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Cette semaine, nous recevons Christophe Hansen, commissaire européen luxembourgeois à l’Agriculture et à l’Alimentation ainsi qu’ancien eurodéputé du Parti populaire européen (PPE). Simplification des normes, accords du Mercosur et agriculture biologique : il détaille la feuille de route de l’Union européenne (UE) pour le secteur agricole.
La Commission a présenté sa "vision" pour l’agriculture de l’Union européenne, un plan qui vise à façonner un "système agroalimentaire attractif, compétitif, résilient, tourné vers l'avenir et équitable pour les générations actuelles et futures". Cette nouvelle feuille de route marque une rupture en termes d’objectifs et de contraintes pour les agriculteurs.
"Trop de charges administratives"En effet, en 2020, la Commission européenne présentait la stratégie de la "ferme à la fourchette" qui visait à verdir le système alimentaire européen avec des objectifs précis à l'horizon 2030. La Commission plaide aujourd’hui pour davantage de flexibilité, ce qui fait craindre un recul des mesures prises pour protéger l’environnement. "Nous sommes toujours dans l'idée d'un verdissement", se défend Christophe Hansen.
Pourtant, le maître mot de cette "vision" est la simplification. Cela passe notamment par un assouplissement de la législation et des normes qui s’appliquent aux agriculteurs. Le commissaire à l’Agriculture et à l’Alimentation explique avoir "entendu" les demandes des agriculteurs qui ont manifesté en masse l’an passé : "Ils dénoncent trop de charges administratives". "Il y a toute une panoplie de lois nationales et européennes auxquelles ils doivent se tenir", détaille-t-il. "Je pense qu'il est essentiel de réagir", alerte Christophe Hansen.
S’il reconnaît que "le changement climatique est une réalité", il estime qu’il faut privilégier l’échange avec les agriculteurs plutôt que "les règlements et la pression du haut vers le bas pour atteindre les objectifs". "Nous devons inciter les agriculteurs à participer à la protection de l’eau et du climat", explique-t-il en guise d’exemple. Il en appelle à considérer les agriculteurs comme faisant "partie de la solution et non pas du problème".
"L’agriculture a baissé ses émissions de 2 %"Au niveau mondial, les émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole représentent 11 % des émissions totales. Alors que certains secteurs sont contraints par la loi européenne sur le climat de réduire leurs émissions d'ici 2030, l’agriculture échappe à cette obligation. "L’agriculture fait des progrès énormes", explique le commissaire. "Entre 2023 et 2024, l’agriculture a baissé ses émissions de 2 %. Le secteur des transports a enregistré une baisse de 1 %. L'agriculture fait mieux", indique-t-il. Pour parvenir à une baisse des émissions de gaz à effet de serre, il prône le développement de nouvelles technologies : "Si nous assurons une meilleure prévisibilité budgétaire et réglementaire, il y aura à nouveau plus d’investissements dans l'agriculture, dans de nouvelles technologies qui seront moins émettrices et nous serons capables de réduire davantage les émissions".
Autre coup porté à la protection de l’environnement : la présidente de la Commission européenne a annoncé la suppression du texte qui visait à réduire de 50 % l’utilisation des pesticides d’ici 2030. "Ces dix dernières années, nous avons retiré plus de cent matières actives utilisées dans l’agriculture. Je pense que c'est un grand pas”, explique Christophe Hansen. Il indique que cela a conduit des agriculteurs à subir des pertes de récolte. Pour tempérer les critiques liées au retrait de cette législation, il appelle à "développer davantage les biopesticides qui peuvent représenter des alternatives aux pesticides classiques". "Avant de retirer des produits, nous devons avoir une alternative plus durable", poursuit-il.
À voir aussiPolitique agricole : un assouplissement des normes de l'Union européenne
"Il faut rendre l’agriculture biologique plus attractive"Au sujet de l’agriculture biologique, la Cour des comptes européenne a estimé que l'UE pourrait ne pas atteindre son objectif de 25 % de terres cultivées en agriculture biologique d’ici à 2030. À ce jour, seulement 11 % d’entre elles sont cultivées en bio. "C'est un objectif qui est ambitieux mais réalisable", selon Christophe Hansen. "Il faut rendre l’agriculture biologique plus attractive", poursuit-il. Quinze milliards d’euros supplémentaires vont être alloués pour développer le bio d’ici 2027.
Selon les exploitants, ce montant est insuffisant. "Nous souhaitons encourager les marchés publics comme les cantines publiques à miser davantage sur les produits bio et régionaux", avance Christophe Hansen comme possible solution pour développer ce secteur. "Nous devons aussi miser sur l'exportation de ces produits car notre label bio est reconnu mondialement, il y a d'énormes potentiels. Nous travaillons à faciliter encore plus les démarches administratives et les subventions agricoles pour ces exploitants", ajoute-t-il.
"Il faut trouver des alternatives d’exportation"D’un point de vue économique, les agriculteurs ont également manifesté contre la non fixation des prix des produits par les producteurs. Le marché du lait est particulièrement touché car ses prix sont notamment fixés selon les cours mondiaux et selon le prix de vente dans d’autres pays. À cause de ces fluctuations, les agriculteurs livrent leur production et ne savent souvent pas combien elle leur rapportera, reconnaît le commissaire à l’Agriculture. "Il faut qu’il y ait des contrats écrits obligatoires. Nous encourageons également les agriculteurs à se regrouper en organisations de producteurs. Ils auront une position plus forte dans les négociations, avec des prix décidés par eux-mêmes", avance Christophe Hansen. Les pratiques de la grande distribution, qui peuvent librement fixer leurs marges, sont aussi critiquées par les agriculteurs. "Nous avons mis en place un observatoire de la chaîne alimentaire pour déterminer et voir très clairement qui réalise les marges et où elles sont réalisées", détaille le commissaire.
Au sujet de l’accord de libre-échange entre l’Union et les pays du Mercosur contre lequel Emmanuel Macron cherche une minorité de blocage, Christophe Hansen rappelle qu’il s’agit d’un "accord négocié lors d'un mandat que les États membres ont donné à la Commission européenne". Des agriculteurs se sont également opposés à cet accord lors de nombreuses manifestations à travers l’Europe car jugé préjudiciable pour leur propre production. "Je comprends tout à fait les craintes des agriculteurs", explique le commissaire. Il admet la nécessité pour eux d’obtenir des prix justes et la réciprocité des standards de production : "C’est inacceptable que nous privions nos agriculteurs de certains produits phytosanitaires mais que les produits importés soient traités avec ces pesticides". Il estime cependant que certains produits laitiers et le vin pourraient bénéficier de cet accord.
Alors que l’Union européenne est dans l’attente d’annonces officielles de l’administration Trump au sujet des droits de douane qu’il souhaite augmenter, l’agriculture européenne pourrait être victime de ce protectionnisme américain. "Il vaut mieux se préparer et trouver des alternatives d'exportation pour nos produits", explique Christophe Hansen, justifiant la nécessité de mettre en place les accords du Mercosur.
L’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne est en cours de discussion mais fait craindre à certains pays de l’Est une concurrence agricole accrue. En effet, l’Ukraine exporte chaque mois plus de sept millions de tonnes de produits agricoles. "Il faut se préparer à un partenariat plus stable sous forme d'un accord commercial avec l’Ukraine", annonce Christophe Hansen. "Nous sommes aussi dépendants de beaucoup de produits que l’Ukraine peut produire, comme le soja. Il faut savoir reconnaître les opportunités", conclut-il.
Une émission préparée par Luke Brown, Isabelle Romero, Oihana Almandoz et Perrine Desplats.
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Cette semaine, nous recevons Christophe Hansen, commissaire européen luxembourgeois à l’Agriculture et à l’Alimentation ainsi qu’ancien eurodéputé du Parti populaire européen (PPE). Simplification des normes, accords du Mercosur et agriculture biologique : il détaille la feuille de route de l’Union européenne (UE) pour le secteur agricole.
La Commission a présenté sa "vision" pour l’agriculture de l’Union européenne, un plan qui vise à façonner un "système agroalimentaire attractif, compétitif, résilient, tourné vers l'avenir et équitable pour les générations actuelles et futures". Cette nouvelle feuille de route marque une rupture en termes d’objectifs et de contraintes pour les agriculteurs.
"Trop de charges administratives"En effet, en 2020, la Commission européenne présentait la stratégie de la "ferme à la fourchette" qui visait à verdir le système alimentaire européen avec des objectifs précis à l'horizon 2030. La Commission plaide aujourd’hui pour davantage de flexibilité, ce qui fait craindre un recul des mesures prises pour protéger l’environnement. "Nous sommes toujours dans l'idée d'un verdissement", se défend Christophe Hansen.
Pourtant, le maître mot de cette "vision" est la simplification. Cela passe notamment par un assouplissement de la législation et des normes qui s’appliquent aux agriculteurs. Le commissaire à l’Agriculture et à l’Alimentation explique avoir "entendu" les demandes des agriculteurs qui ont manifesté en masse l’an passé : "Ils dénoncent trop de charges administratives". "Il y a toute une panoplie de lois nationales et européennes auxquelles ils doivent se tenir", détaille-t-il. "Je pense qu'il est essentiel de réagir", alerte Christophe Hansen.
S’il reconnaît que "le changement climatique est une réalité", il estime qu’il faut privilégier l’échange avec les agriculteurs plutôt que "les règlements et la pression du haut vers le bas pour atteindre les objectifs". "Nous devons inciter les agriculteurs à participer à la protection de l’eau et du climat", explique-t-il en guise d’exemple. Il en appelle à considérer les agriculteurs comme faisant "partie de la solution et non pas du problème".
"L’agriculture a baissé ses émissions de 2 %"Au niveau mondial, les émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole représentent 11 % des émissions totales. Alors que certains secteurs sont contraints par la loi européenne sur le climat de réduire leurs émissions d'ici 2030, l’agriculture échappe à cette obligation. "L’agriculture fait des progrès énormes", explique le commissaire. "Entre 2023 et 2024, l’agriculture a baissé ses émissions de 2 %. Le secteur des transports a enregistré une baisse de 1 %. L'agriculture fait mieux", indique-t-il. Pour parvenir à une baisse des émissions de gaz à effet de serre, il prône le développement de nouvelles technologies : "Si nous assurons une meilleure prévisibilité budgétaire et réglementaire, il y aura à nouveau plus d’investissements dans l'agriculture, dans de nouvelles technologies qui seront moins émettrices et nous serons capables de réduire davantage les émissions".
Autre coup porté à la protection de l’environnement : la présidente de la Commission européenne a annoncé la suppression du texte qui visait à réduire de 50 % l’utilisation des pesticides d’ici 2030. "Ces dix dernières années, nous avons retiré plus de cent matières actives utilisées dans l’agriculture. Je pense que c'est un grand pas”, explique Christophe Hansen. Il indique que cela a conduit des agriculteurs à subir des pertes de récolte. Pour tempérer les critiques liées au retrait de cette législation, il appelle à "développer davantage les biopesticides qui peuvent représenter des alternatives aux pesticides classiques". "Avant de retirer des produits, nous devons avoir une alternative plus durable", poursuit-il.
À voir aussiPolitique agricole : un assouplissement des normes de l'Union européenne
"Il faut rendre l’agriculture biologique plus attractive"Au sujet de l’agriculture biologique, la Cour des comptes européenne a estimé que l'UE pourrait ne pas atteindre son objectif de 25 % de terres cultivées en agriculture biologique d’ici à 2030. À ce jour, seulement 11 % d’entre elles sont cultivées en bio. "C'est un objectif qui est ambitieux mais réalisable", selon Christophe Hansen. "Il faut rendre l’agriculture biologique plus attractive", poursuit-il. Quinze milliards d’euros supplémentaires vont être alloués pour développer le bio d’ici 2027.
Selon les exploitants, ce montant est insuffisant. "Nous souhaitons encourager les marchés publics comme les cantines publiques à miser davantage sur les produits bio et régionaux", avance Christophe Hansen comme possible solution pour développer ce secteur. "Nous devons aussi miser sur l'exportation de ces produits car notre label bio est reconnu mondialement, il y a d'énormes potentiels. Nous travaillons à faciliter encore plus les démarches administratives et les subventions agricoles pour ces exploitants", ajoute-t-il.
"Il faut trouver des alternatives d’exportation"D’un point de vue économique, les agriculteurs ont également manifesté contre la non fixation des prix des produits par les producteurs. Le marché du lait est particulièrement touché car ses prix sont notamment fixés selon les cours mondiaux et selon le prix de vente dans d’autres pays. À cause de ces fluctuations, les agriculteurs livrent leur production et ne savent souvent pas combien elle leur rapportera, reconnaît le commissaire à l’Agriculture. "Il faut qu’il y ait des contrats écrits obligatoires. Nous encourageons également les agriculteurs à se regrouper en organisations de producteurs. Ils auront une position plus forte dans les négociations, avec des prix décidés par eux-mêmes", avance Christophe Hansen. Les pratiques de la grande distribution, qui peuvent librement fixer leurs marges, sont aussi critiquées par les agriculteurs. "Nous avons mis en place un observatoire de la chaîne alimentaire pour déterminer et voir très clairement qui réalise les marges et où elles sont réalisées", détaille le commissaire.
Au sujet de l’accord de libre-échange entre l’Union et les pays du Mercosur contre lequel Emmanuel Macron cherche une minorité de blocage, Christophe Hansen rappelle qu’il s’agit d’un "accord négocié lors d'un mandat que les États membres ont donné à la Commission européenne". Des agriculteurs se sont également opposés à cet accord lors de nombreuses manifestations à travers l’Europe car jugé préjudiciable pour leur propre production. "Je comprends tout à fait les craintes des agriculteurs", explique le commissaire. Il admet la nécessité pour eux d’obtenir des prix justes et la réciprocité des standards de production : "C’est inacceptable que nous privions nos agriculteurs de certains produits phytosanitaires mais que les produits importés soient traités avec ces pesticides". Il estime cependant que certains produits laitiers et le vin pourraient bénéficier de cet accord.
Alors que l’Union européenne est dans l’attente d’annonces officielles de l’administration Trump au sujet des droits de douane qu’il souhaite augmenter, l’agriculture européenne pourrait être victime de ce protectionnisme américain. "Il vaut mieux se préparer et trouver des alternatives d'exportation pour nos produits", explique Christophe Hansen, justifiant la nécessité de mettre en place les accords du Mercosur.
L’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne est en cours de discussion mais fait craindre à certains pays de l’Est une concurrence agricole accrue. En effet, l’Ukraine exporte chaque mois plus de sept millions de tonnes de produits agricoles. "Il faut se préparer à un partenariat plus stable sous forme d'un accord commercial avec l’Ukraine", annonce Christophe Hansen. "Nous sommes aussi dépendants de beaucoup de produits que l’Ukraine peut produire, comme le soja. Il faut savoir reconnaître les opportunités", conclut-il.
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