Pékin a dévoilé la semaine dernière une liste de métaux désormais soumis à des restrictions d'exportation. Parmi eux, le bismuth, utilisé dans l'industrie chimique et dans l'électronique. Un petit métal, qui sert aussi de pigment pour donner la couleur jaune des engins Caterpillar, et produit à 80% en Chine.
Pour l'instant, la Chine s'en tient à des mesures de contrôle : les exportateurs doivent désormais obtenir une licence et spécifier à quel client ils vendent, et pour quel usage. Le robinet n'est donc pas fermé, mais le temps que les exportateurs chinois s'organisent, il pourrait y avoir une suspension des ventes pendant un ou deux mois, voire trois mois.
« Dans les 100 prochains jours, il vaut mieux ne pas avoir besoin de bismuth », résume un expert. La Chine produit 80% des volumes, et pour en trouver, il faudra se tourner vers le deuxième et le troisième producteur, la Corée du Sud et le Laos, dont la production est minime par rapport à celle du géant asiatique, selon les données des services géologiques américains (USGS).
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Pas d'alternatives aussi bon marché que le bismuth
Aujourd'hui, à 12 dollars le kilo environ, le bismuth fait partie du club des métaux bon marché, ce qui veut dire que même si son prix augmente – et c'est déjà le cas depuis une semaine –, l'impact devrait être mineur pour les industriels selon Sian Morris, analyste principal pour les matériaux critiques chez Argus Media. Sauf si les industriels n'ont pas de stocks et doivent lui trouver un substitut, car rares sont les alternatives aussi peu onéreuses.
Ceux qui vont pâtir d'une offre qui s'annonce plus serrée dans les prochains mois sont les industriels des secteurs de la pharmacie, de la cosmétique, mais aussi ceux qui utilisent le bismuth comme pigment jaune, ou dans des alliages pour remplacer le plomb. Les pays européens sont, avec les États-Unis (688 tonnes importées en 2024) les premiers importateurs de ce métal, et donc les plus à risques. L'Europe (873 tonnes importées en 2024) est peut-être encore plus exposée en raison de l'absence de stocks publics de sécurité.
Un signal de plus pour constituer des stocks ?
Ce n'est pas faute d'avoir tiré la sonnette d'alarme, disent aujourd'hui ceux qui militent pour la création de tels stocks tampons. Ces nouvelles restrictions chinoises doivent être prises comme un appel à sécuriser notre approvisionnement, insiste Vincent Donnen, patron de la Compagnie des métaux rares (CDMR), une société de conseil en investissement. Même pour des métaux qui sont utilisés en très faibles quantités comme le bismuth, quand la dépendance à la Chine atteint un tel niveau, il n'y a pas de plan B, explique-t-il.
Le seul espoir pour l'Europe est qu'une fois que le ministère chinois du Commerce commencera à accorder des licences d'exportation, les exportations devraient reprendre, si on se fie aux précédentes restrictions imposées sur d'autres métaux. En revanche, il est peu probable que la Chine autorise la reprise des exportations vers les États-Unis, selon Argus Media.
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