La Fédération Suisse des Typographes (FST) a connu une grande révolution. Dans la deuxième moitié du XXe siècle, l’industrie de la presse a été au cœur d’une révolution technologique majeure, marquée par la fin des métiers traditionnels des typographes, assurés par des ouvriers spécialistes de l’impression au plomb. Des conflits internes au syndicat ont émergé, opposant des prises de position corporatistes à d’autres, plus inspirées par Mai 68. Les premiers défendaient la paix du travail et une acceptation pacifique des nouvelles technologies de production, tandis que les autres considéraient cette révolution technique comme une emprise du capital sur l’organisation du travail.
Dans cet Historique Express, Frédéric Deshusses, archiviste pour l’association Archives contestataires à Genève, auteur de Grèves et contestations ouvrières en Suisse 1969-1979 et de Traces et souvenirs de la contestation : Charles Philipona (avec Stefania Giancane), qui vient d'écrire L’adieu au plomb, La Fédération suisse des typographes et le changement technique (1945-1980), a choisi un document pour ce numéro : un tract de la section genevoise de la FST appelant à une assemblée d'information le 21 avril 1977 sur le conflit du Parisien Libéré, avec projection du film Libérez le Parisien de Jean-Louis Müller (1976).
Cet événement est un bon exemple d'internationalisme syndical : les typographes genevois ont organisé une réunion autour d'une lutte survenue l'année précédente à Paris, alors qu'ils venaient eux-mêmes de sortir d'une grève victorieuse (18-19 avril 1977), marquée par la question du changement technique.
Ce thème reste pertinent aujourd'hui, notamment avec la menace de fermeture du centre d’impression de Bussigny.
Pour en savoir plus sur le conflit du Parisien Libéré, les 28 mois de conflit entre février 1975 et avril 1977, la réduction de la pagination du journal, le remplacement de la typographie par la composition sur film et offset, ainsi que la dégradation des conditions de travail, écoutez le travail de nos confrères de France Culture.
L’introduction de nouveaux étages de management et le déplacement des ressources de production vers l'organisation du travail ont continué à dégrader les conditions de production des journaux locaux et nationaux. Cette réforme du management continue d'avoir des conséquences directes sur le marché de la presse suisse, notamment via les décisions de ses groupes majeurs comme TX Group (TAMEDIA), mais aussi Ringier, ESH, NZZ, AZ Medien ou CH Médias.
Ce conflit illustre les transformations techniques qui touchent encore aujourd'hui le secteur de l'imprimerie et des médias, avec une transition vers la numérisation et de nouveaux modes de production.
Tous les livres de Frédéric Deshusses sont publiés aux Éditions d'en bas.
Interview réalisée par David Glaser.
Photo : Grève des typographes à Genève en 1977 (Denis Jaquet/Olivier Jaquet)
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