Nous avons invité aujourd’hui, une universitaire, une chercheuse, doctorante en Humanités et Education, Olga Akou Kochie, pour comprendre pourquoi tant d’Africains, des jeunes mais pas que, des hommes mais aussi des femmes certaines enceintes, quittent leur pays, prennent tous les risques, des risques mortels, en le sachant, pour espérer se retrouver en Europe où finalement c’est la rue, le froid, la pluie, la pauvreté, le désespoir qui les attend…
Pourquoi ces Etats africains se vident de leurs forces vives, de leur jeunesse, hypothèquent leur avenir, laissent, livrées à elles mêmes, des familles où il manque un fils, des fils, qui ne donnent plus de nouvelles, peut-être morts, anonymes, au fond de la Méditerranée ?
Pourquoi de la part de l’Europe, ces politiques systématiquement répressives qui ne résolvent rien, au contraire qui aggravent la situation ? Plus on protège la forteresse Europe, plus on dresse des barbelés, construit des murs, plus on empêche les assos de secourir en Méditerranée, plus les risques encourus par les migrants sont grands et plus les morts de soif et d’épuisement dans le désert, des mauvais traitements en Algérie ou en Libye, les noyés en Méditerranée s’accumulent, plus les populations européennes et les gouvernements qu’elles élisent deviennent intolérants et maltraitants et finalement insensibles au pire.
Il y a bien sûr les raisons classiques, toujours convoquées, qui demeurent vraies cependant, le manque de perspective dans le pays, le rêve d’Europe (le mirage) mais ces réponses ne suffisent plus il faut envisager d’autres analyses, questionner les représentations coloniales, néocoloniales du phénomène c’est à dire la colonialité du pouvoir en Afrique, la colonialité des modèles de développement, la colonialité des systèmes de formation et de l’éducation en général.
Il faut également envisager la colonialité des politiques européennes de lutte contre l’immigration et la forte dose de colonialité qu’il y a dans notre passivité, notre lâche accoutumance à cette tragédie.
Olga Akou Kochie : doctorante en Humanités et Education à l’Université de Bordeaux Montaigne. A animé il y a deux mois, le 4 avril 2023, à l’Université de Bordeaux, une journée d’étude qui avait pour titre « Colonialité, Education et Migration, une approche transdisciplinaire en philosophie de l’éducation ». Une journée d’étude transdisciplinaire avec des intervenantes et intervenants dans des champs divers, ceux de la géographie, de la sociologie, la philosophie, l’éducation, les sciences politiques… et des acteurs associatifs. Le Guide du Bordeaux colonial était présent et en a rapporté quelques enregistrements et des interviews…
Interview de Jeanne Cousin, présidente de l’association Guinée Solidarité Bordeaux et qui revient, entre autres, sur le film de Thierno Souleymane Diallo, « No Meti sifade » tourné en 2018, que l’on peut traduire par « Pas facile à raconter », pas facile à raconter pour ces MNA Guinéens, la longue et périlleuse route vers l’Europe et la vie de galère à Bordeaux, pas facile à dire qu’on est passé du rêve à la désillusion…