Le parc de la Comoé, au nord de la Côte d'Ivoire s’étend sur près d'un million d’hectares. Cette réserve de la biosphère est une des zones protégées les plus vastes d’Afrique de l’Ouest, où se mêlent savane arborée et des ilots de forêt. Ce parc avait un temps été classé patrimoine en péril, en raison des activités illicites qui ont mis en danger sa faune et sa flore. Par ailleurs, l’insécurité à la frontière avec le Burkina Faso et les attaques à caractère terroriste qui ont affecté Kafolo en 2020 et en 2021, ont entamé l’image de la région, classée zone rouge par les chancelleries occidentales. Mais depuis trois ans, les autorités ont sécurisé le nord du pays. La relance de ce parc illustre cette reprise progressive des activités. En 2023, l’Unesco l’a d’ailleurs sorti de sa liste du patrimoine en péril, estimant que les objectifs de conservation de sa faune avaient été dépassés.
De notre envoyée spéciale à Bouna,
La voiture de touriste roule au pas sur une piste qui traverse le parc. Très rapidement, une famille de bubales fait son apparition. Jean-Luc est impressionné : « Je n’ai jamais été aussi proche d’animaux sauvages, en liberté comme ça quoi… En plus, elles ne sont même pas apeurées. J’ai l’impression que je peux descendre, aller les toucher. »
Au moment des différentes crises politiques qui ont secoué le pays, le parc de la Comoé a perdu une grande partie de ses animaux, à cause notamment du braconnage. En 2012, l’Office ivoirien des parcs et réserves (OIPR), a lancé une reprise en main de ce site. Grâce à plusieurs financements de l’État et de la coopération allemande, l’OIPR a acquis deux ULM et des avions pour assurer une surveillance du parc.
« On salue cette présence forte de la coopération allemande, qui dès la survenue de la crise, après la décision du patrimoine mondial, a mis en place un fonds de dotation, pour nous permettre d’avoir les effectifs, d’avoir le matériel, d’avoir les équipements et de tout de suite, faire les activités de surveillance, explique le colonel Roger Kouadio, le directeur du parc de la Comoé. Les gens comprenant que l’autorité de gestion était sur place, les activités illégales ont commencé à régresser. Et cela s’est vérifié avec tous les inventaires aériens qu’on a pu faire et qui ont montré que les activités illégales étaient réduites. »
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Résultat : les espèces qui avaient disparu, comme les chimpanzés et les éléphants, ont recolonisé le parc de la Comoé. Grâce à des caméras, les chercheurs ont pu constater leur présence.
« En 2013, on n’a même pas pu observer l’éléphant. J’utilise maintenant les caméras trappe. En 2016, on était autour de 60 individus. Et lorsque nous avons fait l’inventaire l’année passée, on était autour de 150 individus, raconte Colonel Amara Ouattara, le chef du service du suivi écologique. Les résultats de 2022 montrent que nous sommes passés de 8 000 individus pour les bibales, à 17 000 individus. Pour les cobes de Buffon, on est passé de 9 000 individus, à près de 10 000 individus. Donc, vous voyez, presque toutes les espèces phares du parc sont passées du simple au double. »
Pour réduire les activités illicites, il a fallu surtout impliquer les populations environnantes. Mamadou Koné est animateur rural : « On sensibilise plus sur la pratique de l’orpaillage clandestin, qui favorise la délinquance juvénile et l’utilisation du mercure et du cyanure, qui sont des produits très toxiques pour la santé. »
Parmi ses projets phare, le parc de la Comoé compte réintroduire des lions, à partir de 2027, pour attirer des touristes et dynamiser la recherche.
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