Share Rex Quondam Rexque Futurus
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By Sursus
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The podcast currently has 48 episodes available.
Un roman arthurien retrouvé ! Un chevalier jusqu’ici oublié ! L’édition et la traduction des aventures de Ségurant le Brun, chevalier au dragon, ont été ponctuées, ces dernières années, d’annonces tonitruantes sur la mise au jour de cette « matière de Ségurant ». Une version unique des Prophéties de Merlin, contenue par le manuscrit 5229 de l’Arsenal contient en effet une série d’épisodes uniques centrés sur Ségurant, enchanté au tournoi de Winchester et qui se met à pourchasser un dragon, qui n’est en fait que l’apparence prise par un démon…
Comme le remarquaient déjà Löseth à la fin du XIXème siècle ou Paton dans son édition des Prophéties de Merlin en 1926-1927, son histoire semble se continuer dans la version longue des Prophéties de Merlin, et dans toutes ses versions plusieurs prophéties du sage Merlin font allusion à la destinée de Ségurant, qui trouvera la tombe de Merlin, partira en Orient, où il sera couronné roi de Babylone et d’Abiron, se rendra à Jérusalem… Suivant Paton, Ernst Brugger, à la fin des années 30, concluait donc que Ségurant était une part centrale de la forme originale des Prophéties de Merlin. Les spécialistes remarquaient déjà qu’on retrouve aussi Ségurant dans la Queste 12599, dans une compilation « guironienne » rattachée à Rusticien de Pise, et des « versions alternatives » qui en descendent et réécrivent l’histoire du chevalier au dragon.
Cependant, le manuscrit de l’Arsenal est très tardif (1390-1403 pour Arioli) et le lignage des Bruns apparaissait dans le cycle de Guiron le Courtois, donc c’est généralement à l’univers guironien que la discipline rattachait Ségurant, dont les épisodes se trouvaient donc dans la tradition éclatée des Prophéties de Merlin et diverses compilations guironiennes dont la variété a de quoi étourdir les analystes. En 2009, Nathalie Koble attire à nouveau l’attention sur le manuscrit de l’Arsenal dans son examen des Prophéties de Merlin et un article consacré qui en détaille le contenu. Suivant ses travaux, et des analyses plus précises de Guiron le Courtois, Emanuele Arioli a réévalué la chronologie et les rapports de ces textes : puisque de nombreux éléments de la version cardinale sont attestés à la fin du XIIIe siècle, c’est celle-ci qui doit être la source de toute cette matière de Ségurant, directement ou après son intégration dans les Prophéties de Merlin dans les années 1270.
Dans ce (long) épisode, Merlin (Lays) et Maître Antoine reviennent sur les différents épisodes édités et traduits par Arioli, les questions soulevées par ses théories et celles de ses collègues.
De par la large étendue des textes couvert, cet épisode est (malheureusement) le plus long que nous ayons produit jusqu’ici, et avec celui-ci nous dépassons les 100 heures de Rex Quondam Rexque Futurus… L’occasion de vous remercier si vous nous écoutez encore !
Adaptation du classique Sir Gawain and the Green Knight, discuté dans le dernier épisode (RQRF 37), The Green Knight (2021) de David Lowery, avec Dev Patel dans le rôle de Gauvain, adapte habilement l'essentiel du roman.
Classique indétrônable de la littérature anglaise, Sir Gawain and the Green Knight a été le fruit d’innombrables éditions, traductions, et commentaires, qui n’épuisent pas le charme de cette œuvre singulière, certainement le roman arthurien qui se distingue le plus dans la tradition anglaise. Un mystérieux chevalier, complètement vert, vient défier la cour d’Arthur à Noël avec un petit jeu : qui sera assez courageux pour lui porter un coup avec sa hache, à condition qu’un an après, il le lui rende ? Gauvain s’y colle et décapite le joueur, espérant peut-être échapper à sa riposte, mais il ramasse sa tête et repart… L’année suivante se termine, et Gauvain part à sa recherche, mais très proche de sa chapelle verte, il s’arrête dans un château très (trop) accueillant, où la femme du seigneur lui fait des avances très insistantes tandis que son mari est à la chasse — et notre héros a accepté un marché étrange : à la fin de chaque journée, ils doivent échanger ce qu’ils y ont gagné…
Cette reprise du « jeu du décapité » déjà croisé dans la Première Continuation, la Mule sans frein, Hunbaut et le Perlesvaus, la verdeur mystérieuse du chevalier, souvent interprété ensuite comme un symbole ou un esprit de la Nature, les scènes de chasse d’une vivacité poétique forte, entrecoupées du malaise et de la tentation propres à la séduction, la fin fort peu triomphante de Gauvain : tout se conjugue pour créer une aventure intrigante et inoubliable, malgré sa simplicité.
Avec ces deux « Morts d'Arthur », la tradition anglaise adapte La Mort le Roi Artu (RQRF 17) à sa sauce, déjà en la séparant du Lancelot-Graal, mais aussi en réintégrant des éléments de la « tradition historique » de Geoffrey de Monmouth (RQRF 3) et ses continuateurs Wace et Layamon (RQRF 4).
La Morte Arthure stanzaïque (ou strophique) suit d'assez près la trame de son modèle français mais, privé des monologues intérieurs de la prose française, Lancelot se retrouve encore plus idéalisé comme le modèle courtois par excellence. Par contraste, le texte souligne la passivité d'Arthur, entraîné par les actions des autres, surtout Gauvain et son animosité contre Lancelot. Ses strophes rythment solennellement les batailles finales du royaume arthurien, avec quelques twists.
La Morte Arthure allitérative se démarque davantage. Cette forme de poésie qui repose sur l'allitération, la répétition de sons similaires (plutôt que la rime, par exemple) l'inscrit dans une ancienne tradition propre à la langue anglaise. L'histoire s'affranchit bien davantage de ses modèles antérieurs. Retour à Geoffrey, Wace et Layamon : les campagnes d'Arthur sur le continent, qui mènent à sa chute, n'ont plus de lien avec Lancelot, ce dernier étant un simple lieutenant, aucune relation avec Guenièvre en vue. Mais Arthur ne se satisfait pas d'avoir réglé son compte à Rome, il se déchaîne contre les habitants de la Toscane, projette de reconquérir la Terre Sainte, s'imagine presque en souverain du monde entier… quand la trahison de Mordred le ramène à la réalité, et en Grande-Bretagne.
Variations sur les thèmes connus de la chute du royaume arthurien, qui n'en finit plus de chuter, ils ont pourtant durablement marqué le verbe arthurien. Ce Lancelot très-courtois, cet Arthur particulièrement orgueilleux seront notamment repris par Thomas Malory : la Mort allitérative inspire directement ses campagnes continentales au début du règne d'Arthur, et la Mort stanzaïque la conclusion de sa grande fresque. Avec « l'anglicisation » contemporaine de l'Arthuriana, cela peut expliquer que leur sens de la formule, l'extériorité dramatique des déclamations de leurs chevaliers, soient devenus pour nous le langage de la légende arthurienne, peut-être plus encore que les vers fleuris de Chrétien de Troyes…
0:39:45 Sur le procès de Guenièvre, dans la Mort Artu on lui aurait coupé la tête plutôt que la brûler. Mais la Morte Arthure stanzaïque rajoute effectivement la torture des coupables.
Entorse à la chronologie ! Il reste beaucoup d’œuvres françaises à passer en revue, mais les plus importantes sont longues, tortueuses, et souvent pas traduites… Antoine et Lays vont donc bientôt aborder les romans anglais, qu’on trouve dans les siècles suivant le foisonnement du treizième siècle français auquel nous sommes habitués. Après une petite actualité (un peu enrhumée, c’est d’actualité), ils présentent quelques chroniques anglaises, notamment le Prose Brut, ou les Metrical Chronicles, qui reprennent la tradition “historique” de Geoffrey de Monmouth (RQRF 3) ou du Brut de Layamon (RQRF 4), avant ça la seule œuvre anglaise majeure que nous avions examinée. De même quelques adaptations et traductions sont abordées. Pas de grand roman, de grandes aventures résumées point par point dans cet épisode, mais plutôt un passage en revue du contexte anglais dans lequel arrivent les Morts d’Arthur et les romans centrés sur Gauvain, que nous allons examiner en cette fin d’année.
Notes : à 22 minutes, Antoine fait référence à ce montage. Juste après, il faut compléter Lays, manifestement fatigué : Trachsler n'a pas édité Guiron seul en 2020, c'est le fruit du groupe Guiron, bien sûr !
(Enregistré en 2022) Dans un royaume où les filles ne peuvent plus hériter, un couple décide d’élever leur fille comme un garçon. Leur enfant, Silence (nommé car il doit garder le silence sur son secret) deviendra un chevalier exemplaire de Cornouailles, mais l’époque est post-arthurienne, la cour d’Arthur ne se rappelant vraiment à nous que quand Silence doit capturer Merlin, suivant un scénario déjà trouvé dans la Suite-Vulgate (RQRF 18)… Préservé dans un seul manuscrit, qui contient aussi la Vengeance Raguidel (RQRF 26), le Roman de Silence part de cette situation pour tisser une réflexion plus large sur la part de la Nature et de l’Éducation dans la formation du caractère, qui a évidemment suscité l’intérêt des gender studies.
Datant probablement du milieu du XIIIe siècle, Les Merveilles de Rigomer voient Lancelot s’aventurer vers Rigomer, une région d’Irlande infestée de brigands aux marges du royaume arthurien, qui rappelle les marches explorées par Hunbaut (RQRF 32).
Sur le chemin se succèdent les aventures : un vieil ermite couvert de mousse, une maison où un cercueil marche tout seul et Lancelot est attaqué par de nombreux fauves, une sorcière-ogresse qui a des airs d'Ysbaddaden (RQRF 2) et sa jeune nièce… Il croise divers blessés, demoiselles en détresse et châtelains lésés qui le supplient de ne pas aller à Rigomer, car tous ceux qui y vont n’en reviennent pas, où atteints de blessures qui ne guérissent pas, attendant celui qui mettra fin à tous ces enchantements. Lancelot semble bien parti pour être cet élu, battant un chevalier qui porte trois armures les unes sur les autres et passant la garde d’un dragon, mais une jeune dame lui passe un anneau enchanté qui lui fait tout oublier et il est mis au travail dans les cuisines de Rigomer.
Gauvain et de nombreux chevaliers partent alors à sa recherche. Cligès affronte notamment un mort-vivant dans un cimetière, qui devient fou furieux quand on retire un tronçon d’épée de son corps, car tant qu’il reste planté il a l’impression d’être auprès de Morgane à la cour d’Arthur. Gauvain parvient finalement à secourir Lancelot, qui après une autre période d’errance d’un an revient incognito dénouer un duel à la cour d’Arthur, où il est reconnu. Lors du dernier tiers du roman (probablement rajouté par une autre plume, et inachevé) le roi Arthur, jaloux des exploits de ses chevaliers à Rigomer, décide de partir lui-même à l’aventure pour aider une demoiselle, et après deux aventures de Lancelot, il combat pour elle avec succès — rare occurrence d’un roi Arthur qui part à l’aventure dans un roman, comme dans le début du Perlesvaus (RQRF 11) ou le plus tardif Chevalier au Papegau.
Suivant le Conte du Graal de Chrétien de Troyes (RQRF 7), il est courant de voir des romans centrés sur Gauvain, partageant la vedette avec un autre chevalier — typiquement dans Méraugis de Portlesguez, La Vengeance Raguidel (RQRF 26) ou Gliglois (RQRF 30). En miroir du nouveau venu, qui doit apprendre les codes de la chevalerie et faire ses preuves, Gauvain, le chevalier accompli, est souvent mis dans des situations dont il est impossible de se tirer courtoisement, ou encore accablé par sa réputation, bonne ou mauvaise.
Le Chevalier aux Deux Épées suit ce schéma classique, mais s'ouvre sur une étrange scène : en allant y chercher des fers à bestiaux (destinés au Roi Arthur) la jeune dame Lore de Caradigan assiste à l'enterrement du chevalier Bléhéris dans une chapelle enchantée. Cela lui permet de récupérer son château à Ris d'Outre-Tombe, mais elle a aussi ceint l'épée du chevalier et seul un chevalier aussi preux que lui pourra la lui enlever. A la cour d'Arthur arrive un ancien écuyer de Gauvain qui souhaite être adoubé, mais qui ignore son propre nom - il s'appelle en réalité Mériadeuc, et est le fils de Bléhéris. Quand il arrive à retirer l'épée de Lore, Keu le surnomme alors logiquement le Chevalier aux Deux Épées. Mais ce que tous ignorent, c'est que Gauvain est impliqué dans la mort de Bléhéris...
Dans Hunbaut, par contre, le schéma est renversé. Gauvain doit s'aventurer sur une île qui n'est pas soumise à l'autorité d'Arthur, mais alors que Hunbaut, qui l'accompagne, en connait les usages, Gauvain commet impair sur impair et outrage le seigneur de l’île. À son retour, Gauvain devra secourir sa soeur, enlevée peu après leur départ, et rencontrer une demoiselle tellement amoureuse de lui qu'elle a fait scultpter une statue à son effigie dans sa chambre…
Deux romans presque opposés mais qui, malgré leurs diverses aventures et perspectives morales de leurs auteurs, contribuent tous les deux à construire et remixer le caractère des personnages qu’ils partagent: ici, Gauvain, le “bon chevalier”, dont on en vient à se demander s’il est si bon que ça...
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