Le premier podcast quotidien de poésie. Du classique au moderne, du connu au méconnu, un poème chaque jour pour commencer la journée.
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By Prisma Media
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Corentin lit le poème de Charles Baudelaire, "A une passante"
"La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?
Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !"
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Anne lit le poème de Renée Vivien, "Absence"
"Ô Femme au cœur de qui mon triste cœur a cru,
Je te convoite, ainsi qu’un trésor disparu.
Je te maudis, mais en t’aimant… Mon cœur bizarre
Te recherche, Émeraude admirablement rare !
Que je suis exilée ! Et que pèse le temps,
Malgré le beau soleil des midis éclatants !
Retombant chaque soir dans un amer silence,
Je pleure sur le plus grand des maux : sur l’absence !…"
Renée Vivien, Dans un coin de violettes, 1910
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Alexiane lit le poème de Louise Labé, "Luisant Soleil"
"Luisant Soleil, que tu es bienheureux
De voir toujours de t'Amie la face !
Et toi, sa soeur, qu'Endymion embrasse,
Tant te repais de miel amoureux !
Mars voit Vénus ; Mercure aventureux
De Ciel en Ciel, de lieu en lieu se glace ;
Et Jupiter remarque en mainte place
Ses premiers ans plus gais et chaleureux.
Voilà du Ciel la puissante harmonie,
Qui les esprits divins ensemble lie ;
Mais, s'ils avaient ce qu'ils aiment lointain,
Leur harmonie et ordre irrévocable
Se tournerait en erreur variable,
Et comme moi travailleraient en vain."
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Sabri récite le poème de Victor Hugo, Demain dès l'aube.
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
Victor Hugo, extrait du recueil «Les Contemplations» (1856)
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Manon lit le poème de Louise Labé, "Je vis, je meurs"
"Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J’ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m’est et trop molle et trop dure.
J’ai grands ennuis entremêlés de joie.
Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j’endure ;
Mon bien s’en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.
Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.
Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur."
Louise Labé, Sonnets
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Thomas lit le poème de Paul Eluard, "L'Egalité des sexes"
"Tes yeux sont revenus d’un pays arbitraire
Où nul n’a jamais su ce que c’est qu’un regard
Ni connu la beauté des yeux, beauté des pierres,
Celle des gouttes d’eau, des perles en placards,
Des pierres nues et sans squelette, ô ma statue.
Le soleil aveuglant te tient lieu de miroir
Et s’il semble obéir aux puissance du soir
C’est que ma tête est close, ô statue abattue
Par mon amour et par mes ruses de sauvage.
Mon désir immobile est ton dernier soutien
Et je t’emporte sans bataille, ô mon image,
Rompue à ma faiblesse et prise dans mes liens."
Mourir de ne pas mourir
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Manon lit le poème d'Apollinaire, "Ispahan"
"Pour tes roses
J'aurais fait
Un voyage plus long encore
Ton soleil n'est pas celui
Qui luit
Partout ailleurs
Et tes musiques qui s'accordent avec l'aube
Sont désormais pour moi
La mesure de l'art
D'après leur souvenir
Je jugerai
Mes vers les arts
Plastiques et toi-même
Visage adoré
Ispahan aux musiques du matin
Réveille l'odeur des roses de ses jardins
J'ai parfumé mon âme
A la rose
Pour ma vie entière
Ispahan grise et aux faïences bleues
Comme si l'on t'avait
Faite avec
Des morceaux de ciel et de terre
En laissant au milieu
Un grand trou de lumière
Cette
Place carrée Meïdan
Schah trop
Grande pour le trop petit nombre
De petits ânes trottinant
Et qui savent si joliment
Braire en regardant
La barbe rougie au henné
Du Soleil qui ressemble
A ces jeunes marchands barbus
Abrités sous leur ombrelle blanche
Je suis ici le frère des peupliers
Reconnaissez beaux peupliers aux fils d'Europe
Ô mes frères tremblants qui priez en Asie
Un passant arqué comme une corne d'antilope
Phonographe
Patarafes
La petite échoppe"
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Thomas lit le poème de Paul Eluard, "Le plus jeune"
"Au plafond de la libellule
Un enfant fou s’est pendu,
Fixement regarde l’herbe,
Confiant lève les yeux :
Le brouillard léger se lèche comme un chat
Qui se dépouille de ses rêves.
L’enfant sait que le monde commence à peine :
Tout est transparent,
C’est la lune qui est au centre de la terre,
C’est la verdure qui couvre le ciel
Et c’est dans les yeux de l’enfant,
Dans ses yeux sombres et profonds
Comme les nuits blanches
Que naît la lumière."
Capitale de la douleur (Gallimard, 1926)
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Philipp lit le poème de François Coppée, "Décembre"
"Le hibou parmi les décombres
Hurle, et Décembre va finir ;
Et le douloureux souvenir
Sur ton coeur jette encor ses ombres.
Le vol de ces jours que tu nombres,
L’aurais-tu voulu retenir ?
Combien seront, dans l’avenir,
Brillants et purs ; et combien, sombres ?
Laisse donc les ans s’épuiser.
Que de larmes pour un baiser,
Que d’épines pour une rose !
Le temps qui s’écoule fait bien ;
Et mourir ne doit être rien,
Puisque vivre est si peu de chose."
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Margaux lit le poème de Paul Eluard, "Liberté"
"Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom
Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom
Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J’écris ton nom
Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom
Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom
Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
J’écris ton nom
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J’écris ton nom
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J’écris ton nom
Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J’écris ton nom
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom
Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J’écris ton nom
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom
Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom
Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
Liberté."
Poésie et vérité 1942 (recueil clandestin)
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