Éditorial de la 439ème
Alors que l'euthanasie de lionceaux d'un zoo suédois suscite la polémique, cette semaine, en France c'est la députée de Meurthe et Moselle, Caroline Fiat, défendant la proposition de loi visant à légaliser l'euthanasie et le suicide assisté, qui soulève une controverse sur "les euthanasies réalisées "en catimini" contre le gré des patients à l'hôpital" (2h30'00'').
Se basant sur une étude de l'INED de 2012, intitulée "Les décisions médicales en fin de vie en France", elle ensuite affirmé que "les décisions médicales avec intention de mettre fin à la vie des patients représentaient 3,1% des décès enregistrés dans notre pays en décembre 2009 et que seul 1/5 de ces décisions étaient prises à la demande des patients. Il est donc grand temps d'encadrer les quelques 4000 euthanasies clandestines qui seraient ainsi pratiquées chaque année dans notre pays."
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Réitérant son affirmation sur Twitter, la réaction ne s'est pas fait attendre.
Les personnes en fin de vie sont parfois euthanasiées, contre leur gré, en catimini, dans nos hôpitaux. Il est donc grand temps d’encadrer les quelque 4 000 « euthanasies » clandestines. #Findevie #DirectAN
— Caroline FIAT (@CarolineFiat54) 24 janvier 2018
Un élève de 6eme lirait mieux les donnés d'un tableau que vous pic.twitter.com/dc5xiXfvpi
— CprnV (@CprnV) 24 janvier 2018
Stéphane Long dans le Quotidien du Médecin revient sur les chiffres que cite la députée : "elle s’emmêle les pinceaux dans l’interprétation des chiffres. Elle extrapole le pourcentage des décès liés l’administration de médicaments pour mettre délibérément fin à la vie à l’ensemble des décès en 2017 (plus de 600 000) et non pas, comme c’est le cas, aux seules décisions médicales en fin de vie. En 2010, ce chiffre s’élevait donc à 38 (0,8 % de 4 723) et non pas à plus de 4 000 (en réalité 4 800) comme l’annonce Caroline Fiat. Ce que nombre d’internautes lui ont fait remarquer."
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Même l'Ordre des médecins s'est fendu d'un message sur le réseau social.
L’Ordre regrette vos propos. Les médecins agissent dans le respect des patients, de la déontologie et de la loi Claeys-Leonetti. L’INED n’a jamais publié ce chiffre, il est faux. Chacun peut exprimer ses opinions sur la fin de vie mais cela nécessite des arguments vérifiés. https://t.co/Wv128Bxwtw
— Ordre des Médecins (@ordre_medecins) 25 janvier 2018
Et la députée de rétorquer en 140 caractères : "Tout comme vous regrettiez les propos de Mme Simone Veil ... Comprendra qui voudra". C'est sûr...
Mais si la proposition de la loi a finalement été rejetée en Commission, le texte sera tout de même débattu en février. "Rarement un sujet aura été aussi débattu et évalué au cours des vingt dernières années. Rarement le législateur aura été aussi contraint de remettre aussi souvent l’ouvrage sur le métier. Preuve que le dispositif législatif n’est toujours pas adapté pour répondre aux attentes et aux besoins de nos concitoyens" plaide Caroline Fiat.
Certainement que les états généraux de la bioéthique, inaugurés la semaine dernière à l'occasion de la rediscussion des lois sur la fin de vie, seront l'occasion de revenir sur ces sujets délicats.
Mieux vaut un lourd rapport qu'un tweet trop léger.
Crédits photos : Edouard Desreumaux