Cette semaine, RFI vous propose une série de reportages sur la thématique du rire. Place au stand-up dans ce premier épisode. Un genre comique né aux États-Unis où l’humoriste est seul en scène, sans autre accessoire que sa répartie, sa spontanéité et sa capacité d’improvisation. Le stand-up est si populaire que des apprentis humoristes se lancent tous les jours dans l'espoir de vivre de leur passion. Certains réussissent, mais avant le succès, beaucoup se heurtent à un univers exigeant, précaire et souvent concurrentiel. Reportage à Lille, l’une des places fortes du stand-up en France, où Baptiste Coulon a rencontré Gaëtan Petit, nouveau-né de la scène lilloise.
De notre envoyé spécial à Lille,
À 19 heures, dans la petite salle du Spotlight, en plein cœur de Lille, dans le nord de la France, un tonnerre d'applaudissements retentit. Gaëtan Petit monte sur scène, son spectacle commence. « Bonsoir les amis, est-ce que ça va ? », lance-t-il au public. « Je suis très content d’être là. Moi, je viens d’un petit village à côté de Lens, qui s’appelle Fouquières-lès-Lens. Niveau activité, il y a le stade Bollaert … et c’est tout ! ». Première blague et premiers rires dans la salle.
Une vie entre les terrils et les corons, c’est ce que raconte le spectacle de Gaëtan Petit, Un ch’ti va la vie. Un titre qui indique d'emblée l'inspiration de l'artiste : le mot ch'ti désignant un habitant de la région Nord-Pas-de-Calais, dans le patois local.
Avant sa représentation, nous le rencontrons.
« Je parle de moi, d’un mec qui vient d’un petit village un peu paumé du Pas-de-Calais, dans lequel nous sommes installés depuis plusieurs générations et d’où personne ne veut bouger. Mais moi, j’ai des rêves », déroule le jeune humoriste.
Son rêve dès le départ : vivre de la scène. Alors, il se lance. Mais après quelques semaines, les premières interrogations. « Comme j’habite toujours dans ma petite ville, je croise parfois d’anciens copains de l’école, qui eux ont un métier plus conventionnel, qui ont acheté leur maison, qui ont un enfant, bref, une petite vie bien tranquille. Et souvent, je me demande si ça ne serait pas plus simple de faire comme eux. », raconte-t-il.
« Je fais ma première blague, les gens ne rigolent pas »Sur un marché de l’humour saturé, se faire connaître est un défi. Ses premiers spectacles lui remboursent à peine ses frais d’essence. « Je me souviens d’un de mes premiers spectacles où je suis resté trois minutes sur scène. Je fais ma première blague, ça ne rigole pas, deuxième blague, ça ne rigole toujours pas. Les gens sont sur leur téléphone, il y a un malaise dans la salle. Je suis parti pleurer dans un coin, se remémore-t-il, avant de livrer une autre anecdote. Lors de mon premier spectacle au Spotlight, Pauline, ma femme, était derrière le rideau, pour me souffler les répliques ! »
Cinq ans après sa première scène, Gaëtan Petit vit entièrement de l’humour. Jovany, un producteur, l’accompagne désormais. Il a suivi son ascension.
« Le plus difficile, au début, c’est d’être son propre clown. Il faut réussir à s’assumer, ce qui n’est pas évident. Mais c’est comme cela que les gens vont pouvoir se déplacer en se disant, lui on le connaît. », explique-t-il.
Le succès n'efface pas les doutes, Gaëtan Petit en a toujours. Mais c’est le meilleur moyen de connaître la pertinence d’une blague. « Il faut la tester dix fois pour savoir si elle est validée ou pas. Même si c’est cinq bides au début, il faut la refaire cinq fois. », raconte l'artiste.
Le doute, c’est aussi la recette pour se renouveler, se démarquer, explique son producteur, Jovany. « Tout le monde a tendance à faire la même chose. Il y en a qui marchent, d’autres qui ne marchent pas. Il y a cet esprit de compétition tous les soirs sur les plateaux avec d’autres artistes. Donc, forcément, c’est risqué, ça fait peur, et puis c’est contraignant ».
Ce soir-là, à Lille, 40 spectateurs ont ri et chanté avec Gaëtan Petit. Un tiers de la salle remplie, mais une salle conquise. « Tu vas percer, c’est sûr ! », lui lance un spectateur à la sortie. « Même si ce n'est pas complet, on passe tout de même une bonne soirée », savoure Gaëtan Petit, à la fin de sa représentation. « C’est vraiment le public que j’aime. Il y avait de tout. Et là, tu te dis : je sais pourquoi je le fais ».
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