Share Lettres à Elise
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By Barteo
The podcast currently has 40 episodes available.
J'ai découvert Borges à 19 ans, par le recueil Fictions, et j'en garde le souvenir, fréquent aux primo lecteurs du maitre argentin, d'un passage initiatique vers un univers secret et éclatant à la fois. Mais c'est dans le Livre de sable que j'ai le plus souvent plongé, et qui m'a définitivement envoûté. Quelques histoires en particulier, dont celle-ci qui, de façon plus évidente que pour d'autres, mêle mythologie, fable, mystique et humour. Cet humour, justement, donne à cette nouvelle une dimension étrange : Borges semble parodier les contes de fées, mais en même temps l'hommage qu'il leur rend les dépasse. C'est un conte de fées adulte, puisque les héros ne sont pas des enfants et qu'ils connaissent la mort et l'exil. Plusieurs sensations se mélangent donc, mais leur alchimie opère par la puissance du style : concis, étoffé, avec cette particularité si propre à Borges qui fait qu'avec quelques mots, une allusion, il révèle tout un monde non-dit mais omniprésent. C'est proprement magique.
À écouter avec un fond de guitare espagnole (je n'y connais rien en musique argentine), pourquoi pas un Paco de Lucia inspiré mais pas trop vif, et un fond de vin rouge comme le sang. Salud!
J'avais commencé la lecture de ce roman plusieurs fois, et chaque fois j'avais été convaincu par le style : à la fois son rythme vif, qui courait comme une vague avant la tempête et qu'on suit des yeux sans croire qu'elle soit si longue avant de s'écumer avec la grâce qu'on reconnaît à ceux dont la force ne fait jamais douter de rien ; et la précision des analyses, l'acuité des portraits, la façon tendue dont il amenait les choses. Philip Roth ne lâche rien, et non seulement il ne lâche rien mais en plus cette ténacité est un élan.
Un extrait à lire en sirotant un bourbon Woodford Reserve avec un peu de sucre, d'angustura et de citron, pour la forme, et en écoutant Benny Goodman, bien sûr.
Cheers
Un texte intense comme je les aime, avec du corps, du muscle et de la tension, par l'un de mes écrivains favoris. J'avais dévoré Conteur, Menteur, puis le Club, qui reste l'un des livres que j'ai le plus lus. Sylvia est moins drôle, moins ironique surtout, mais l'idée qu'on s'accroche à une femme parce que c'est la seule véritable expérience qui vaille d'être vécue emportera toujours mon suffrage. J'ai choisi ce texte un peu par hasard, je l'avais posé sur le haut d'une pile en pensant le relire un jour, sans projet précis. Est-ce parce que je travaille à mon tour sur un texte qui voudrait traduire cette aventure sublime et désespérée qu'est la relation amoureuse que Sylvia s'est rappelée à moi ? Allez savoir.
Un texte à écouter avec un whisky qu'on fera tourner dans son verre comme une tempête dérisoire, en écoutant Bob Dylan. Cheers!
PS. Merci à Léa pour votre message !
Un Neuhoff de jeunesse, qui aboutira à son chef d'oeuvre, La Petite Française. Cheers to that, à la bière et au comptoir.
Un conte qui marqua mon enfance. Avec le recul des ans, je me rends compte à quel point il balance entre mythologie et parabole, entre fable et symboles.
Je suis fatigué, pas de conseil aujourd'hui, écoutez ce que vous aimez et buvez ce que vous préférez, cheers!
Oui, c'est bien le Chico Buarque d'Essa Moça, le crooner brésilien à la nonchalance suprême, à l'irrésistible sourire tranquille, à la voix de sable chaud sur une guitare veloutée. Un héros, en ce qui me concerne, tant la musique brésilienne fera toujours pour moi les plus belles chansons du monde. Eh bien Chico Buarque est aussi écrivain, et dans Budapest il s'amuse. Tout est facile, fluide, léger et naturel, tout s'enchevêtre sans heurt et se dénoue tranquillement, comme une bossa nova. Mais Budapest n'a pas la mélancolie de la bossa, non, c'est beaucoup plus frais. Une fraîcheur de matin, quand la bossa s'est tannée au soleil jusqu'au soir où elle bascule sa douceur. Oui, Chico Buarque s'amuse, et c'est un véritable partage. Peut-on penser plus antinomique que Budapest et Rio ? C'est bien le sujet. Et mille inventions savoureuses vont vous expliquer comment ce rapprochement entre deux villes aussi étrangères peut créer un vertigineux moment de littérature.
Un extrait à écouter, vous l'aurez deviné, avec une bossa. Je vous conseille en particulier la chanson que Chico Buarque a enregistrée avec Roberta Sa, disponible sur Youtube, Mambembe. Un délice, rien que leurs regards sont du sucre.
Et en savourant une cachaça, parce que je ne connais aucun alcool hongrois et que j'aime le Brésil.
Cheers!
L'imagerie dans laquelle baigne ma Salammbô est double : celle de Philippe Druillet d'abord. Riche, baroque, sombre et éclatante à la fois, dense, tendue. Impossible de m'en défaire quand aujourd'hui je lis ce texte, 35 ans après avoir plongé dans la bande dessinée. La seconde est une voix, celle d'Arthur H, qui lui a consacré une chanson. Comme je suis admiratif des deux, Druillet et Higelin fils, je ne pouvais qu'un jour ou l'autre tombé dans ce chef d'oeuvre.
Un extrait à écouter en buvant du vin de jujubier dans une coupe d'argent, bien sûr. A défaut, un vin lourd, riche, vieux : un bourgogne noble, c'est-à-dire épais. En écoutant des esclaves frapper des boucliers à coups d'os, en rythme. Ou préférer Arthur H, Salammbo, dans Trouble fête, merveilleux disque.
Cheers!
Je n'avais pas adoré Je m'en vais, son Goncourt. Mais allez savoir pourquoi, Courir m'avait tenté. Voilà bien toute l'ambigüité du rapport entre le sport et la littérature : je n'aime pas vraiment faire du sport, mais j'aime beaucoup en lire. Donc Courir. L'histoire d'Emile Zatopek, "ce drôle de nom qu'il ne connaissait pas sous cette forme imprimée". Le parcours légendaire d'un sportif qui n'aimait pas courir, et qui se découvre un génie dans les jambes.
Un extrait à écouter en sirotant une bière bien fraîche, la bière d'après l'effort amateur, celle de la récompense sympathique. Et en écoutant Run boy run, de Woodkid, bien sûr.
Cheers!
Les 3 premiers chapitres de ce merveilleux roman. Mon exemplaire date de 1948, il est dans un sale état, ses pages ne sont même plus jaunes, elles sont brunes. Mais il a une teinte, une épaisseur, en fait une étoffe. Il a traversé le temps et lui, au moins, est encore vivant, il a encore des choses à donner. On ne lit pas un livre de la même façon selon que ses pages sont blanches, pâles ou brunies, selon que sa couverture est poussiéreuse ou immaculée, selon que ses feuillets sont collés ou tiennent encore à un fil (deux, dans mon cas). Le livre a une vie, il a traversé des événements plus vieux que nous. Il nous rencontre après des péripéties inimaginables mais un jour il est là, il s'impose comme un hasard, évident. On le palpe, on le prend comme un animal, on sent bien que quelque chose se passe entre lui et nous. Et des années plus tard, on le lit et on comprend alors pourquoi. On comprend ce qu'était ce quelque chose sans nom qui nous a convaincu.
Dans ce texte je suis surtout sensible à la façon dont St Ex. évoque la lumière électrique. C'est un élément très important pour moi, qui y vois non pas uniquement une aide pour mieux voir ce que l'on fait dans l'ombre, mais un signal envoyé aux autres êtres humains : un phare.
Un extrait à écouter en sirotant un Mach 2, très fort et très corpulent, mais qui fait tenir bon dans les tempêtes. Et en écoutant le vent, pour y déceler, au creux du silence, un courageux moteur.
Cheers!
Bien sûr on connaît surtout le film de Verneuil avec Gabin et Belmondo. Mais sait-on qui ils sont à l'origine ? Blondin est l'un de mes héros préférés, pour sa nonchalance comme art de vivre, la fluidité de son écriture qui se joue des enchevêtrements comme un ruisseau des caprices du sol, entraînant la lecture toujours vers la légèreté d'une bulle de mousseux. Son humour, élégant et jamais méchant. Si l'on ne prend pas de plaisir à écrire, impossible de transmettre le plaisir de lire, et le plaisir de Blondin s'entend comme on s'entend entre copains. Pas besoin de trop en faire pour se comprendre. C'est une majesté dont ne se couronne que l'amitié.
Un texte à siroter avec un petit jaune sur le zinc, pourquoi pas un Henri Bardouin trempé d'un unique glaçon, en écoutant une chanson française, du Piaf, par exemple.
Cheers!
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