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Trump incarne-t-il un élan fasciste de masse ou, paradoxalement, le triomphe d’un individualisme libertarien ?A-t-on affaire, avec lui, à un suprématisme ou bien plutôt un infantilisme politique au service d’une refondation mythique des USA ? L’antagonisme entre fasciste et “wokiste“ est-il le nœud qui divise l’Amérique ou bien la fiction qui recouvre une division plus profonde entre celles et ceux qui se sont insurgés suite à l’assassinat de George Floyd et la panique électorale des propriétaires ? Que peut encore le parti de la subversion, lorsque la droite s’est réapproprié les affects de la rébellion ? La démocratie en Amérique est-elle formellement soluble dans l’illibéralisme ? Sommes nous sur le point d’entrer dans le capital-cloud ou le techno-féodalisme ? Elon Musk relance-t-il le mythe colonial de la conquête de terres vierges dans l’espoir de soumettre une population extraterrestre et rejouer le pacte colonial où métropole démocratique et colonies dictatoriales fonctionnent de concert ? En décrétant la fin de l’Empire, Trump va-t-il ramener la violence coloniale à l’intérieur de ses frontières ? Le paradigme de la guerre civile est-il plus éclairant que celui de la fascisation ? L’humiliation est-elle la condition de possibilité du capitalisme ? L’effondrement de l’hypothèse libérale démocratique et de la mondialisation impériale appellent-ils à repenser la souveraineté ou à propager le communalisme ?
Nous vivons un interrègne dont la première des évidences est que les catégories politiques depuis lesquelles nous pensons achoppent. Parce que dans ce clair-obscur, il va bien falloir commencer à y voir quelque chose, nous recevons trois invités. Eugénie Mérieau, constitutionnaliste autrice de La dictature, une antithèse de la démocratie ? et Géopolitique de l’état d’exception, Michalis Lianos, sociologue spécialiste des dynamiques sociales et contestations contemporaines et Pablo Stefanoni, auteur de La rébellion est-elle passée à droite ? et spécialiste des hybridations capitalisto-fascisantes les plus étonnantes. Au vu de la confusion de nos propres intervieweurs, nous avons ajouté un chapitrage sous cette vidéo afin qu’il soit plus simple de naviguer à travers ces deux heures de discussion.
Après quelques décennies de mensonges et de dissimulations, le scandale du Chlordécone est désormais connu. Pendant près de 30 ans aux Antilles, les sols ont été pollués, l’environnement contaminé et les corps intoxiqués afin de protéger et optimiser les profits générés par l’industrie bananière à destination de l’hexagone. Malcom Ferdinand, docteur en philosophie et chercheur au CNRS vient de publier S’aimer la terre, défaire l’habiter colonial (Seuil), une enquête majeure et magistrale qui condense 15 années de recherches, de rencontres et de réflexion.
Si ce livre est incontournable dans l’évolution de la pensée écologique et décoloniale, c’est d’abord par sa méthode : à partir de cette microscopique molécule, Ferdinand déplie et déploie toutes les dimensions de l’existence personnelle, collective, économique et politique qu’elle vient affecter ou révéler. Ainsi, s’ouvrent au lecteur les questions et enjeux les plus décisifs de notre temps : comment habitons-nous le monde ? Quelles forces et logiques s’activent à zombifier la terre ? Depuis quel rapport à la vie, à la science et à l’environnement pouvons nous envisager de démanteler les structures des maîtres qui nous asservissent ?
(C10Cl10O)56 ou la formule chimique qui vient nous rappeler l’impossibilité d’une humanité-astronaute flottant au-dessus de son propre désastre autant que la nécessité de trouver les manières de vivre à travers et contre la corruption, même lorsque celle-ci s’est immiscée jusque dans nos cellules.
Nous avons donc eu cette longue et foisonnante discussion avec Malcom Ferdinand.
Un président et sa cohorte de capitaines d’industrie, une délégation qui coûte chère, très chère, un humoriste médiocre et sa paire de jeans. Voilà à peu près tout ce qui a été retenu du voyage de Macron au Maroc. Mais derrière cette visite diplomatique éminemment stratégique, se cache le drame du peuple sahraoui, victime une fois encore du réalignement français sur les intérêts marocains. Au nom du développement économique et de l’investissement financier, c’est en réalité et sans surprise le triomphe de la prédation des entreprises du CAC40 sur un territoire pas encore assez exploité et géré à leur goût : le Sahara occidental. Pourtant, dans le désert et au sein des tribunaux internationaux, la subjectivité sahraouie persévère à faire entendre sa lutte et revendiquer ses droits, et ceci aussi bien grâce à sa diaspora solidaire dispersée de par le monde que grâce aux combattants du Front POLISARIO.
00:00 Introduction
01:02 Présentation de l’invité
01:29 Pourquoi l’anonymat?
02:03 Contexte historique et colonisation
08:11 Le soutien de l’Algérie et l’invasion marocaine
10:30 Le retrait militaire de la Mauritanie et l’intervention française
14:57 L’impossible référendum et l’impuissance de l’ONU
17:41 Le Mur de sable contre la guérilla, l’écologie et le nomadisme
26:09 Le nationalisme marocain au service de la monarchie
30:35 L’importance du droit international pour les militants sahraouis
35:39 La stratégie du long terme 38:59 Le grand remplacement démographique et l’exode
40:50 La voracité du secteur privé français
47:25 Les nouveaux intérêts français au Sahara
53:06 Les grandes entreprises, des acteurs coupables
55:53 Les positions ambigües d’une certaine gauche française
59:50 Qui est vraiment le Front POLISARIO?
Depuis le 24 février 2022, la Russie est en guerre contre l’Ukraine. Sur cette guerre, beaucoup a été écrit et dit : de l’indignation furieusement européenne de Glucksmann, jusqu’à la lecture géopolitique la plus froide de certains marxistes, ne concevant l’agression russe envers l’Ukraine qu’à travers le prisme, certainement juste mais insuffisant, d’un conflit impérialiste entre l’OTAN et la Russie. Dans toutes ces analyses, c’est comme si un acteur manquait pourtant cruellement : les Ukrainiens eux-mêmes, dont certains semblent avoir presque oublié qu’ils existent, et dont le quotidien est percuté par bientôt plus de trois années de guerre sans répit.
Qu’a fait la guerre aux Ukrainiens, et plus particulièrement ici, aux Ukrainiennes ? Comment a-t-elle remis en cause les évidences acquises et remodelé les relations humaines ? Comment a-t-elle transformé les perceptions de soi, et provoqué des engagements subjectifs dévoués pour soutenir ceux qui sont au front ? C’est l’objet de l’enquête du livre Travailleuses de la résistance (Éditions du Croquant) de la militante et philosophe marxiste Daria Saburova, à travers un travail de terrain auprès de femmes des classes populaires de la région industrielle de Dnipro, dans la ville natale de Volodymir Zelensky : souvent russophones, et parfois opposées ou indifférentes au soulèvement de Maïdan. Le travail d’enquête auprès de ces femmes et de ce que Daria Saburova nomme leur « travail de résistance » offre un angle d’approche privilégié et unique pour comprendre de l’intérieur, et à hauteur de vue, ce qu’il en est aujourd’hui d’une partie de la société ukrainienne, de ses traumatismes et de ses combats quotidiens contre un adversaire à la fois proche et lointain.
Enrique Dussel nous a quittés il y a bientôt un an, en novembre 2023. C’était un philosophe et théologien argentin, dont le nom reste peu connu en France malgré sa notoriété en Amérique Latine, et notamment au Mexique où il s’exila en 1975 après avoir été menacé de mort par l’extrême-droite argentine. L’absence de Dussel dans le paysage théorique français est un fait qui confirme une fois de plus la règle des abysses de l’ignorance et de la forclusion nationales en matière de décolonial. Emmanuel Levine a récemment traduit deux des œuvres de Dussel, ce qui rend possible de continuer de remédier à ce déni : Philosophie de la libération, PUF, 2023 et Métaphysique de l’altérité. Levinas et la libération latino-américaine, Hermann, 2024. Une spécificité de Dussel est d’avoir inlassablement affirmé et documenté l’existence d’une dimension métaphysique propre aux enjeux anticoloniaux, postcoloniaux, décoloniaux. On a eu l’occasion, en lisant et discutant Dussel, de se poser la question des différences entre ce que recoupent ces trois derniers termes, et donc de procéder à une esquisse de généalogie du décolonial latino-américain ; de s’interroger ainsi sur les orientations qu’il nous faut lui donner à présent. « Initier un discours philosophique qui parte de la périphérie, qui parte des opprimés. » – tel était le mot d’ordre, en 1977, de la Philosophie de la libération.
De l’eau a coulé sous les ponts depuis que Patrick Balkany installa en 1993 les premières caméras de vidéo-surveillance de Levallois-Perret pour lutter contre la délinquance. Elles sont désormais partout, dans les rues, les bibliothèques, les magasins et halls d’immeubles. Bien malgré nous, on nous enregistre, on nous surveille, on nous « protège ». Et petit à petit, nous nous sommes faits à cette immense ramification de dispositifs de contrôle qui décompose et recompose notre rapport au monde, à la police, à la ville, à la norme, aux autres. Si beaucoup a déjà été dit et écrit sur le sujet, deux livres important viennent de paraître et qui réactualisent la question : que se passe-t-il lorsque ces millions de lentilles qui parsèment la planète se retrouvent branchées sur des ordinateurs, connectées à l’intelligence artificielle ? Pour ce lundisoir, nous accueillons Félix Tréguer qui vient de publier Technopolice, la surveillance policière à l’ère de l’IA (Divergences), Thomas Jusquiame qui raconte dans Circulez, la ville sous surveillance (Marchially) comment il a infiltré une start-up de la surveillance intelligente et Noémie Levain qui co-anime la campagne contre la Technopolice de La Quadrature du Net.
On discutera de l’état de l’art du monde de la surveillance, évidemment, de comment le lobbying s’organise entre politiciens, entrepreneurs de la tech et forces de l’ordre ; mais aussi des concepts qui nous permettent de nous opposer à cette dystopie déjà bien avancée. L’affect sécuritaire et le désir paranoïaque de contrôle se renversent-ils depuis l’idée de l’État de droit et l’abstraction des libertés publiques et individuelles ?
Depuis un an maintenant, la destruction méthodique et déchaînée de Gaza par l’armée israélienne maintient son effet de sidération. Qu’y aurait-il à dire ou penser de plus lorsque nous assistons impuissants au carnage, à l’écrasement d’un bout du monde ? Nous avons pourtant retrouvé un petit texte dans le limbes de lundimatin : manifeste kibboutz in Bavaria, rédigé en 2010 et publié en 2016 et qu’il nous a semblé, par-delà son caractère burlesque et fantasque, important de re-discuter. On a donc invité des camarades de Tsedek pour essayer de réfléchir au sionisme non à partir de sa seule réalité, mais à partir d’une contre-proposition sioniste en apparence « comique » et pourtant suffisamment sensée pour faire apparaître les contradictions des actuels soutiens inconditionnels à Israël. Cette proposition est la suivante : et si les Allemands, réellement affectés de culpabilité historique pour les crimes d’un certain IIIe Reich, se proposaient de nous confier, à nous juifs européens, un territoire sympathique en Bavière, pas loin de Bayreuth (plutôt que de Beyrouth), pour y installer nos kibboutzim socialistes et communalistes ? Que ferions nous ? Que faire des bavarois ? Sera-ce le judaïsme qui définira l’État de Bavière ? Ou l’État de Bavière qui définira le judaïsme ? Être juif, est-ce faire peuple, ethnie, religion ou, plus essentiellement, comme le pense Ammon Rav Krakotzkin, vivre et penser depuis une conscience de l’exil et donc, la conscience de la nécessité d’un droit supérieur à celui des peuples à disposer d’eux-mêmes, un droit plus fondamental encore que celui des nations : le droit à traverser le monde et les États, à migrer et émigrer, à s’exiler, apatride, et à errer dans le désert, d’une errance adverse ?
La dissolution de l’Assemblée nationale a plongé brusquement une large partie de la population dans un état de sidération. Ce sentiment, qui n’a pas affecté seulement les gauchistes mais les membres même du camp macroniste les plus proches, n’est peut-être pas dû au hasard. Nous avons l’habitude des mensonges cyniques de la popote oligarchique. Ce qui est ici étonnant, c’est que l’on éprouve un choc qui confine à l’outrage, au scandale intime, au sentiment d’avoir été plongé depuis presque dix ans, sous la houlette non d’un politicien menteur mais d’une sorte d’ex toxique, de manipulateur équivoque, en réalité, et c’est l’intuition du sociologue Marc Joly comme d’Anne Crignon (Voir : Ve République : un soupçon de perversion narcissique), sous l’emprise d’un « pervers narcissique » en pleine crise.
Cette intuition n’est pas anodine. Elle indique un changement dans les structures actuelles de la domination et de sa légitimation. Selon Joly, nous serions passés d’une légitimation des inégalités sociales par la « violence symbolique », soit l’intériorisation inconsciente de l’ordre injuste et de la vision du monde des dominants, à une sorte de mise à nue brutale de la domination, mise à nue où le pouvoir de jouissance du pouvoir, ne se jouant plus sur le mode narquois de l’apparence, sur le mode satisfaisant d’une couleuvre avalée en silence par le truchement de symboles, mais sur le mode terriblement médiocre de la « violence morale », du harcèlement moral, de la jouissance non de l’apparence, mais du micromanagement, de la capacité à disloquer les âmes, la cohérence des choses, le sens du monde et les vérités essentielles, la faculté de titiller à mort ses victimes vampirisées, de s’assumer irresponsable, et de martyriser des citoyens comme s’il s’agissait de petits jouets dans les mains d’un pervers infantile. Pour Joly, le déclin, du fait de la critique féministe ou autre, du camouflage dans la violence symbolique des masculinités patriarcales et capitalistes, a engendré une société dans laquelle le mode par lequel le dominant jouit de sa domination sur le dominé n’est pas fondé sur le sentiment de l’avoir bien eu, bien dupé, mais celui de pouvoir continument le plonger dans un état de sidération, d’offense, d’inexistence, sur la base d’un arsenal d’injonctions paradoxales, d’indifférence à la contradiction et à la vérité (paradoxalité), d’effacement des continuités historiques (gaslighting) et de tout ce qui fait sens. Le monde de la violence symbolique semble laisser place au monde mis à nu de la violence morale, et dans cet entre-deux surgissent partout, dans les familles, les groupes, les entreprises et les institutions de l’État même, ces figures inquiétantes du « pervers narcissique », du « prédateur », de l’être dont la vie n’est vouée qu’à conserver l’emprise et à la renouveler sans cesse. Macron est-il l’une d’entre elle ? Qu’est-ce que cela nous révèle de nos sensibilités contemporaines, de nos grilles d’analyse du pouvoir et de l’épuisement des institutions de la Ve République ? Là où la domination semble laisser éclater sa franche perversité sans le tampon des apparences, avons-nous affaire à la fin d’une époque de la gouvernementalité ? Vivons-nous un crépuscule du pouvoir secoué sur ses bases et obligé de se réduire à l’efficacité perverse pure ? Ou sommes nous en train de découvrir que le pouvoir pour jouir de lui-même n’a plus besoin de se cacher, parce qu’il est devenu total et sans issu ?
On dira que le désert ne peut plus croître. Certes. Mais Joly nous apprend qu’il peut encore s’enlaidir.
1984, MadMax, La Route, Les furtifs, La zone du dehors, les dépossédés, V comme Vendetta. La science-fiction explore l’avenir qui vient. Dans son dernier essai, l’imaginaire au pouvoir. Science-fiction, politique et utopies aux Éditions du Passager clandestin, Vincent Gerber interroge les puissances politiques de la science-fiction. À l’heure du culte du pragmatisme et du réalisme, de la disqualification permanente des joyeuses divagations, la science-fiction et ses imaginaires pourraient bien s’inviter aux débats politiques. Réfléchir demain, anticiper les catastrophes qui viennent mais aussi percer l’avenir en projetant quelques mondes désirables sont sans doute quelques-uns des défis de la S.F. Dans de sombres temps, l’imagination en mouvement est une nécessité politique : elle utopie le ici et le maintenant et donne des raisons de croire au monde et d’y croire malgré tout.
Si guerre et force virile sont fréquemment associées, souvent à raison, il existe cependant un angle mort qui tient presque du tabou, celui de la puissance de la féminité combattante.
Dans “Combattantes, quand les femmes font la guerre”, la sociologue Camille Boutron récapitule 10 années de recherches et de terrains. Des prisons péruviennes pour prisonnières du Sentier Lumineux aux camps des guérillas FARC, jusqu’au hauts rangs des armées françaises, elle est allée à la rencontre de cette subjectivité duale qui consiste à être femme et combattante dans un monde très masculin.
Même si tout oppose idéologiquement une militaire occidentale à une guérillera latino-américaine ou à une militante de l’Etat islamique, elles partagent cependant un même intérêt à faire reconnaître leur trajectoire comme étant éminemment politique. Toutes inscrivent leur engagement, humaniste ou brutal, révolutionnaire ou réactionnaire, dans un domaine que l’on voudrait leur faire croire réserver aux hommes.
« La guerre, j’en suis persuadée, commence chez soi, en soi. Elle vient de ces conflits familiaux insolubles et destructeurs, des non-dits qui font hurler lors des repas de famille, elle bouillonne chez ces petites filles qui, comme ma grand-mère, ont vécu le pire sans jamais pouvoir en parler. L’inceste, le viol, l’emprise sont autant de déclarations de guerre faites aux femmes (et de façon générale à l’ensemble des personnes vulnérables) dans le cercle intime et discret de la famille. L’état du monde est un reflet de ces violences, encore insuffisamment abordées dans leur dimension structurelle et politique. Parce que l’on considère avant tout les femmes comme des victimes – comme si cela était un statut en soi. Or être victime ne veut pas dire que l’on ne peut plus agir. On peut en outre être victime et bourreau à la fois, que l’on soit un homme ou une femme. »The podcast currently has 122 episodes available.
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