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Or
Au Soudan du Sud, les affrontements continuent dans plusieurs régions du pays entre l’armée gouvernementale, loyale au président Salva Kiir, et les forces de l’opposition du vice-président Riek Machar. Celui-ci est en résidence surveillée à Juba depuis fin mars et une douzaine d’autres figures de l’opposition sont, elles aussi, toujours détenues. Les autorités assurent pourtant vouloir poursuivre la mise en œuvre de l’accord de paix de 2018 et de fait, aucun combat n’a eu lieu dans la capitale depuis le début de cette crise. Mais les résidents d’un camp de déplacés d’ethnie Nuer, la communauté de Riek Machar, disent vivre dans la peur. Ce camp situé en proche banlieue de Juba abrite plus de 30 000 personnes. Voici le récit d’un déplacé qui dit avoir été pris pour cible en tant que Nuer par les soldats gouvernementaux. Pour sa sécurité, nous ne révélons pas son identité.
Des motos trimballent toutes sortes de marchandises, dans cette rue qui file à travers les abris aux toits couverts de bâches en mauvais état. Nous retrouvons John derrière une palissade en bambou. À 55 ans, il compte à l’aide de ses doigts les années qu’il a passées dans ce camp de déplacés situé près de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud, la Minuss, à Juba. Comme des dizaines de milliers de Nuer de la capitale, il a fui les violences en décembre 2013, quand la guerre civile a commencé. « Je suis venu ici quand le conflit est devenu ethnique, quand des personnes innocentes, sans lien avec la politique, qui ne sont ni soldats ni combattants, ont été ciblées parce qu’elles étaient Nuer. Alors que c’était un problème entre les politiciens à la base », explique-t-il.
L’accord de paix de 2018 puis le retour de Riek Machar en 2020 au poste de vice-président n’a pas vraiment amélioré la situation dans le camp. Les casques bleus se sont retirés et la plupart des services humanitaires se sont arrêtés. En octobre 2024, John a décidé d’aller s’installer à l’extérieur du camp pour cultiver et chercher de l’or jusqu’à ce que des combats éclatent autour de Juba, la semaine du 24 mars. « C’est le gouvernement qui est allé provoquer des combats de partout. Ils ont attaqué les bases militaires où se trouvaient les soldats d’opposition. Ils les ont chassés. Puis, ils s’en sont pris à nous. Ils sont venus délibérément pour prendre nos abris. Et pour nous tuer, car nous sommes des Nuer. Ils sont venus la nuit. Nous étions à l’intérieur en train de discuter », se souvient-il.
Les soldats commencent à tirer et John s'en sort en faisant semblant d’être mort. Quand les soldats passent à une autre habitation, il parvient à s’enfuir avec un jeune, blessé, laissant l’homme dont il partageait l’abri, gisant par terre, mort sous les balles de l’armée gouvernementale. « Voilà, c'est ce qui s’est passé. Ils ont tué ce gars et en ont blessé un autre. Moi, je me suis blessé sur des pierres en courant pieds nus, de nuit, je ne pouvais pas les voir », se remémore-t-il.
Il est revenu vivre dans ce camp surpeuplé où les gens manquent de tout et ont peur. Cinq jeunes ont été tués depuis début mars aux abords du camp. Et d’autres résidents ont disparu. « Il y a le cas d’une femme qui est partie ramasser du bois de chauffe et qui n’est jamais revenue. Nous n’avons jamais trouvé son corps. Mais si vous demandez aux femmes du camp, elles vous diront qu’elles ont trouvé du sang sous les arbres », raconte-t-il. John cite aussi le cas d’un homme qui est allé là où il fabrique du charbon et n’est jamais revenu. Pour lui, tant que l’accord de paix ne sera pas appliqué entièrement, les casques bleus devraient revenir assurer la sécurité du camp.
À lire aussiSoudan du Sud: Amnesty International dénonce la violation de l'embargo sur les armes
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Des motos trimballent toutes sortes de marchandises, dans cette rue qui file à travers les abris aux toits couverts de bâches en mauvais état. Nous retrouvons John derrière une palissade en bambou. À 55 ans, il compte à l’aide de ses doigts les années qu’il a passées dans ce camp de déplacés situé près de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud, la Minuss, à Juba. Comme des dizaines de milliers de Nuer de la capitale, il a fui les violences en décembre 2013, quand la guerre civile a commencé. « Je suis venu ici quand le conflit est devenu ethnique, quand des personnes innocentes, sans lien avec la politique, qui ne sont ni soldats ni combattants, ont été ciblées parce qu’elles étaient Nuer. Alors que c’était un problème entre les politiciens à la base », explique-t-il.
L’accord de paix de 2018 puis le retour de Riek Machar en 2020 au poste de vice-président n’a pas vraiment amélioré la situation dans le camp. Les casques bleus se sont retirés et la plupart des services humanitaires se sont arrêtés. En octobre 2024, John a décidé d’aller s’installer à l’extérieur du camp pour cultiver et chercher de l’or jusqu’à ce que des combats éclatent autour de Juba, la semaine du 24 mars. « C’est le gouvernement qui est allé provoquer des combats de partout. Ils ont attaqué les bases militaires où se trouvaient les soldats d’opposition. Ils les ont chassés. Puis, ils s’en sont pris à nous. Ils sont venus délibérément pour prendre nos abris. Et pour nous tuer, car nous sommes des Nuer. Ils sont venus la nuit. Nous étions à l’intérieur en train de discuter », se souvient-il.
Les soldats commencent à tirer et John s'en sort en faisant semblant d’être mort. Quand les soldats passent à une autre habitation, il parvient à s’enfuir avec un jeune, blessé, laissant l’homme dont il partageait l’abri, gisant par terre, mort sous les balles de l’armée gouvernementale. « Voilà, c'est ce qui s’est passé. Ils ont tué ce gars et en ont blessé un autre. Moi, je me suis blessé sur des pierres en courant pieds nus, de nuit, je ne pouvais pas les voir », se remémore-t-il.
Il est revenu vivre dans ce camp surpeuplé où les gens manquent de tout et ont peur. Cinq jeunes ont été tués depuis début mars aux abords du camp. Et d’autres résidents ont disparu. « Il y a le cas d’une femme qui est partie ramasser du bois de chauffe et qui n’est jamais revenue. Nous n’avons jamais trouvé son corps. Mais si vous demandez aux femmes du camp, elles vous diront qu’elles ont trouvé du sang sous les arbres », raconte-t-il. John cite aussi le cas d’un homme qui est allé là où il fabrique du charbon et n’est jamais revenu. Pour lui, tant que l’accord de paix ne sera pas appliqué entièrement, les casques bleus devraient revenir assurer la sécurité du camp.
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