BARTOLOMEO BANDINELLI dit BACCIO (1493–1560)

Hercules & Cacus, 1534

Marbre, Hauteur 5, 05 m

Piazza della Signoria (Firenze)

C’est une parabole très personnelle de la soumission que livre le bien nommé Baccio Bandinelli dans cette statue d’Hercule et Cacus qui s’offre au public sur la Piazza de la Signoria a Florence depuis plus d’un demi millénaire. Bandinelli s’est amusé des perspectives et des angles de vues pour créer une statue à double voir triple signification.

Visible de face pour tous ceux qui traversent la Piazza della Signoria déjà riche en statues célèbre son devrait dire richissime même, puisque que Hercule est implanté à l’angle opposé du David de Michel Ange, ignorant tous deux les merveilles qui ponctuent la Loggia dei Lanzi avec ses Benvenuto Cellini et autres Giambologna.

Les deux sculptures monumentales sont en effet  liée dès la commande , attisant une rivalité supposée entre Bandinelli et Michel Ange. L’un aurait admiré l’autre d’abord pour mieux le jalouser ensuite voir lui porter préjudice...

Guido Cagnacci (1601-1663)

Noé ivre, 1650.

L’ivresse de Noé représentée dans ce tableau de Guido Cagnacci avec une indéniable audace est un récit biblique, dont on pense qu’il a conditionné une bonne partie de l’histoire de l’humanité. C’est dire son importance. Noe y apparait endormi, lascif, à demi-nu, baignant dans un liquide suspect, plus proche de celle d'un soudard voir pire.

La représentation est déjà assez iconoclaste pour celui qui est censé être, selon la Bible, le père de la nouvelle humanité vertueuse née de l'Après Déluge.

Qui pourrait croire que cette simple beuverie sera aux racines des difficiles rapports entre les races humaines, de la réduction en esclavage des peuples uniquement pour des histoires de couleurs de peau et d’origine géographiques.

La charge sexuelle très forte que l’on peut lire dans ce tableau n’est pas non plus une coquetterie gratuite du peintre, pour faire du spectacle avec de la culotte. Il y est fait clairement allusion dans les exégèses (juives chrétienne et islamique) des textes antiques et dans des proportions qui dépassent largement ce que nous voyons dans la toile de Cagnacci et que nous aurions pu imaginer.

YANNIS TSAROUCHIS (1910-1989)

Le songe de David, 1965-74

Huile sur toile 151x 110, 5cm

Collection privé

Cette toile de Yannis Tsarouchis, est une toile sacrée, pour ne pas dire religieuse. Elle représente en effet dans une manière très personnelle, plusieurs moment d’un même épisode connu de la Bible lorsque David, troisième roi de la Monarchie unifiée d'Israël et Juda à la suite de Saül et d'Ish-boshet, et principal auteur des Psaumes demande à Dieu d’habiter à jamais auprès de lui pour éternellement contempler sa beauté.

Dans la partie supérieure gauche de la composition, comme gravé sur le mur de fond, se trouve l'intégralité du Psaume 63, dit Psaume de David, qui fait référence à un événement au cours duquel David, héros de l'Ancien Testament trouve refuge contre ses persécuteurs dans le désert de Judée et adresse ses louanges a Dieu :

Habituellement dans les miniatures des psautiers byzantins qui illustrent ce Psaume, David est souvent représenté seul assis sur un éperon rocheux ressemblant vaguement à la formation nuageuses ​​peinte à droite par Tsarouchis.

L'ange quant a lui apparaît dans une autre scène, celle du Repentir, où David demande pardon pour le meurtre d'Urie et sa liaison adultère avec sa femme.

Dans la vision de David, le jeune homme allongé sur le lit dans une posture détendue pourrait être une illustration des vers

« Sur mon lit je me souviens de toi / Je chante à l'ombre de tes ailes » ainsi que l'adultère de David.

La peinture est aussi probablement liée à certaines des expériences personnelles de l'artiste. Le dernier verset du Psaume, « alors que la bouche des menteurs sera réduite au silence », peut faire allusion à des critiques mesquines qui auraient blessé l'artiste.

On voit que Tsarouchis a un peu tout mélangé pour l’adapter à sa propre lecture des évenements.

Alexandre Alexandrovitch Deïneka (1899-1969) Deineka

Après la bataille, 1944

Musée de Koursk

C'est le portrait d'un dos. En voyant le dos du héros soviétique qui est assis au premier plan et qui semble avoir plus de vertèbres à son actif qu'il ne devrait (un peu comme les médailles sur le torse des apparatchiks), on ne peut s'empêcher de penser à Ingres. et à son odalisque nue avec son surplus déraisonnable de vertèbres, dont près de la moitié sont inutiles.

Ici, ces 7 vertèbres saillants entre les muscles de façon presque menaçante comme la queue d'un chien ou celle d'une raie manta, ou celle du bébé créature d'Alien de Ridley Scott, ce lot de vertèbres donc apparaissent juste au dessus d'une autre raie, celles des fesses du colosse écrasées sur le cube de bois qui sert de siège,

7 vertèbres comme autant de fragments de colonnes vertébrales d'un dinosaure qui jaillissent du sable lors de fouille archéologique. 7 vertèbres monstrueux qui occupent le centre - exactement le centre - de cette composition. Comme une fragment d'anatomie échappée d'un autre composition et qui aurait colonisée celle ci au milieu d'un environnement de muscle saillants formant comme une mer de chair solide. Des muscles, des os et des chairs en parfait été de fonctionnement, rescapés de l'enfer du champs de bataille et peints avec la délicatesse d'un aquarelliste face à une nature morte de fleurs..

Les Sept vertèbres d'un guerrier incarnant à la fois le Colosse de Rhodes, celui du phare d'Alexandrie, d'Hercule et d'un Prométhée sans visage qui donneraient formes humaines à des créatures simplement en posant leur égard sur elle

Bernard Buffet (1928-1999)

Deux hommes dans une chambre,

Huile sur toiles cousues, 3 aout 1947

1m 56 sur 1 m 89

Collection privée

En juin 1948, Bernard Buffet, encore mineur puisqu'il vient à peine d'avoir 20 ans, concourt avec une toile qu'il a peinte l'année précédente intitulé " Deux hommes dans une chambre ", pour le Prix de la critique, récemment fondé par Augustin Rumeau et son épouse, propriétaires de la galerie Saint-Placide à Paris. Il en sort lauréat ex-aequo avec Bernard Lorjou, de vingt ans son aîné. A cette époque là où beaucoup de carrière artistique se décident à St Germain de Près, le choc est à la hauteur de l'évènement.

Le succès est immense. A tel point que cette toile va rester exposée pendant deux années entière sur les cimaise de la galerie Saint Placide.

Deux hommes dans une chambre, l'un nu, l'autre se déshabillant, l'un assis, l'autre debout, tous deux en position frontale, hiératique, comme transposés d'une fresque égyptienne. Immédiatement, le spectateur y perçoit tout le désarroi de l'immédiat après-guerre, les interrogations d'une jeunesse affamée aussi bien du point de vue culturelle que physiologique.

En 1947, l 'été fut torride et le mois d'août très chaud à Paris. Les tickets de rationnement sont encore en vigueur et ces êtres nus et décharnés autour d'une table famélique sur laquelle s'exposent des contenants vides de toute nourriture, rappellent et dépeignent crument cette réalité.

SCIPIONE PULZONE dit IL GAETANO (1550-1598).

Portrait de Jacopo Boncompagni ,1574

Frick Collection, New York.

Si ce n'était la fraise impeccablement plissée et godronnée, l'armure en acier et bronze doré, et le pourpoint sur-brodé d'or ...on ne serait pas choquer de croiser ce fringant trentenaire aux cheveux bruns courts, traits fins et à la barbe bien taillée, portant un costume de cadre hyperactif, dans des rues d'une de nos mégapoles du 21e siècle.

En réalité Jacopo Boncompagni, représenté dans ce magnifique portrait, était le fils d’un pape.

En l’occurrence : Grégoire XIII, de son nom civil Ugo Boncompagni, élu 226eme pape de l'Eglise catholique en 1572, par un conclave qui dura moins de 24heures, le plus bref de toute l'histoire de la Papauté.

Grégoire XIII est décrit par le romancier Robert Merle dans "l'IDole" et par Alexandre Dumas dans L"a Dame de Monsereau" comme un homme quasiment sans foi ni loi.

Sitôt son père élu, Jacopo en profita pour venir s'installer à Rome . Sa sainte filiation faisant bien les choses, il devint du même coup, gouverneur du Château Saint-Ange et commandant en chef de l'armée du pape.

Pour connaitre la suite, écoutez ce podcast

Henry de Toulouse Lautrec (1864-1901)

Polisseur de marbre, 1887

Huile sur toile 101,9 x 86,7 cm

Princeton University Art Museum, New Jersey, USA.

Voilà un métier, celui de polisseur de marbre que la mécanisation des taches industrielles a fait disparaitre presque complètement. Cette tache qui fut rude entre toutes, Henry de Toulouse Lautrec, l'a peinte dans cette toile en 1887, c'est à dire l'année même de la parution de "Germinal" de Zola et douze ans après que Gustave Caillebotte ait lui même peint ses célèbres "Raboteurs de parquets" en 1875, toile considérée comme l'une des premières représentations du prolétariat urbain.

Le sort alors peu enviable de ce prolétariat urbain immigré des campagnes vers les grandes villes avait attiré l'attention de Toulouse Lautrec bien avant la parution de "Germinal", dès 1884, comme l'atteste un dessin préliminaire à ce polisseur de marbre.

La tache qui incombait alors au jeune marbrier, car il fallait être jeune, voir même très jeune, pour pouvoir réaliser cette tâche (entre 15 et 20 ans) était à la fois de scier, de polir et de poser des pierre tombales.

Ce faisant, il arrivait fréquemment hélas au marbrier de polir, sans le savoir, sa propre tombale.

PAUL CADMUS 1904-1999)

Male Nude, 1987

Crayon sur papier teinté

Collection privée

Paul Cadmus est un peintre, pastelliste et dessinateur américain qui, de son vivant, connut uen grande célébrité la célébrité avec une série de tempera sur toile figurant des scènes de genre urbaines. S'inscrivant dans le mouvement réaliste social alors dominant, elles mêlaient satire, ironie et goût du grotesque, et de ce fait furent l'objet de nombreuses commandes.

Dans ses œuvres les plus célèbres, comme dans The Fleet In (1933) ou Coney Island (1935), il impose une interprétation très nouvelle des formes réelles, qu’il imprime à presque tous ses personnages. Cette interprétation est un mélange d’idéalisation du corps et des traits masculins, en tant qu’objet de désir, à la façon des peintres et dessin ateliers de la Rennaissance italienne et de caricature de la disgrâce parodiant Rubens. Les tissus des vêtements lisses et brillants, aux couleurs vives, moulent jusqu'au la caricature des corps ronds, lisses, mous, difforme, musclés, fin ou élancés. the Fleet In qui décrit en réalité la débauche sexuelle des marins pendant une escale fait d'autant plus scandale qu'elle est présentée dans une exposition officielle sur la Marine américaine. Cette peinture, dans laquelle les attributs sexuels et les comportements des marins sont poussés à l'extreme, est l'objet d'une plainte déposé par l'amiral Hugh Rodman au secrétaire d'Etat à la Marine Claude A. Swanson. La toile est immédiatement retirée de son exposition à la Corcoran Gallery mais la publicité qui entoure ce scandale augmente la notoriété soudainement la notoriété de Paul Cadmus.En 1937, plus de 7 000 personnes viennent vois son exposition à la Midtown Gallery de New York.

Pour en savoir plus écoutez le podcast

Jack London (1876-1916)

Portrait de l'explorateur Martin Johnson (1884-1937)

Photographié en 1908 pendant l'expédition du Snark aux iles Solomon

En l'occurrence ce n'est pas un tableau mais une photo qui parle ! Une photo prise par Jack London. qui, s'il n'avait pas été le grand écrivain qu'il fut, serait peut-être devenu photographe ! Il laissa en tout cas, un nombre impressionnant de photos dont celle ci, très étrange prise en 1908, d'un des membres de l'équipage de son expédition dans les Mers du Sud I

ll s'agit de l'explorateur et cinéaste ethnologue Martin Johnson qui n 'était rien de tout cela à l'époque où cette photo fut prise en compagnie d'un habitant supposé être anthropophage des Iles Solomon !

Cette photo qui , outre son intérêt documentaire, ne manque pas d'humour, peut se lire à plusieurs niveaux différents....

Ce podcast raconte l'histoire de ces deux destinées croisées...

John Singer Sargent (1865-1925) 

Etude de nu de Thomas E. Mc Keller, 1917-20 

Museum of Fine Arts of Boston 

C’est fou le nombre de sujets différents que John Singer Sargent a pu peindre au cours de sa carrière. (fou). 

Des dames de la haute sociétés anglaise américaine, italienne et française célèbres ou anonymes, aux navigateurs élégants et solitaires sur leur yacht splendide, en passant par les nonnes dans leur couvent, les moins japonais, les montagnards aguerris, les danseuses de flamencos, les gondoliers vénitiens, les barbiers turcs,  les pêcheurs, les enfants sages, les confrères artistes, les Touaregs en habits bleus, les beaux jeunes hommes en élégants costumes ou nus….. et justement puisque l’on n’en  parle, arrêtons nous sur ce portrait nu de Thomas Eugène McKeller, garçon d’ascenseur à l’Hotel Vendôme de Boston…. 

Rien ne le prédisposait à  apparaitre une jour ainsi  nu et a triomphé pour l’éternité dans le plus simple appareil sur les cimaises d’un des plus grands musées du monde si ce n’est l’oeil de John Singer Sargent qui se posa sur lui (c’est rien de le dire) un jour de 1916. Celui ci en effet ne fut pas long à remarquer la plastique époustouflante du jeune homme alors qu’en habit rouge de groom, il actionnait mécaniquement les manettes de l’ascenseur du palace, en égrenant de façon monotone les numéros d’étage. 

 Dès lors, McKeller rejoignit pendant ses pauses l’atelier de Singer Sargent où il fut employé comme modèle pour la plupart des personnages, masculins aussi bien que féminins d’ailleurs étonnamment, pour nourrir la commande  de peintures murales « Atlas et les Hespérides » que Sargent réalisa entre 1919 et 1925 sur les murs du Musée des Beaux Arts de Boston ou Musée Isabella Stewart Gardner, le premier grand musée de cette ville.

Singer Sargent employa  alors  McKeller à toutes le sauces , si on me passe l’expression,  des dieux blancs de l’Olympe aux déesses de même provenance qui empruntaient toutes et tous le corps sculptural du beau McKeller. Un garçon d’ascenseur pour conduire à l’Olympe? Quoi de plus naturel en somme  ?