Neuvième épisode de notre série d’été sur les délices du continent… Avez-vous déjà goûté à l’alloco ? Ce snack est composé de banane plantain coupée en dés ou en rondelles et frite dans l’huile de palme, jaune ou rouge. En zone rurale, l’alloco se mange sur le pouce, tel quel ou avec de l'œuf, pour une somme modique. Mais en zone urbaine, à Abidjan en particulier, les « allocodromes » sont devenus des lieux de restauration assise, prisés des classes aisées. Reportage dans l’un des plus anciens, l’allocodrome de Cocody, une institution de l’alloco, avec notre correspondante Marine Jeannin.
De notre correspondante à Abidjan,
À l'extérieur, les chaises en plastique n’ont pas changé depuis les années soixante, et dans le marché couvert, où on prépare les fritures et les grillades, les mêmes recettes se transmettent entre les vendeuses de génération en génération. Démonstration avec Ruth, l’une de ces cuisinières : « On épluche la banane, on met dans l’assiette. On prend le couteau, on découpe la banane. Doucement, petit petit, voilà… Et quand tu as fini de découper petit petit, tu allumes la bouteille de gaz… ».
On reconnaît un bon alloco à sa couleur, qui témoigne d’une cuisson maîtrisée. Et si la banane est choisie à maturité, il aura à la fois le goût sucré recherché et une bonne texture en bouche. L’alloco est particulièrement prisé des « jeunes chocos », le surnom donné aux jeunes des classes aisées, qui viennent à l’allocodrome après les cours, pour le goûter, explique Tantie Franceline, qui tient l’une de ces échoppes : « La majorité, c’est les étudiants qui viennent avec leurs copines… Ils viennent manger alloco à partir de 16h, souvent… Ce sont les chocos qui viennent manger [alloco]. C’est un peu ça ! ».
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Parmi les clients, Emmanuelle Grâce Yao N'Guessan, étudiante en finances-comptabilité, venue partager un goûter avec son ami. Et qui cherche à retrouver dans l’alloco le goût de son enfance : « Hum ! On partait à la maison, et j’ai pensé que j’avais une folle envie de manger alloco. Donc, on est venus. Ah ! Alloco, c’est la vie hein. Et ça faisait longtemps que je n’avais pas mangé de l’alloco. Ma maman vendait alloco même, quand j’étais petite. Moi, j’aime tellement alloco ! C’est très bon, très, très bon. En tout cas, c’est doux. La banane plantain, c’est délicieux ».
À l’origine, l’alloco était pourtant une recette de récupération, explique le manager de l’allocodrome de Cocody, Manheni Kouleon, inventée pour valoriser les fruits trop mûrs : « Nos mères, nos grand-mères ont créé ce mets à la base pour ne pas perdre le produit… À partir de ça est né l’alloco. Chaque 16h, le petit goûter, la petite grignote. Alloco 100 francs, alloco 50 francs…Ça, c’était à l’époque. Et aujourd’hui, on voit des allocodromes partout. Avec plusieurs grillades de poulet, de poisson : alloco-poulet braisé, alloco-poulet frit, alloco-poisson frit… L’alloco passe avec tout ce qui est grillade, c’est ce qui est intéressant dans ce mets-là ! ».
La banane plantain frite n’est pas propre à la Côte d’Ivoire. Plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre en consomment aussi, et en revendiquent la paternité. Mais bien sûr, à Abidjan, on jure que l’alloco ivoirien est le meilleur du continent !
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