Impuissant, inapte, incapable, inefficace, inopérant, improductif, invalide. Qu’est-ce que ces termes peuvent-ils bien dire de nous ? Qui a déjà fréquenté la classe de CM2 se souvient vaguement que la fonction du préfixe « in » est de signaler une privation. Et en effet, si l’on ouvre le dictionnaire à la page consacrée, on peut lire que l’impuissance n’est rien d’autre que « ce qui n’a pas de puissance ». Pour comprendre l’impuissance donc, il faut se référer à la définition de la puissance, « capacité de transformer le cours des choses » et en déduire que l’on désigne par « impuissance » l’incapacité de transformer le cours des choses. Évidemment, cela paraît d’une affolante banalité. Mais si l’on y réfléchit, pourquoi n’est-ce pas l’inverse ? Pourquoi ne définit-on pas la puissance à partir de l’impuissance en lui ajoutant un préfixe privatif ? Pour une raison simple, c’est que la puissance est la règle, de même que l’aptitude, la capacité, l’efficacité, l’opérationnalité, la productivité, et la validité le sont au regard des premiers mots de ce texte. Ce choix n’a rien de démocratique : ces mots ne décrivent pas des situations majoritaires, mais bien des idéaux, à partir desquels sont créés des déficients : l’impuissance en premier chef.