Qu’ils soient sous-marins ou de surface, de surveillance ou de combat, les drones font une entrée tonitruante au sein des flottes militaires. Ils étaient d’ailleurs partout dans les allées du salon Euronaval qui s’est tenu cette semaine près de Paris, véritable reflet d’une « dronisation » massive et rapide des marines militaires du monde.
Effilés comme une torpille, carénés comme un bateau, il n’y avait pas une allée, pas un stand sans drones au salon Euronaval, une production à foison, fruit de l’imagination de PME et des grands de l’industrie au premier rang desquels Naval group… Pierre Antoine Fliche, responsable des lignes de produits drones : « Chez Naval Group, on a deux grandes catégories de véhicules, les drones de surface et les drones sous-marins. Dans le drone de surface, on a la gamme Seaquest, dont le plus petit, le Seaquest S, a déjà été lancé. C'est un produit industriel qui est en essai à la mer en ce moment. Il a pour particularité d'être embarquable sur des frégates et donc de pouvoir faire tout un tas de missions à leur profit, comme une extension de leur capacité. Alors on est dans la classe 9,30 m, donc ça reste un gros objet pour nous tous, mais ramené à l'échelle d'une frégate par exemple, c'est quelque chose d'assez petit. Il peut être armé ».
Complément de protection de la frégate, le Seaquest S peut naviguer plusieurs jours, tout comme l’Ucuv un sous-marin de 10 tonnes et de 10 mètres, le bébé de l’ingénieur principal de l’armement Patrick de la DGA, « Je suis le manager en charge du projet technologique de développement Ucuv pour Unmanned Combat Underwater Vehicle. Quelque part, on est en train de défricher un nouveau domaine avec ce type d'engin. Aucune marine dans le monde aujourd'hui n’est dotée de ce genre d'outils. Donc on réfléchit beaucoup avec la marine nationale à quelle pourrait être les usages de ce type d'engin. Donc de facto, quel armement il faudrait lui confier ».
La mission de ce drone sous-marin, sécuriser par exemple le goulet de Brest pour assurer la sortie des sous-marins nucléaire lanceur d’engins (SNLE), fer de lance de la dissuasion.
Dans cette course aux drones, les PME en tête
Delair Exail, Diodon, ou encore Alseamar avec son glider Sea explorer, Nicolas Delmas : « C'est un planeur sous-marin et on vient jouer sur la flottabilité de l'engin pour le faire couler ou remonter dans la colonne d'eau. Ça lui permet d'avancer horizontalement comme un planeur aérien. Sa fonction est multiple, ça dépend de la charge utile. Ici, par exemple, on a une charge utile acoustique qui permet de faire de la détection ou de la localisation de bateau. L'autonomie du glider, c'est plusieurs mois. Il est opérationnel, il a été mis en œuvre dans différents exercices. Ce qui va changer, c'est que c'est un produit qui est peu cher, qui est très facile à mettre en œuvre et donc en fait on peut en mettre beaucoup. Actuellement, de manière industrielle, on n'est que deux sociétés dans le monde à proposer un tel produit, Alseamar, société française et une autre société américaine ».
Et si les petits acteurs comme Alseamar, ont un coup d’avance, c’est qu’ils proposent déjà leurs solutions au marché civil, c’est la clé du succès martèle Timothée Moulinier délégué innovation du Gican, le groupement des industries navales :« Au Gican on en est persuadé. Nous, on travaille bien ces deux axes. On a 50% de notre chiffre d'affaires qui est dans le militaire, 50% dans le civil. Et on voit que les technologies qui sont robustes dans le temps, c'est celles qui sont capables justement de s'adresser aux deux marchés, qui sont capables de faire face aux cycles au temps long du militaire, avec le temps court, la réactivité plutôt du civil. On croit beaucoup à cette approche duale ».
Microcosme d'entreprises
En s’appuyant sur un microcosme d’entreprises très dynamiques situées sur la Côte d’Azur et en Bretagne du sud, la France, en retard sur le segment des drones aériens, semble cette fois avoir tous les atouts pour devenir numéro un des drones navals, assure Tamara Brizard cofondatrice d’Arke Océan. Son entreprise produit des essaims de petits drones sous-marins, destinés à l’origine à la protection de la biodiversité. Ils ont depuis trouvé une application militaire : « Nous, c'est du petit drone qui ne va pas naviguer très loin, mais par contre qui va être beaucoup plus précis dans son positionnement. Donc on va modéliser l'espace. C'est pour protéger des sites, les essaims de drones sont destinés à faire de l'écoute acoustique. Ils peuvent rester jusqu'à un mois dans l'eau parce qu'ils se posent au fond et ils vont écouter. Et dès qu'ils entendent la signature d'une menace, ça peut être des plongeurs ou des bateaux spécifiques, des bateaux de pêche aussi, ils vont sonner une alarme et dire, attention, il y a cette signature, il y a quelqu'un qui est sur site ».
La France qui possède le second plus grand domaine maritime au monde doit être capable de l’occuper et ces drones sont une partie de l’équation indique Sébastien Moulinier du Gican : « Ces nouveaux moyens permettent d'aller surveiller ces zones là, d'aller lutter contre les trafics illicites, d'aller lutter contre la pêche illégale. Et ça c'est des outils qui sont à la disposition à la fois des marines militaires mais aussi de l'action de l'État en mer ».
Les drones navals, acteurs clés du futur combat en mer, permettront également dans un futur proche d’assurer la présence presque permanente de la marine nationale y compris dans les océans les plus vastes et les plus éloignés, mais néanmoins au cœur de rivalités entre nations.
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