Il se bat pour le droit à l’eau au Chili et subit censure et intimidation pour son action. Rodrigo Mundaca, est le lauréat du prix Danielle Mitterrand 2019.
Il est à la tête du Modatima, le Mouvement de défense pour l'accès à l'eau, la terre et la protection de l'environnement.
* Avec Marion Veber, responsable du programme Droits des peuples à la Fondation France Libertés
Rodrigo Mundaca vit dans la province de Petorca, au nord de Santiago. C’est au centre du pays. Avec ce prix, la Fondation a distingué son action avec le Modatima, il se bat contre l’accaparement de l’eau par les grand propriétaires fonciers.
« Modatima s’est créé en 2010 sur cette question des conflits liés à l’eau et à l’accaparement de l’eau par les grands propriétaires fonciers, notamment pour la culture des avocats destinés à l’exportation en Europe et en Chine. Modatima cherche à dénoncer ces accaparements des eaux par ces grands groupes d’agro-business, soutenus par les politiques en totale connivence. Parfois même, ce sont des politiques qui détiennent ces droits à l’eau. Modatima cherche à rendre visible ces conflits liés à l’eau et à mettre en avant la question des usages de l’eau ».
Son combat, il le mène dans un pays, le Chili… l’un des États du monde qui va le plus loin dans la marchandisation et la privatisation de l’eau.
« C’est très particulier au Chili. L’eau est décorrélée de la terre. On peut être propriétaire d’une terre, mais pas propriétaire des eaux qui sont sous la terre. Et ce n’est pas l’Etat qui détient les eaux. On a aujourd’hui des politiques et des personnes de l’agro-business qui achètent les eaux souterraines et qui vont pouvoir, soit les conserver, soit les revendre pour spéculer dessus. L’eau est perçue comme une marchandise. On est dans un statut très particulier avec le Chili. C’est l’Etat qui va le plus loin dans ce que la Fondation et Modatima dénoncent, à savoir cette marchandisation et privatisation de l’eau. Cela date de l’époque de la dictature de Pinochet, en 1981. Cela n’a jamais été remis en question. Cela fait 38 ans que les Chiliens subissent les effets néfastes de cette privatisation et marchandisation de l’eau ».
Consommer un avocat qui vient du Chili met à mal le droit à l'eau des Chiliens
Quelle forme prend la lutte de Rodrigo Mundaca ?
« Cela passe essentiellement par sensibiliser les premiers concernés qui souffrent de l’assèchement des eaux par la culture de l’avocat liée à la privatisation de l’eau. Mais cela passe aussi par les étudiants, des marches pour l’eau, des rencontres avec les décideurs. Ce sont des formes assez multiples. La pierre angulaire, c’est de faire connaître ces enjeux et y compris les faire connaître en dehors du Chili. On peut rattacher ce qui se passe au Chili à la consommation en Europe de ces avocats. Un chiffre éloquent : 90% des terres agricoles au Chili sont entièrement dédiées aux avocats. C’est la culture sur laquelle le Chili a misé. C’est une culture qui est très gourmande en eau qui vient assécher les rivières, sachant qu’on est déjà dans une région aride. C’est très important pour les consommateurs européens d’avocats de savoir que, quand on consomme un avocat qui vient du Chili, on participe quelque part à la mise à mal du droit à l’eau des Chiliens ».
Menacé de mort pour son action
Les action de Rodrigo Mundaca ne sont pas sans risque. Cela lui vaut d’être régulièrement pourchassé, voir persécuté. Il subit même censure et intimidation.
« En 2012, il a eu le malheur de dénoncer cet accaparement de l’eau. Un des responsables qu’il dénonçait était l’an...