précautions nécessaires quand on part en montagne ?
Denis Ramelet : Ben écoutez, on voit un peu de tout. On voit des gens qui ne connaissent pas le milieu montagnard, qui ne sont pas ou peu équipés. Alors bon, je ne pourrais pas vous donner un ratio, mais ça existe.
Puis après, vous avez des gens qui sont vraiment bien équipés, qui ont de bonnes connaissances en montagne et puis malheureusement – vous savez comme moi – que dès qu’on part en montagne, le risque zéro n’existe pas.
François Jourjon : Oui bien sûr.
Denis Ramelet : Donc, à partir de là, on a un peu de tout. Les accidents peut-être – pour avoir une expérience dans d’autres unités – l’accident où ce sont des gens qui sont plus aguerris sera peut-être plus tôt en début de matinée. Et puis après, en milieu de journée, voire en fin d’après-midi, ce sera plutôt les gens qui auront moins de connaissances.
François Jourjon : D’accord, qui vont se faire prendre par le temps.
Denis Ramelet : Voilà, par le temps et puis l’accident.
François Jourjon : D’accord, et est-ce que vous pouvez décrire rapidement comment se déroule une intervention type à partir du moment où il y a une personne qui vous prévient ?
Denis Ramelet : D’accord, donc le schéma global de l’intervention : la première chose, c’est la prise d’alerte pour le planton. Le planton, si vous voulez, c’est quelqu’un qui est destiné pendant 24 h à être au téléphone. C’est lui qui va réceptionner les alertes. C’est quelque chose qui est très important pour nous, parce que c’est lui qui sera directement le premier maillon de la chaîne de secours.
Donc, il va prendre l’alerte, il va prendre les informations, il va demander des renseignements, la localisation, le type d’accident, les blessures et puis le nombre de victimes. Tout ça, il va le retranscrire sur une fiche d’alerte – qu’on a à l’unité – et il faut savoir qu’on met en place une conférence téléphonique à 3 entre le requérant, le CODIS (ndlr : Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours) – les pompiers – et nous le PGM.
Avec ça, on essaye d’identifier un petit peu les besoins, et à partir de là on déclenche vraiment le secours avec les moyens à employer : si on a besoin d’un hélicoptère, si c’est accessible ou pas, si ça va être technique ou pas, les personnels nécessaires.
Ensuite, il y a la partie secours en elle-même. Vous avez la gestion sur place du secours, c’est-à-dire la victime, etc. faire les gestes nécessaires. Et puis après, il y a la partie – comme je le disais tout à l’heure – la partie judiciaire avec constations, ce qu’il y a à relever, les prises de photos, etc. Eventuellement des auditions s’il y a besoin de prendre des auditions. Et tout ça après, c’est un document officiel qui sera transmis soit au procureur de la république, soit au préfet ou peut-être même aux deux.
François Jourjon : D’accord, et par rapport aux interventions, est-ce qu’il y a une intervention qui vous a marqué en particulier – que ce soit en bien ou en mal ?
Denis Ramelet : Ben on va peut-être plutôt parler en bien, parce qu’en mal généralement, vous pouvez vous imaginer le résultat – c’est des personnes décédées, c’est avertir les familles, ça c’est toujours délicat, c’est pas facile.
Après, les satisfactions c’est porter secours, c’est apporter notre aide à quelqu’un qui en a le besoin, c’est important. C’est vrai qu’on en a plusieurs, on ne va pas en choisir une particulière. C’est surtout quand on va peut-être chercher des jeunes, des enfants. Donc, je ne pourrais pas vraiment vous donner un exemple particulier.
Mais surtout, ce qu’il faut, c’est ne pas banaliser les secours, parce que c’est quand même un métier qui est exaltant, on fait ça par passion, ça c’est indéniable. Mais bon, c’est également une remise en question sur chaque intervention. Chaque secours est bien particulier – même si des fois, ça se retrouve, mais ce n’est pas la même chose.
Et après, il y a toujours un débriefing après l’opération. Si c’est un petit peu difficile, échanger avec des partenaires, avec les médecins, avec les pilotes d’hélico. Et puis dire, ce qui a marché et ce qui pourrait être amélioré. Je ne veux pas dire ce qui n’a pas marché, parce qu’il faut qu’une opération se déroule dans de bonnes conditions, mais dire « est-ce qu’on peut améliorer sur certains points ? ».
François Jourjon : D’accord, et là vous en avez brièvement parlé, que vous faisiez ça par passion. Et j’imagine que de toute manière on est obligé de faire ça par passion, vu les risques liés aux secours. Et comment vous arrivez à gérer ces risques ? Vous venez de parler de débriefings, j’imagine que vous faites des briefings, des réunions ?
Denis Ramelet : Pas tout le temps, mais effectivement sur des opérations qui sont un peu complexes, ou des fois où c’était un peu limite, là on va s’appeler avec l’équipage d’hélico, on va en parler avec le médecin. Oui, il y a un retour, il y a un échange.
Et puis même, pour en revenir un peu à votre question, quand on part en hélico avec le médecin, avec l’équipage, on est bien-sûr reliés par radio le temps d’aller sur zone mais nous on expose notre point de vue à l’équipage d’hélico, c’est quand même eux notre « taxi », notre moyen de transport et on va dire « il y a telle situation, est-ce que tu penses qu’on peut treuiller, est-ce que pour toi les conditions météo sont bonnes ? ». Il y a un échange entre le pilote et nous.
On dit « est-ce que ça c’est possible, est-ce que tu penses qu’on peut faire de telle manière ou est-ce que toi t’envisages une autre ? ». De toute façon, c’est le pilote qui en dernier ressort, qui est le maître à bord, qui dira c’est bon ou c’est pas bon.
Après, en fonction des blessures, on dira au médecin « est-ce que tu préfères qu’on mette la victime allongée dans notre perche d’évacuation ou alors est-ce qu’on peut faire ça d’un autre moyen, c’est-à-dire treuiller – pas forcément avec une sangle – mais nous on appelle ça un triangle d’évacuation, ça va beaucoup plus vite et on gagne du temps.
François Jourjon : D’accord.
Denis Ramelet : On essaye au maximum de parler avant, parce que pendant, ça va très très vite, chacun est concentré sur ce qu’il a à faire et on n’a pas le temps de se poser des questions. On essaye un petit peu – alors c’est pas toujours facile – mais on essaye d’anticiper sur la manière dont on va opérer. Ça se passe toujours bien, mais des fois on réussit la mission, mais pas forcément de la manière dont on avait pensé.
François Jourjon : Oui, il y a tellement d’imprévus.
Denis Ramelet : Il y a toujours de l’imprévu, on n’est pas à l’abri du vent, on n’est pas à l’abri du changement des conditions climatiques. Il y a plein de facteurs qui font que… Mais en principe on a quand même des grands schémas pour s’orienter.
François Jourjon : D’accord, en fait, avant chaque intervention, vous décidez « qui va faire quoi » ou est-ce qu’il y a des personnes qui sont plutôt spécialisées ?
Denis Ramelet : Ca dépend avec qui vous travaillez, parce qu’on ne travaille jamais avec les mêmes. Il y en a qui sont plus férus sur le secourisme, parce qu’au niveau de notre unité, on a quand même des gens qui sont moniteurs de secourisme. Donc eux, ils fileront plus un coup de main au médecin et puis l’autre s’occupera peut-être plus de la partie « gestion de l’enquête », c’est-à-dire faire des photos, relever des identités, faire le boulot de gendarme quoi ! Après, si il y a une deuxième intervention qui s’enchaîne, généralement on inverse, pour que ce ne soit pas toujours les mêmes qui fassent les photos.
François Jourjon : Oui, d’accord. Vous avez parlé aussi au départ de l’interview, que vous aviez une mission de prévention. Quelles sont, en gros, les actions que vous mettez en place concrètement pour la prévention ?
Denis Ramelet : Alors, la mission de prévention, c’est une mission que l’on doit s’efforcer de faire bien évidemment. Notre mission de prévention se justifie de la manière suivante. C’est-à-dire notre présence, nous, gendarmes de montagne sur le massif.
Il faut qu’on soit en contact avec les randonneurs, avec le milieu montagnard, avec les professionnels. Ici, on a quelques refuges, on a des fermes-auberges, donc on essaye d’aller les voir assez régulièrement. Et puis, de donner des conseils éventuellement à des randonneurs qui seraient soit en train de s’équiper ou que l’on croise pendant nos missions. Soit, quand on est en entraînement physique ou qu’on va grimper, on discute, on échange avec d’autres grimpeurs. Quand on fait du ski de randonnée, on échange, on essaye de discuter. On essaye de donner des renseignements sur les conditions météo.
François Jourjon : D’accord.
Denis Ramelet : On fait des relations publiques, on fait des rencontres avec des vacanciers, avec des promeneurs, même des centres de vacances qui demandent notre intervention.
François Jourjon : D’accord, donc vous allez directement au contact avec les gens qui vont pratiquer en montagne ?
Denis Ramelet : Oui, bien sûr, il faut. Mais les gens sont même demandeurs. Des fois, spontanément, ces gens viennent nous voir. Parce que c’est écrit « secours en montagne » sur nos véhicules. Des fois, les gens qui ne sont pas forcément de la région, ça les interpelle : « ah, vous avez un joli 4×4 ! ». Donc on leur explique un peu notre mission. Ca ça fait partie de notre mission de prévention. Il n’y a pas que ça, il y a plein d’autres choses.
François Jourjon : Vous avez parlé de votre entraînement et que vous faisiez votre mission de prévention un peu pendant votre entraînement. Et, en gros, quels sont les différents types d’entraînements que vous faites et à quelle fréquence faites-vous ces entraînements ?
Denis Ramelet : Ecoutez, quand on n’est pas pris par la permanence secours, on essaye de s’entretenir régulièrement. Alors, on a plein d’activités, puisqu’on fait du VTT, on fait de l’escalade, on fait du ski, du ski alpin, du ski de fond, du ski de randonnée.
On essaye en fonction des périodes et du temps bien évidemment de s’entretenir puisqu’il faut que l’on reste techniquement… que ça puisse se dérouler dans de bonnes conditions notre métier, donc il faut qu’on s’entraîne. Alors, périodiquement on essaye de faire au moins 3 ou 4 fois par semaine du sport, ça c’est sûr.
François Jourjon : D’accord. Et pour revenir sur les interventions, c’est une question qu’on m’a pas mal posée. C’est toujours pas exactement clair, c’est pour savoir qui c’est qui prend en charge les frais qui sont engendrés par les secours ? Alors, là je parle uniquement en France, parce que je sais que ce n’est pas la même partout.
Denis Ramelet : Alors, écoutez, c’est très simple, pour nous gendarmerie de service publique, donc pour le secours en France, il est gratuit, jusqu’à encore aujourd’hui. Ce que je peux vous dire – après je sais qu’il y a certaines disciplines comme le ski alpin où les frais de secours seront peut-être engagés par le service des pistes – mais bon ça nous, on n’est pas partie présente là-dedans.
Il faut savoir simplement, que nous gendarmes, on ne facturera pas une intervention. C’est du service public, on intervient avec des moyens de l’état donc voilà ! Après, peut-être que les gens, on va vous proposer – même à vous – le jour où vous allez skier : « est-ce que vous voulez l’assurance neige ». Alors, libre à vous de la prendre ou pas.
François Jourjon : Oui, mais là ce sont des secours que vous ne faites pas forcément en tout cas, c’est dans le cadre de la station ?
Denis Ramelet : Alors, nous on intervient ni sur piste de ski alpin ni sur piste de ski de fond, là où il y a un service des pistes qui est dévolu à ça.
Par contre, on interviendra sur piste si par exemple il y a une collision, s’il y a un différend entre des skieurs, une collision avec des engins de damage, des remontées mécaniques – là oui, il y aura une partie enquête. Donc, nous on interviendra.
Et puis on peut venir dans nos petites stations qu’on a ici, on interviendra en renfort peut-être d’un pisteur, parce que sur une intervention, seul ou à deux ils seront peut-être un peu justes. Donc nous on interviendra vraiment dans les cas bien particuliers en station.
François Jourjon : D’accord. J’imagine même en hors-piste, les secours sont peut-être faits directement par les pisteurs ?
Denis Ramelet : Alors non, tout ce qui est – pour nous, le cas ici – tout ce qui est hors-piste, c’est réservé au domaine montagne, donc ça c’est la gendarmerie, c’est le PGM qui interviendra sur du hors-piste.
François Jourjon : D’accord, c’est uniquement le PGM ?
Denis Ramelet : Ici, ce sera le PGM.
François Jourjon : D’accord, d’accord très bien. Alors, maintenant, pour se recentrer un peu sur la randonnée qui est un domaine qui intéresse la plupart des gens qui vont écouter cette interview. Quelles sont, en gros, les causes les plus fréquentes de secours parmi les randonneurs que vous secourez ? Est-ce que ce sont plutôt des gens qui se sont perdus, des gens qui se sont blessés, par exemple une entorse, une fracture, ou même autres ?
Denis Ramelet : Les causes les plus fréquentes ? J’allais dire, elles sont diverses…
François Jourjon : Il n’y a pas une cause qui revient vraiment ?
Denis Ramelet : On va dire – comme je l’ai dit un peu – qu’il y a une méconnaissance du milieu, il y a peut-être parfois un sous-équipement. On voit partir des gens qui sont sur des randonnées et qui ne sont pas forcément équipés, et qui n’ont pas forcément tout le matériel. Mais bon, on en voit quand même de moins en moins – parce que c’est vrai, on se faisait la réflexion avec des collègues – ils partent avec des gros sacs, alors j’imagine que dans ces sacs, ils ont vraiment tout ce qu’il faut.
Après, comme je l’ai dit, vous avez des gens qui sont bien équipés, et puis c’est un peu « la faute à pas de chance ». Le risque zéro – comme je le disais tout à l’heure – n’existe pas en montagne. A partir du moment où vous êtes dehors, c’est une activité de nature, donc il faut accepter peut-être le risque, bien qu’il faut prendre les mesures nécessaires.
François Jourjon : Oui, ce n’est pas parce que le secours est gratuit, qu’on peut se permettre de faire n’importe quoi. Vous faites du mieux possible, mais j’imagine qu’il y a certains cas où vous pouvez…
Denis Ramelet : Oui, il y a des fois où ça révolte un peu, mais on est là pour faire notre job, on est là pour aller chercher quelqu’un et le soustraire du milieu hostile et le ramener dans les meilleures conditions et le plus vite possible.
François Jourjon : Oui bien sûr, j’imagine que vous ne sélectionnez pas les personnes que vous avez envie de secourir ou pas…
Denis Ramelet : Non, non.
François Jourjon : Et donc, peut-être pour finir, est-ce que vous auriez un message de sécurité à faire passer pour les randonneurs qui nous écoutent ?
Denis Ramelet : Une rando sympa, c’est une rando qui se déroule bien, j’allais presque dire. Simplement, les conseils qu’on peut donner : il faut une bonne préparation, savoir où est-ce qu’on va. Il faut une préparation minutieuse, c’est-à-dire qu’il faut une carte au minimum, du matériel.
Bien sûr, il faut prendre en considération la météo – ça c’est sûr. Après, le niveau de condition physique des participants, parce que si vous partez sur plusieurs jours, il faut s’assurer que les gens peuvent suivre. Après, il faut prendre en compte l’alimentation, préparer correctement son fond de sac – c’est-à-dire qu’est-ce que j’emmène, les vêtements, le matériel, la boisson, contre la pluie, contre le froid, etc.
Puis, je dirais, qu’il faut se renseigner auprès des professionnels de la montagne. Il en existe un peu partout pour prendre des conseils sur les conditions de course.
François Jourjon : D’accord, donc il y a une grande partie qui se fait au niveau de la préparation.
Denis Ramelet : Oui, ça c’est le minimum, il faut préparer. Bien qu’on n’ait pas un massif à haute-altitude, j’allais dire. C’est une montagne à vaches, mais une montagne qui peut être vache quand le mauvais temps arrive. Et on peut facilement retrouver des conditions comme dans les Alpes chez nous. Quand il fait mauvais et qu’il fait froid et qu’il y a du vent et du brouillard et il neige, des fois on a beau connaître le massif, il y a des fois on hésite un peu. On n’est quand même pas sûr de soi, il faut le dire.
François Jourjon : Oui oui, ça c’est sûr. Merci beaucoup pour ce message et merci beaucoup d’avoir répondu à mes questions.
Denis Ramelet : je vous en prie.
François Jourjon : Merci beaucoup en tout cas pour l’interview.
Denis Ramelet : Merci, au revoir.
François Jourjon : Au revoir.
[Interview] Peloton de Gendarmerie de Montagne (PGM) d’Hohrod est un article de Randonner Malin, le blog avec des conseils pratiques et techniques pour la randonnée pédestre.
Un tour de France à pied à la rencontre des gens, en découvrant des régions et en soutien à des personnes handicapées. Voici le projet très complet d’Aurélie et Laurent que vous allez découvrir dans cette interview très intéressante parsemée d’anecdotes. Au moment de l’interview, ils ont déjà parcouru plus de 3500 km !
Vous pouvez retrouver Aurélie et Laurent sur leur site internet dédié à ce tour de France à pied : http://tourdefranceapied.com/
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(Crédit musique Zionoiz)
François Jourjon : Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle interview du blog Randonner Malin. Alors aujourd’hui, je suis avec Aurélie. Aurélie et son compagnon Laurent sont en fait en train de faire un tour de France à pied. Bonjour Aurélie.
Aurélie : Bonjour
François Jourjon : Ça va ?
Aurélie : Très bien et toi ?
François Jourjon : Ca va, ça va. Ça se passe bien alors pour l’instant ?
Aurélie : Oui, ça se passe bien. On est dans le sud de la France en ce moment. On a parcouru plus de 3500 km. On est en train d’arriver sur Marseille là. Donc voilà, tout le côté Atlantique, les Pyrénées, on a traversé les Pyrénées et là ça fait 10 jours qu’on est sur le bassin Méditerranéen.
Laurent, il est pas là pour l’instant, il est parti avec nos hôtes.
François Jourjon : En fait, tous les soirs vous avez des hôtes c’est ça ?
Aurélie : Oui, souvent on est avec des personnes qui nous hébergent. C’est le principe, c’est de rencontrer le plus de gens possible, de pouvoir partager notre expérience et puis eux leur quotidien. Comme ça, ça permet de rencontrer des vrais passionnés de leur région.
On a dormi avec des gens qui sont spécialistes des huîtres, on a rencontré des gens qui sont spécialistes de la Baie de Somme, des personnes qui viennent du pays Basque. Et donc, ils nous font découvrir leur région, donc c’est chouette.
François Jourjon : Oui, c’est sympa. Ça vous est venu comment cette idée de faire le tour de France ?
Aurélie : Ben, en fait à l’origine, c’est une idée de Laurent. Lui, il a fait ce type de voyages pendant 12-13 ans. Il a parcouru l’Amérique du Sud, en fait il a traversé la Cordillère des Andes sur 6000 km à la recherche de la grande route Inca – c’est sa dernière expédition. Avant ça, il est parti en Alaska, il a remonté toute l’Alaska à cheval. Il avait traversé les Etats-Unis aussi d’Est en Ouest. Il avait fait aussi une traversée Paris-Tokyo. Enfin voilà, il a fait différentes choses.
Et pendant un moment, il était basé en Bretagne. Et en Bretagne, tu sais, il y a le sentier des douaniers qui passe. Et très souvent, il allait courir sur le sentier et il s’est dit « tiens, c’est un beau chemin, ça va loin et tout, ça pourrait être sympa de le suivre et de voir jusqu’où il va ». Et en fait, en se renseignant un peu, il s’est rendu compte que le chemin faisait toute la côte, il faisait vraiment toute la côte Atlantique – que c’était possible de le suivre. Et de là, lui est venu l’idée folle de dire « tiens, et si on faisait tout le tour de la France en suivant les frontières ». De là, il s’est rendu compte en plus que ça n’avait pas été fait. Souvent, on croise des gens qui nous disent « Ah oui, moi aussi j’ai fait le même chemin, le même principe, mais souvent, ce sont des gens qui partent 3 semaines, 1 mois par an et tous les ans ils font une portion.
François : Ah d’accord, et pareil ils suivent les frontières ?
Aurélie : Ouai, au plus proche possible. Souvent, ils suivent le sentier du littoral, mais ça n’avait jamais été fait en une fois, d’un coup tu vois.
François : D’accord, en même temps, je n’en avais pas entendu parler moi avant non plus. Mais j’avais été surpris la première fois que j’avais vu ça. J’avais vu « Tour de France à pied », j’avais fait « oula ». C’était long, un beau projet. Après, j’avais regardé un peu plus comment vous faisiez. Parce qu’au début, j’avais peur – enfin peur – je pensais que vous faisiez ça en tente alors que là vous avez, parce que au niveau psychologique ça ne doit pas être facile parce que l’interaction sociale est quand même limitée quand tu dors en tente le soir. Là, le fait d’avoir des hôtes, ça doit être sympa parce que tu ne deviens pas fou dans ton coin.
Aurélie : C’est primordial. En fait, on avait pensé de faire ça en tente. Il y a deux raisons pour lesquelles on a décidé de ne pas le faire de cette manière-là. Déjà, parce que nous on portait tout sur notre dos, donc avoir en plus la tente, les sacs de couchage, les réchauds, tout pour être autonome, ça vient juste plomber ton sac à dos. Donc, de là on s’est dit « waouh, ça va être hyper compliqué ». Et en plus, effectivement, ce qui nous a décidé c’est que l’on s’est dit « non, on n’a pas envie de le vivre dans notre bulle ». Comme tu dis, être dans ta tente tous les soirs, tu as un côté très aventure, mais en même temps tu te recroquevilles vite sur toi-même. Et nous, on avait vraiment envie d’aller à la rencontre des gens, de créer des rencontres, de découvrir un peu les régions aussi à travers les gens qu’on allait rencontrer.
Et donc, à partir de là, le plus intéressant c’est de passer une soirée ensemble, 1 jour, 2 jours ensemble et de dormir chez eux. Ce qui est sympa, c’est que c’est un véritable échange qui se passe. Bien sûr, eux sont très curieux de savoir pourquoi on est partis, ce qu’on faisait avant, par où on est passés, ou est-ce qu’on va aller, tout ça…
Et nous, on est hyper curieux de voir où ils habitent, leur région, pourquoi ils ont choisi ce coin. Parce que, quand on était sur la côte Atlantique essentiellement, les personnes qu’on a rencontrées, c’est un vrai choix qu’ils ont fait d’aller au fin fond de la Bretagne, d’aller dans le Morbihan, tout ça. Et c’est souvent lié à leur passion pour la mer, à leur passion pour leur métier, leur passion pour la nature, pour le sport. Tandis que ceux qui viennent des grandes villes ou dans des régions avec moins de caractère, c’est lié à un mouvement social ou à leur métier qui se fait là. Mais les gens qu’on a rencontrés sur la côte ou dans la montagne, c’est vraiment un vrai choix.
François : D’accord, c’est intéressant. En même temps, ça m’étonne pas trop. Parce que, quand on voit les gens qui habitent à la mer et les gens qui habitent à la montagne, il y en a beaucoup qui sont passionnés de leur région. En fait, ils sont vraiment fiers de leur région. C’est vrai, qu’il y a certaines régions où l’on ne ressent pas ça. Les gens y sont pour le boulot ou pour une autre raison mais ils n’ont pas fait leur choix avec la localisation en premier.
Aurélie : Oui, complètement oui. Et ce sont des personnes qui sont très impliquées dans le développement de leur région, dans la protection de leur région. Ou, ils ont une histoire très particulière. Quand on était au Mont Saint-Michel, on a traversé la baie du Mont Saint-Michel avec un passeur qui était immense, qui faisait 2 m de hauteur, qui était hyper carré, qui avait les cheveux longs. On aurait dit un grand viking, un mec sorti des âges d’il y a plusieurs centaines d’années et avec un énorme cœur sur la main.
Il nous a fait traverser et lui son histoire, c’est qu’avant son frère s’occupait de moules dans la région et son frère est mort en mer. Et, il a repris l’affaire de son frère. Quelques années plus tard, il s’est rendu compte que ce choix, ce n’était pas le sien, qu’il était en train de reprendre l’affaire familiale plus par devoir et quelque part parce qu’il culpabilisait lui d’être en vie et son frère non. Et quand il a pris conscience de ça, il a eu un peu un électrochoc et il s’est dit « ben non, moi ma vie j’ai envie de la vivre pour moi ». Et il est parti vivre à la Réunion.
Il s’est éclaté là-bas, il a adoré l’île et au bout d’un moment – au bout de 3 ans – il s’est dit « mince, cette île elle est splendide, elle est vraiment magnifique, mais ça manque de saisons, c’est tout le temps très beau ». Et il s’est rendu compte que les différences de températures, les différences de couleurs, les différences de chaleurs lui manquaient. Il a fait un peu un retour aux sources et il est revenu vivre en France. Et ça fait maintenant 10 ans qu’il est dans la baie du Mont Saint-Michel, qu’il est passeur, et tous les jours il fait la même chose, il fait le même trajet, au même endroit, et il s’éclate. Et pour rien au monde, aujourd’hui il n’a envie de changer parce qu’il dit « oui, je suis toujours au même endroit, mais en fonction des saisons c’est pas pareil, les couleurs changent, la marée n’est jamais la même, le vent ». Voilà, donc c’est une belle histoire.
François : C’est marrant oui. On s’en rend compte quand on regarde votre projet. Mais la première impression qu’on a quand on se dit « un tour de France à pied » on pense pas tout de suite à ce côté-là, et c’est vrai que c’est vraiment intéressant en fait. C’est vraiment une bonne idée d’allier la marche avec la convivialité, la découverte de différentes régions et de différentes personnes, c’est vraiment sympa.
Aurélie : Ben ouai, on a envie de ça. Et pareil, on a rencontré plein de jeunes qui vivent de cette passion-là. On a rencontré un jeune de 23 ans qui lui adore, en fait de père en fils, ils sont dans la mytiliculture. Donc la mytiliculture, c’est en fait – tu sais – c’est l’élevage des moules. Et, on peut se dire « 23 ans, tu as plutôt envie de sortir en boîte, tu as plutôt envie de te rapprocher des grandes villes avec beaucoup de frénésie et tout ça ». Et bien lui, pas du tout, il s’éclate avec sa barque, à aller poser les filets de moules, à les récupérer, à suivre de près leur équipe. Les gens qui travaillent pour eux, ce sont les même gens qu’ils invitent à la maison le soir pour partager une bouteille de vin. C’est vraiment un état d’esprit très chouette. On recherche ça.
François : En même temps, ça se comprend. Dans un différent contexte, ça serait beaucoup plus dur de rencontrer ces gens. Là, je pense, que le fait que vous marchiez, vous avez un projet, vous avez aussi quelque chose à leur apporter parce que vous êtes différents, vous faites quelque chose qui les intrigue sûrement et eux vous apportent aussi quelque chose parce qu’ils sont aussi différents pour vous.
Aurélie : Exactement, ce que tu dis c’est vrai. Le fait qu’on arrive à pied, je pense que ça change beaucoup. Si on l’avait fait en moto, en 4×4, ça aurait peut-être touché certaines personnes fans de moto et de 4×4, mais ça aurait pas eu la même portée je pense. Là, on arrive à hauteur d’homme, sans moyen, pas d’élément entre eux et nous. Mine de rien, ça fait quand même 8 mois qu’on marche. Maintenant, ça fait 3500-3600 km qu’on a dans les jambes, les gens qu’on croise nous disent « waouh ». Tu vois, c’est un peu surprenant aussi. Enfin, moi je suis la première surprise !
Et oui, ça crée un lien immédiatement, plus que si tu faisais ça en moto.
François : Oui, et en plus tu fais un effort pour venir.
Aurélie : C’est vraiment la notion de l’effort. C’est la notion de l’effort, mais en même temps, on n’est pas des sportifs, on fait pas ça pour le défi sportif – c’est pas ça le principe. On n’est pas là, tête baissée, on est des grands sportifs, on fait 70 km par jour, non c’est pas ça.
Tu vois, je ne suis pas la plus sportive des nanas et en fait c’est aussi pour montrer que c’est possible. Si moi j’y arrive, il y a d’autres personnes qui peuvent le faire.
François : D’accord. Et du coup, j’ai vu sur le site que n’avez pas pu, au niveau des Pyrénées, traverser là où vous vouliez.
Aurélie : Ben non, parce qu’en fait c’était complètement enneigé. On a commencé sur le GR10, on a passé bien 8-10 jours à suivre le GR. On a vraiment marché avec un pied en Espagne et l’autre en France, c’était assez drôle.
Tu sais, il y avait des bornes – vraiment les bornes à l’ancienne – les bornes que tu trouves encore sur les bords de route avec la démarcation France et Espagne. Ça c’était drôle. Et puis, à un moment donné, on s’est élevés et on s’est retrouvés complètement pris dans la neige et on était tout seuls, avec vraiment des congères de 3 m. Donc c’était absolument superbe, mais on se retrouvait aussi dans des couloirs à avalanche – donc on n’était pas très fiers dans ces moments-là.
Et voilà, en plus avec un réseau téléphonique défaillant. Donc, des heures entières à marcher tout seuls dans la neige. On a eu vachement de chance parce qu’il faisait beau à ce moment-là, il faisait très beau. Et en plus, la veille ou l’avant-veille, il s’est mis à geler très fort, donc la neige sur laquelle on marchait était très dure. Mais si ça avait été de la neige molle, nous on n’avait pas de raquettes, on avait rien, parce que les endroits dans lesquels on était passés ce n’était pas encore des endroits de neige, donc on avait eu aucun endroit pour acheter des raquettes, des bâtons, ou quoique ce soit. Et donc, on n’était pas du tout équipés pour la neige, pour la montagne. Donc, on a eu beaucoup de chance que la neige soit bien tassée, bien dure, bien gelée parce que comme ça on restait en surface. Mais si ça avait été un peu mou, je peux te dire qu’on allait avoir de la neige jusqu’aux hanches, jusqu’à mis cuisses, donc là, tu ne peux juste pas du tout avancer.
François : Oui, et ça aurait été plus gelé, ça aurait été pareil, vous auriez galéré.
Aurélie : Oui, là on a eu un « bol » monstrueux. Et, ça sur toute la journée, en plus on n’avait pas à manger, on n’avait pas à boire, aucun endroit pour se ravitailler. Parce qu’il y avait des gîtes, on croisait des gîtes sur le chemin, mais les gîtes, il y avait absolument personne parce que ce n’est pas du tout la saison parce que justement c’était enneigé et tout ça.
Donc, tous les robinets qu’on pouvait trouver, ils étaient coupés ou ils étaient gelés. Bref, absolument rien pour se ravitailler. Et tout ça, jusqu’à notre destination du soir où on est arrivé épuisés. On est arrivés de nuit, complètement épuisés. Et le lendemain matin, on a passé un coup de fil à la gendarmerie des montagnes qui nous a dit « écoutez les gars, vous êtes gentils, mais là vous allez redescendre ». Ils nous ont dit que ça allait s’empirer, que plus on allait avancer et plus ça serait difficile. Et vu que l’on n’a pas de guide, pas de matériel… L’idée, ce n’est pas de se mettre dans des situations galères pour le plaisir.
François : C’est sûr !
Aurélie : C’est ce qui explique que l’on a du redescendre et passer par le piémont au final. Et dans le piémont, on a eu bien 5-6 jours de galère parce qu’il pleuvait tout le temps, il faisait froid, c’était tout gris, c’était tout boueux et tout, pas très intéressant… Là, on était dégoûtés parce que le reste de la France était sous un soleil absolument splendide, sauf nous. Et tout d’un coup, on ne sait pas trop pourquoi, quand on est arrivés vers Foix, le ciel était dégagé, le soleil était revenu, tout d’un coup on était au printemps, avec les petites marmottes, avec les petites fleurs, les papillons – et là c’était juste splendide. Là, on a repris du baume au cœur, ça nous a donné un coup de fouet, mais sinon c’était un peu dur.
François : C’est toujours comme ça, les jours pluvieux sont toujours un peu durs, mais après quand on a un beau jour, on se dit qu’on l’a vraiment bien mérité. On a tendance à oublier les 5 jours pluvieux qu’on a eus auparavant.
Aurélie : Oui, oui, c’était exactement ça. Et dans les anecdotes assez drôles, quand on est arrivés sur la Méditerranée, on a repris la fin du GR 10. Jusqu’à présent, on ne pouvait pas trop le suivre, parce que c’était trop et tout ça, et quand on est arrivés sur la Méditerranée il n’y avait plus de neige et on pouvait le récupérer. Donc, on l’a récupéré et c’était superbe parce qu’à la fois on était dans les montagnes et en même temps on avait vue directe sur la mer, la Méditerranée, c’était absolument splendide et donc on est remontés en hauteur, on est remontés à 800-900. Et là, on s’est fait avoir par un orage monumental.
Et ce qui était très drôle, c’est que 5 minutes avant, il faisait super beau, mais vraiment magnifique, temps hyper dégagé et j’avais eu – parce qu’on travaille pour le magazine Géo Ado – et j’avais eu la rédactrice en chef de Géo Ado 5 minutes avant qui nous fait « alors, ça va, vous n’êtes pas trop pris dans l’orage ? Parce que dans la région, il paraît que c’est dur ». Nous on est là « ah ben non, pas du tout, c’est super beau, c’est magnifique, on en profite trop ». Je raccroche et véridique : 10 minutes plus tard, orage incroyable qui nous est passé dessus, avec vraiment des rafales de vent, la grêle, la pluie gelée, la pluie qui se transforme en grêle, et la grêle qui est grosse comme des cailloux que tu tiens dans la main et on a dû passer des cols. Ca s’est fait en 2 fois. La première fois, on a réussi à se protéger. On a eu de la chance, il s’est mis à pleuvoir au moment où on arrivait dans une auberge, abandonnée certes, mais on a quand même eu de la chance. Et puis, on repart, et pareil, 20 minutes plus tard, à nouveau de la grêle, les rafales. Et là, on était en train de franchir un col. Donc t’imagines, tu sais, les grosses rafales de vent quand tu franchis le col. Et là on n’était pas fiers du tout, et heureusement, un peu plus tard, on a réussi à trouver une vieille demeure complètement abandonnée, complètement taguée, complètement cassée, tout ça, mais au moins on a pu se protéger du vent et attendre que ça passe.
Et là où c’était drôle l’anecdote, en fait, c’était qu’on s’est dit « cool, c’est la Méditerranée, maintenant il va faire beau, il va faire chaud, on va boire des mojitos, on va manger des tapas espagnols ». Et en fait, on s’est pris un méga orage, on était gelés, c’est ça qui était drôle.
François : Mais du coup, à chaque fois, vous partez juste équipés pour la journée ?
Aurélie : Ouai, mais on a avec nous les polaires et les vêtements de pluie.
François : Oui, j’imagine bien. Mais du coup, est-ce qu’il y a des gens qui vous suivent ou qui vous amènent du matériel, ou vous vous débrouillez complètement ? En gros, vous êtes partis avec un certain matériel, et au fur et à mesure vous continuez juste avec ce matériel-là ?
Aurélie : Il y a quand même du ravitaillement quand on passe dans les villes. Quand il a fait froid, on en a profité pour racheter des polaires, parce que ce n’était pas assez. Dans les endroits où on est passés, on en a profité pour acheter une double polaire, acheter des collants, des gants et des bonnets. Donc, on fait tout ça sur le chemin.
François : D’accord, mais il n’y a personne qui vous aide du coup, c’est vous qui vous vous débrouillez tous les deux ?
Aurélie : Ben oui, on se débrouille. Nos familles sont loin. Après si, on peut avoir de l’aide dans les familles chez qui on reste. Par exemple, on a besoin d’acheter quelque chose, ils peuvent faire un aller-retour avec nous pour nous emmener acheter un truc si besoin.
Après, par exemple, le coup de la Méditerranée que je viens de te raconter avec l’orage, c’était très drôle aussi, parce que le matin même, on venait de renvoyer, toutes nos polaires, les sous-pulls et tout ça par la poste dans nos familles avec un énorme colis pour tout renvoyer. Et voilà, 3 heures plus tard, on crève de froid, alors qu’on s’était dit qu’on allait crever de chaud. C’était drôle quoi.
François : Classique !
Aurélie : Classique voilà ! Et puis, les chaussures en fait, on les commande sur internet. C’est ça qu’on fait beaucoup, on commande beaucoup de trucs sur internet, les polaires et tout ça et après on les fait envoyer à une adresse chez une personne chez qui on reste. On les appelle quelques jours avant, puis on leur demande leur adresse et on les fait envoyer chez eux.
François : D’accord, parce que j’imagine que les paires de chaussures, vous en avez déjà utilisées plusieurs.
Aurélie : Ben là, on va passer à la troisième paire.
François : Troisième, ouai c’est déjà pas mal.
Aurélie : Ouai, mais là ça devient une urgence, parce que Laurent marche sur la route et moi j’ai mes pieds déchiquetés, rien qu’en les rentrant dans mes chaussures.
François : Vous marchez beaucoup sur la route, ou vous essayez de faire des sentiers tant que possible ?
Aurélie : On fait tant que possible les sentiers. Ça a été beaucoup la plage aussi. Le sentier des douaniers, la plage sur la côte Atlantique. Beaucoup de sentiers, de petits chemins tant qu’on peut, mais là par exemple, on approche la Camargue et on a traversé des marais, aussi en Charente et tu es obligé de faire des détours par la route. Donc, il y a des moments où on se retrouve pris dans des deux fois deux voies, avec les voitures qui passent à 130 km/h, t’imagines le truc. Et nous on est à côté. Il y a des moments où tu baisses la tête et tu traces vite, parce que c’est pas bien. C’est arrivé plusieurs fois.
François : Et depuis le départ, vous savez exactement où vous allez passer ou vous voyez au fur et à mesure ?
Aurélie : Non, on voit vachement au fur et à mesure, c’est pratiquement au jour le jour ou à 2-3 jours près. Mais ça peut être difficilement plus parce que les cartes ça pèse lourd aussi, les topos-guides, tout ça donc bon.
François : Oui, et j’imagine qu’il y a des jours où vous faites une pause qui n’était pas prévue, ou vous marchez plus que prévu.
Aurélie : Voilà, exactement. Dans les trucs qui étaient difficilement prévisibles, aussi, c’était quand on était en Bretagne et que d’un coup tu te retrouves bloqué parce que tu as une rivière devant toi, et qu’il n’y a pas de pont et que le premier pont est 10 km en amont – tu vois – 10 km dans les terres. Il faut faire 20 km, pour au final traverser un pont et revenir au même point que la veille, pour avoir avancé juste de 100 m sur la carte. Donc là, on essayait tant qu’on pouvait de calculer avec les marées pour essayer de passer à marée basse. Mais il y avait certaines rivières, où, même à marée basse, ça restait trop haut, donc il fallait faire le tour, donc on essayait de trouver des passeurs. Mais les passeurs, tout le monde n’était pas d’accord, ou tout le monde n’était pas disponible. Mais bon, on essayait vachement d’utiliser les moyens du bord pour traverser. Et c’était très sympa aussi parce que ça créait des super conversations avec les gens.
Plusieurs fois, on a débarqué dans des bars où tu avais vraiment les gars du coin, les vieux pêcheurs, les vieux matelots, encore avec la clope au bec, le petit verre de blanc et le béret sur la tête. Le truc bien « tradi », et nous on débarque en disant « bonjour, on fait le tour de France et on voudrait traverser la rivière qui est juste là, comment est-ce qu’on peut faire ? ». Et là, tout le monde qui se met en cercle – un peu comme une mêlée de rugby – qui regarde la carte, qui essaye de trouver des solutions, qui essaye de trouver un passeur, qui appelle le copain, qui appelle le cousin pour essayer de nous trouver une solution pour passer la rivière. C’est très très drôle, c’est des moments très marrants.
François : Il y a eu beaucoup d’autres imprévus comme ça ?
Aurélie : Ben oui, énormément. Quand on traversait la baie de Saint Brieuc. La baie de Saint Brieuc, c’est 5 ou 6 km de traversée et il fallait calculer le moment où la marée commençait à descendre et le moment ou ça allait commencer à monter, pour que nous on ait le temps de passer à un endroit qui soit stratégique et qu’on ne se fasse pas avoir par la marée montante. Donc, on a calculé notre truc, mais je peux te dire que le temps était ultra limité, donc on s’est mis à courir en plein milieu de la baie pour éviter de se faire avoir par la marée montante. Là t’es en plein milieu de la marée montante, t’es mal, il y a personne pour venir te chercher. Nous on était avec nos sacs à dos, avec du matériel vidéo, avec des trucs qui valent de l’argent et qui sont lourds. Donc, on s’est mis en train de courir.
On était en plein milieu de la baie et on a rencontré des mytiliculteurs, justement, qui font de l’élevage de moules et on a trouvé ça super beau, donc on s’est arrêtés pour les interviewer, pour prendre des photos. Enfin, c’était assez fantastique. Et après, on a rechaussé, on a repris nos sacs à dos et on s’est mis à courir pour atteindre l’autre côté de la baie. Et finalement, ça s’est bien passé, mais on n’était quand même pas très sereins.
François : Tu m’étonnes !
Aurélie : Voilà donc, c’est plein de moments comme ça.
François : Tout s’est bien passé jusque-là ?
Aurélie : Oui, oui, on n’a pas eu de mauvaises surprises au final.
François : D’accord oui, c’est bien. Vous n’avez pas eu de blessures encore ? Marcher autant de kilomètres et surtout marcher presque tous les jours, le corps doit quand même en prendre un coup.
Aurélie : Oui, oui, il en prend un coup. Il faut dire que hier soir on est arrivés ici, on était cassés. Vraiment à tel point que j’avais la tête qui résonnait, j’avais mal au crâne. Mais au fur et à mesure, le corps s’habitue aussi. Le début a été très très dur parce que Laurent, ça faisait un petit bout de temps qu’il n’avait pas marché. Moi, je n’étais pas du tout habituée à ce type d’exercice physique. Et puis, à force, le corps s’habitue. Mais vu que l’on est tout le temps dans des ambiances différentes, sur des surfaces de sol différentes, c’est toujours des muscles différents qui fonctionnent.
François : C’est bien d’un côté parce que ça évite les blessures, mais c’est moins bien parce qu’à chaque fois, du coup, tu as l’impression de forcer et ne jamais être à l’aise.
Aurélie : Exactement, même si aujourd’hui on tient bien mieux une journée qu’au début – c’est évident. On pourrait se dire : « c’est bon maintenant, ça fait 3500 bornes, c’est bon on est rodés ». Et ben non ! Toujours pas complètement.
François : J’avais vu sur le site que quand vous êtes arrivés dans les Pyrénées, vous avez été surpris de la montée et que ça avait été plus dur que prévu.
Aurélie : Ben ouai ouia ouai. On s’est dit : « c’est bon, maintenant on est musclés, tout ça ». En fait non. Tu es allé sur le site, c’est aussi pour Handicap International.
François : Oui, j’ai vu ça.
Aurélie : Ça fait du bien de voir tout le soutien pour l’association. Nous, ce qu’on retient de cette aventure, c’est une chaîne de cœurs qui s’organisent, soit pour nous héberger, pour Handicap International, il y a vraiment un élan qui se crée.
François : Et il y a des gens qui vous suivent aussi, c’est ça ? Des gens qui marchent avec vous ?
Aurélie : Oui, ça c’est vraiment sympa aussi. Il y a des gens qui nous rejoignent sur le littoral. Hier, on marchait avec une équipe d’Handicap International, et ils sont venus nous accompagner.
La semaine dernière, on a marché justement avec l’équipe de Géo Ado. 3 jours avant, on marchait avec quelqu’un qui était venu aussi.
Et coup hyper drôle, quand on était en Vendée, il y a un mec qui nous a retrouvés. En fait, on marchait sur la plage. Tout d’un coup, il y a un mec qui arrive et qui ouvre les bras en grand et qui dit « Aurélie, Laurent, comment allez-vous ? ». Alors nous, on se regarde « mais c’est qui ce gars ? ». On était là : « mais, tu le connais toi ? ». « Non, non », « moi non plus je ne le connais pas », « mais, c’est qui ce mec ? ». On n’en a jamais entendu parler, il déboule. Et en fait, c’est un mec qui nous suit depuis le début, et depuis le début il voit le petit point bleu – tu sais, sur notre carte – qui se rapproche de chez lui. Et il a attendu le moment où on passait devant chez lui pour venir nous rencontrer sur la plage. Ca faisait 3 heures qu’il observait la plage, il était là avec ses longues vues et avec ses jumelles pour nous repérer au loin et être sûr de ne pas nous manquer. Au moment où on est passés à sa hauteur, il est descendu de sa dune et il est venu nous rejoindre, et il a passé la journée avec nous.
François : Ah, c’est génial !
Aurélie : Oui, c’était extraordinaire. Le lendemain, c’est une famille qui est venue marcher avec nous, avec les petits, la petite fille de 4 ans, le petit garçon de 11 ans qui lui nous avait connus grâce à Géo Ado, parce que tous les mois on a une double page dans Géo Ado où on raconte nos aventures. Et donc, c’est le petit garçon qui est venu un jour avec son Géo Ado vers ses parents en disant « ils vont passer à côté de la maison, et si on les hébergeait ». Et hop, c’est toute la famille qui s’est mise à suivre l’aventure, donc c’est hyper drôle.
François : Et du coup, ils vous ont hébergés ?
Aurélie : Ils nous ont hébergés pendant 3 jours, c’était hyper chouette.
François : D’accord, c’est sympa. Pour revenir sur Handicap International, est-ce que tu peux m’en dire un peu plus sur ce que vous faites et comment vous marchez avec Handicap International ?
Aurélie : Oui, bien sûr. En fait, on voulait vraiment rendre notre projet utile. En fait, j’ai fait une action humanitaire il y a quelques temps au Pérou et cette notion de « je fais les choses parce que j’ai envie de les vivre mais aussi parce que j’ai envie de les partager et j’en profite pour aider » c’était hyper important et Laurent a complètement adhéré. Et de là, on s’est dit : « qui on a envie de soutenir ? ». Et on s’est dit Handicap International, c’est devenu très légitime parce qu’on a la chance de marcher, on a deux bras, deux jambes, on peut faire ce qu’on veut, aller où on veut. C’est pas le cas de tout le monde, et donc on a eu envie de marcher pour ceux qui ne peuvent pas marcher, d’où Handicap International.
Handicap, ils font des levés de fonds en France, mais toutes leurs actions sont en Asie, en Amérique latine, en Afrique et nous ce sont des pays où on a beaucoup voyagé et où on adore aller, donc ça nous parle d’autant plus et donc voilà pourquoi Handicap International.
Après, on vend symboliquement nos kilomètres. C’est-à-dire que les gens nous disent symboliquement « tiens, j’ai envie de vous acheter 20 km, donc je vous verse tant » et tout est reversé directement à Handicap. Et cet argent va servir à appareiller des enfants, des adultes dans les pays du Sud, à leur fournir des prothèses, des béquilles, sachant qu’en moyenne, c’est entre 35 et 50 euros pour appareiller une personne. Nous aujourd’hui, on a dépassé les 6000 euros, donc on aide environ 200 personnes avec cette somme.
François : C’est génial, c’est vraiment un projet hyper complet.
Aurélie : Oui, on avait envie de l’avoir un peu « multi-facettes », que ce soit vraiment un projet complet.
Donc voilà, on est souvent en lien avec les équipes d’Handicap à Lyon, parce que c’est une association française dont le siège est à Lyon. Et puis, avec les relais, les bénévoles que l’on croise au fur et à mesure de notre chemin.
François : D’accord, et vous gérez tout le système de paiement pour récolter les fonds, c’est tout fait sur votre site internet.
Aurélie : C’est hyper facile. Oui, ça se fait sur notre site internet. Les gens vont sur notre site internet, il y a un petit clic « faites un don ». Là, on est transféré directement sur une page dédiée à notre projet et là on fait un don avec la carte bleue tout simplement et tout va directement à Handicap, rien ne passe par nous, tout est reversé directement à Handicap.
Et c’est chouette, parce que ce projet là, ça touche des gens complètement différents, de tout âge aussi. Un don qui nous a particulièrement touchés, c’est un petit garçon de 10 ans qui nous a dit « voilà, normalement j’ai 20 euros pour aller au cinéma. Cette semaine, je vais pas au cinéma, je préfère donner mes 20 euros pour Handicap International et soutenir votre projet » signé Gregory 10 ans.
C’était hyper touchant. On a des dons qui vont de 10–20 euros jusqu’à 600 euros.
Et c’est beaucoup des personnes que l’on ne connaît pas, que l’on n’a jamais croisées. Et notamment, ce don de 600 euros, c’est une dame qui s’appelle Clara, qui nous a marqué un mot hyper touchant et hyper motivant et on sait pas qui c’est. Donc on a lancé une bouteille à la mer en disant « Clara, on n’a pas le plaisir de vous connaître encore, mais ça nous ferait vachement plaisir, appelez-nous ». On a donné nos numéros et elle n’a pas pris contact, elle a juste voulu faire ce geste.
François : C’est génial ! C’est un beau geste.
Aurélie : Oui, oui, c’est un très beau geste. Et les gens en profitent pour mettre des petits mots d’encouragement, et pour nous c’est hyper motivant.
François : C’est génial. Je crois que j’ai fait le tour de ce que j’avais à te demander.
Aurélie : Ben c’est chouette, et on est en train de travailler sur des bouquins ensuite pour garder une trace de ce voyage. On est en train de bien avancer pour le récit, on voudrait faire un beau livre, un livre illustré, un livre de photos. On voudrait faire un film également. Donc tout ça, ça avance. Voilà, voilà.
François : D’accord, merci beaucoup d’avoir répondu à mes questions.
Aurélie : Je t’en prie, merci beaucoup pour ton appel.
François : De rien, ça m’a fait plaisir. Ben, bonne continuation.
Aurélie : Ben merci beaucoup, merci.
François : Aller au revoir.
Aurélie : Au revoir.
François : Pour ceux qui veulent suivre Aurélie et Laurent dans leur tour de France à pied, ils ont un site internet qui est www.tourdefranceapied.com (edit : lien plus valide) le tout attaché. Comme nous l’avons entendu, ils seraient très heureux si vous pouviez les accueillir, marcher avec eux ou même si vous pouvez faire un don à Handicap International. Alors, je vous remercie tous d’avoir suivi cette interview jusqu’au bout et je vous dis à très bientôt sur le blog Randonner Malin.
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Interview : tour de France à pied d’Aurélie et Laurent est un article de Randonner Malin, le blog avec des conseils pratiques et techniques pour la randonnée pédestre.
Dans cette interview, Stéphane Rouge qui est accompagnateur en montagne indépendant, nous donne un aperçu de son métier – et en particulier du côté « pédagogie et découverte » de celui-ci que beaucoup de personnes ignorent.
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François Jourjon : Bonjour et bienvenue pour cette première interview du blog Randonner Malin. Je suis avec Stéphane Rouge qui est un accompagnateur en montagne. Bonjour Stéphane
Stéphane : Bonjour
François Jourjon : Alors, est-ce que tu peux te présenter rapidement s’il-te-plaît ?
Stéphane : Je m’appelle Stéphane, je suis accompagnateur en montagne diplômé depuis 2008 mais j’ai une pratique de la montagne qui est antérieure. Je pratique la montagne, l’escalade, l’alpinisme et la randonnée aussi depuis bientôt 18 ans à peu près. J’ai décidé d’en faire mon métier il y a 4 ans en arrière bientôt. Je ne vis pas de ça mais j’essaye de mettre en place un certain nombre de choses, vers Genève où j’habite, dans les Alpes et en Himalaya aussi.
François Jourjon : D’accord, et donc, tu fais cette activité uniquement l’été en ce qui concerne la France et la Suisse ? Ou tu fais quelque chose d’autre l’hiver et justement tu vas dans d’autres endroits ?
Stéphane : Je fais ça principalement l’été, là justement je suis en train d’essayer de m’orienter vers tout ce qui concerne les raids et les trekkings d’altitude, ce qu’on appelle trekkings alpins sportifs. Voilà, je suis en train d’essayer de rentrer un peu là-dedans. Donc principalement en été, et en hiver c’est plus à la demande, un peu de raquettes… J’ai éventuellement l’intention d’organiser un trek en raquettes dans le Chablais français. Ca partirait du Lac Léman et ça irait jusqu’à Chamonix. Mais c’est encore un projet qui n’est encore pas mis sur pied. Autrement ça m’arrive aussi de partir, je suis parti en 2010 au Népal. Mais pas avec des clients qui venaient d’Europe. J’ai un ami qui a une agence à Katmandu, donc je suis parti faire un peu de trek avec des clients de cet ami.
François Jourjon : D’accord, donc en fait tu fais plutôt au cas par cas. C’est-à-dire qu’il y a quelqu’un qui te choisit d’abord pour faire soit un raid, soit un trekking ou une randonnée et ensuite choisit aussi l’itinéraire et tu fais au cas par cas. Ou tu proposes plutôt certains itinéraires déjà tout faits et que les gens choisissent ensuite ?
Stéphane : Non, maintenant ce que j’essaye de faire – c’est une des choses les plus difficiles en tant qu’accompagnateur – c’est de trouver sa clientèle. En tout cas pour un accompagnateur indépendant comme moi. On est quelques-uns mais on n’est pas beaucoup. Beaucoup d’accompagnateurs travaillent pour des centres, des maisons de vacances, des agences et c’est vrai que pour des accompagnateurs indépendants, ce n’est pas forcement évidemment de trouver leur clientèle. Donc moi ce que j’essaye de faire en ce moment, c’est de faire un peu de communication là-dessus, sur vraiment du trekking en vallée… Le tour du Cervin, Chamonix Zermatt pour aller au col et là c’est déjà proposé. Donc j’envoie par mail tout ça et si les gens sont intéressés, ils s’inscrivent.
François Jourjon : D’accord
Stéphane : C’est ce que j’essaye de faire un petit peu.
François Jourjon : Ok, est-ce que tu pourrais préciser en quoi consiste le métier d’accompagnateur en montagne ? Et est-ce que toi tu as une particularité par rapport à ça ou est-ce que tu fais un peu comme la plupart des gens ? Est-ce qu’il y a vraiment des gens spécialisés dans certains trucs ?
Stéphane : Mis à part la formation commune, qui est la même – en tout cas en France là où je l’ai faite aussi en Haute-Savoie – chaque accompagnateur va dans son domaine de prédilection. Il peut y avoir des accompagnateurs qui se spécialisent dans la botanique, les fleurs, la géologie… Ils peuvent se spécialiser dans les classes d’ados et faire beaucoup d’apprentissage. Moi, en ce qui me concerne, je me dirige plutôt dans ce que j’apprécie, ce que j’aime, les sommets en Haute-Savoie, le trekking, les treks en Himalaya… C’est un peu ce qui me plaît plus. En fait, chaque accompagnateur va un petit peu vers ses aspirations qu’il a dans le milieu de la montagne.
François Jourjon : Donc en fait, tu dis que c’est un peu séparé en deux : il y a les gens qui sont plutôt pédagogues et qui vont faire découvrir la montagne et ceux qui sont un peu plus comme toi et qui sont spécialisés dans vraiment les trucs un peu plus durs, un peu engagés ?
Stéphane : Oui, on peut dire ça comme ça. Ca fait, j’espère pas trop prétentieux… Ca n’empêche que même pour ceux qui sont spécialisés dans les treks ou les randonnées sportives, il y a quand même une part de découverte, de pédagogie par rapport à notre environnement, par rapport à ce qu’on a envie de faire découvrir à nos clients. Mais c’est vrai qu’il y a vraiment un certain nombre d’accompagnateurs qui sont vraiment spécialisés – par exemple dans la botanique ou la géologie, pour faire des conférences… Il y en a même qui vont se spécialiser dans la gastronomie en montagne, ou la relaxation, des choses comme ça… Ou la photographie, moi je sais que je suis aussi très branché sur la photo. J’aime bien la photo, j’ai pris quelques cours et j’aime bien faire ça avec mes clients.
François : Donc en fait, il y a beaucoup plus qu’accompagner une personne en montagne, lui faire faire un tour et voilà ? Dans l’idée de beaucoup de personnes, c’est juste un guide. Alors que c’est plus – bon je n’aime pas trop l’idée – mais c’est aussi un guide touristique dans le sens où il te fait découvrir tout le reste aussi, les fleurs, les animaux… Je ne savais pas par exemple qu’il y avait même la gastronomie, la relaxation, la photo, c’est vraiment complet en fait.
Stéphane : Oui, oui… C’est des choses qui se font, après ça dépend de chaque accompagnateur. Par exemple en hiver, il y en a qui proposent raquettes et fondue.
François : D’accord
Stéphane : Une journée de raquettes et après le soir tout le monde va manger la fondue. Ca peut même se faire dans des igloos… Il y a des choses assez originales qui sont proposées. Utiliser les services d’un accompagnateur, c’est pas juste aller faire une petite balade comme ça, de deux heures, et puis revenir. Il y a quand même un certain nombre de choses en général qui sont proposées, beaucoup de découvertes, c’est intéressant…
François : D’accord et donc au départ qu’est-ce qui t’a poussé à faire ce métier, est-ce que c’est ton amour pour la montagne ? Ou il y a un peu plus, le contact avec les gens ou … ?
Stéphane : Non, honnêtement au départ je pratiquais beaucoup la montagne. Je ne connaissais pas du tout ce métier, accompagnateur en montagne. Un jour je suis allé faire une randonnée avec une connaissance et il m’a dit qu’il était en train de terminer sa formation. Et on a discuté, discuté… Et puis après, une année après, ça me travaillait, j’y pensais, ça me travaillait beaucoup et pourquoi ne pas aller plus loin et en faire ma profession. Même si c’est pas ma profession principale, mais en tout cas faire quelque chose avec cet amour de la montagne que j’ai depuis quelques années. C’est comme ça que j’ai décidé de devenir accompagnateur.
François : D’accord, très bien. Et donc peut-être pour finir, à quel type de personnes conseillerais-tu d’engager un accompagnateur de montagne plutôt que de partir tout seul ?
Stéphane : Il y a toute sorte de gens. Il peut y avoir de la clientèle comme celle que j’ai eu dernièrement en trekking, qui sont des gens qui vont en montagne un petit peu, mais qui ne s’engagent pas au-delà d’une certaine limite et qui n’ont pas envie de s’embêter – entre guillemets – avec tout ce qui est orientation, recherche d’itinéraires, météo, orages, enfin tout ça… Il y a un certain nombre de choses à gérer pour faire du trekking. Et aussi, il y a la clientèle familiale. Cela peut être des familles avec des enfants ou des adolescents, qui recherchent à aller voir des animaux ou aller reconnaître des plantes ou faire des parcours d’orientation… Après, il y a toute la clientèle d’hiver, qui cherche à faire de la raquette, un peu plus hors-piste, dans des coins sauvages non balisés que les accompagnateurs connaissent. Pour reconnaître les traces, des choses comme ça…
François : Donc en fait, il y a une grande partie qui engage un accompagnateur de montagne surtout pour limiter le risque ou par manque d’expérience…
Stéphane : Il y a les deux. Il y a la découverte et il y a aussi une appréhension d’aller seul en montagne sur certains itinéraires. Il y a aussi des gens qui n’hésitent pas à aller seuls mais qui ont envie tout d’un coup de faire une découverte plus particulière. Qu’elle soit animalière, culturelle ou autre… Ca dépend des gens.
François : Merci beaucoup Stéphane d’avoir répondu à mes questions. Pour ceux qui seraient intéressés, Stéphane a un site internet. L’adresse est la suivante (edit : n’existe plus) . Je mettrai le lien en dessous de ce podcast. Et donc, merci encore Stéphane et je te dis à bientôt.
Stéphane : Merci bien, merci à tout le monde et merci à toi.
[Podcast] Interview de Stéphane Rouge, accompagnateur en montagne est un article de Randonner Malin, le blog avec des conseils pratiques et techniques pour la randonnée pédestre.
Ceci est mon premier podcast qui explique pourquoi il est extrêmement important de bien préparer ses randonnées. J’ai décidé de faire ce podcast car je me suis rendu compte que j’insiste énormément sur l’importance de la préparation en randonnée dans la plupart de mes articles.
Pourquoi un podcast ? Cela permet aux plus pressés d’entre vous de l’enregistrer sur leur lecteur MP3 et de l’écouter n’importe où. Bien sûr, ceux qui ont plus de temps peuvent l’écouter directement ici.
Comme c’est mon premier podcast, je vous demanderai d’être indulgent. N’hésitez pas à me dire ce que vous en pensez dans les commentaires.
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(Crédit musique Zionoiz)
Podcast : Pourquoi il faut bien préparer ses randonnées est un article de Randonner Malin, le blog avec des conseils pratiques et techniques pour la randonnée pédestre.
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