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Les Journées européennes du patrimoine se terminent ce samedi 22 septembre. Elles ont pour objectif de montrer au plus grand nombre la richesse du patrimoine au travers de rendez-vous inédits, de visites insolites et d’ouvertures exceptionnelles. À l’occasion de ce rendez-vous culturel incontournable, nous vous faisons découvrir un métier aux frontières de la culture, du patrimoine et de l’histoire de l’art avec Malo de Lussac, commissaire-priseur.
La création, c'est un geste, un état, une image dans un cerveau. C'est quelque chose qui est ressorti sur une toile, sur une matière. Et c'est cela qui est intéressant aujourd'hui.
Malo de Lussac, commissaire-priseur habilité.
« Vous avez des artistes qui sont extrêmement cotés pendant dix ans et le marché fait qu'il va y avoir un désintérêt de l'artiste et l'artiste va complètement perdre de sa cote. Cela fluctue aussi vis-à-vis de tout ce qui est la politique internationale, politique nationale. Pendant les élections présidentielles, c'est toujours des moments qui sont très délicats, les vendeurs ont peur de vendre à ce moment-là parce que les investissements de certains acheteurs ne vont pas forcément aller dans le sens du marché de l'art. Cela va aller plutôt dans des valeurs refuges qui vont être l'or ou l'argent. Il y a toute une fluctuation qu'il faut connaître et il faut être intéressé par tout ce qui est politique, nationale ou internationale. Il faut s'intéresser un peu à tout et pas forcément à l'histoire de l'art. »
Très jeune, Malo de Lussac parcourt les salles de vente aux enchères avec son grand-père, un passionné d’art. Celui-ci lui apprend à regarder un meuble, un tableau. À 14 ans, Malo de Lussac sait clairement qu’il veut devenir commissaire-priseur. Après des études d’arts plastiques, aux ateliers de Sèvres, il se dirige vers une école d’expertise gérée par des professionnels du monde de l’art qui transmettent leur savoir-faire. Il commence comme clerc, le principal collaborateur, du commissaire-priseur, puis, après sept ans dans cette fonction, il valide, par un examen en 2019, le statut de commissaire-priseur.
« C'est un examen qui est assez long et compliqué parce que vous passez donc d'abord un tour de salle. Il y a 25 objets. Vous avez deux minutes pour faire des fiches, connaître l'auteur, les techniques, faire une description complète de l'objet ainsi que son état. Au bout d'une heure et demie, vous rendez vos écrits et après vous passez des oraux. Ce sont des oraux de droit, déontologie, matériel industriel, comptabilité, gestion, anglais et enfin histoire de l'art. Après tous ces oraux, nous savons si oui ou non nous sommes reçus en tant que commissaire-priseur. Nous avons à peu près 25 objets. L'examen a lieu à l'intérieur de Drouot, et les objets, comme vous le savez, rentrent et sortent de l'Hôtel Drouot, il nous est arrivé pendant notre examen qu’un ou deux objets doivent passer en vente ou dans une exposition. Nous avons commencé avec 25 ou 26 objets, nous avons dû terminer avec 23 objets en salle. »
Dans son panorama de savoir-faire, le commissaire-priseur doit connaître une langue étrangère, plutôt l’anglais, maîtriser la comptabilité, la gestion, être féru d’histoire de l’art et s’intéresser au patrimoine et à la culture. Mais il n’est pas seul. Il y a tout un écosystème autour de lui.
« Vous avez des experts qui sont des spécialistes d'une période, d'un artiste, qui peuvent être sous la forme d'un cabinet d'expertise ou d'un comité. Vous avez des comités qui font foi, c'est-à-dire que même si vous demandez à un expert très spécialisé, c'est le comité qui aura toujours le dessus sur l'authentification d'une œuvre. J'ai des associés, l’un d’eux est très spécialisé en mobilier. Parfois, quand j'ai des difficultés sur un meuble parce que je ne sais pas si le meuble est italien, français ou hollandais, c'est lui qui va pouvoir m'aider à faire cette expertise. Ensuite, vous avez d'autres personnes, des photographes pour prendre des prises de vue, mes clercs pour faire les ventes aux enchères, mes transporteurs qui sont là aussi pour m'aider à transporter les objets. Mais vous avez aussi des propriétaires à qui je loue des propriétés pour faire mes ventes aux enchères. Il y a donc un écosystème qui est très polyvalent, très éclectique qui permet aujourd'hui de pouvoir organiser une vente de A à Z. »
Pour Malo de Lussac, son métier est aussi une façon de redécouvrir certaines époques, celle qu’il préfère est celle du Moyen Âge qui selon lui est assez méconnue.
« Le Moyen Âge est une période qui est assez longue, très peu connue parce qu'il y a eu beaucoup d'erreurs historiques au XIXe siècle. Cette période, nous sommes en train de la redécouvrir aujourd'hui. Elle passe du Ve au XVe siècle. Il y a presque 1 000 ans d'histoire et de création. Cela m'a toujours fasciné parce que c'est une période sur laquelle je suis assez sensible, parce qu'il y a des images religieuses, mais aussi des images profanes, des images de la vie quotidienne. Nous découvrons qu’au Moyen Âge, ils n'ont pas ce sérieux que nous leur avons donné au XIXe siècle, ce côté un peu chevaleresque. Ils ont aussi de l'humour, donc c'est assez drôle. C'est le début du papier, des livres et c'est quelque chose pour lequel je suis assez sensible. Dans mon étude à Amboise, comme Tours était vraiment un pôle de l'écriture à l'époque du Moyen Âge, j'essaie aussi de développer cette section. Le livre et les papiers, le papier, c'est formidable parce que c'est quelque chose que nous avons toujours utilisé. Par exemple, les papyrus égyptiens, nous en retrouvons encore aujourd'hui dans les tombeaux égyptiens. Le papier, c'est quelque chose qui reste, que nous arrivons à déchiffrer. Il y a encore des gens qui lisent des langues mortes. Dans ces cas-là, nous nous tournons vers des personnes qui savent parler encore des langues mortes et je trouve cela extraordinaire. »
Un commissaire-priseur voit entre 15 000 et 20 000 objets par an. C’est un métier d’expertise, mais pas comme les autres. Il doit être capable de reconnaître la valeur d’un objet, lors d’un inventaire, mais aussi apprendre à retracer son histoire.
« Pour expertiser un objet, nous partons toujours du général pour aller au particulier. Par exemple, nous allons essayer de voir à quoi va servir l'objet. Vous avez des objets du XVIIIe siècle qui ne sont plus du tout utilisés, maintenant, à notre époque, donc, nous allons essayer de connaître son usage. Après, nous allons chercher la matière, l'identifier, savoir s'il y a des éléments de datation que nous pourrions mettre sur l’objet. Si l'auteur n'est pas connu, essayez de le rapprocher par rapport à d'autres objets, d'autres personnes qui auraient pu créer ce genre d'objet. Nous allons voir dans les bibliothèques, les musées. Avoir de la curiosité, demander à quelqu'un qui en sait un peu plus que nous, parce que nous n’avons pas la science infuse, non plus. Mais il y a toujours des personnes qui sont très spécialisées dans certaines périodes, techniques, objets. C’est comme cela que nous essayons de déterminer la valeur de l’objet pour pouvoir ensuite le passer en vente aux enchères. »
Les collectionneurs d’art premier sont nombreux et cette expertise va au-delà des seuls masques africains qui fascinent par leur beauté et leur histoire.
« L'art premier est un art qui est très difficile parce que c'est un art qui peut être ancien et l’inverse. Vous pouvez retrouver des masques qui valent 30 euros comme, à côté, un masque qui vaut 1 million d'euros. Cette expertise est extrêmement difficile parce que vous avez une multiplication de masques aujourd'hui dans les ventes aux enchères et chez les particuliers. Ce qui est très intéressant, c'est que nous pouvons retrouver aussi des dessins qui peuvent témoigner de la vie d'une tribu, des photographies des différentes cérémonies, des armes, des objets rituels, des coiffes rituelles. C'est un art qui est compliqué. Il faut s’associer avec des personnes qui, elles, sont vraiment spécialistes, parce qu'il y a énormément de faux de ce côté-là. »
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Les Journées européennes du patrimoine se terminent ce samedi 22 septembre. Elles ont pour objectif de montrer au plus grand nombre la richesse du patrimoine au travers de rendez-vous inédits, de visites insolites et d’ouvertures exceptionnelles. À l’occasion de ce rendez-vous culturel incontournable, nous vous faisons découvrir un métier aux frontières de la culture, du patrimoine et de l’histoire de l’art avec Malo de Lussac, commissaire-priseur.
La création, c'est un geste, un état, une image dans un cerveau. C'est quelque chose qui est ressorti sur une toile, sur une matière. Et c'est cela qui est intéressant aujourd'hui.
Malo de Lussac, commissaire-priseur habilité.
« Vous avez des artistes qui sont extrêmement cotés pendant dix ans et le marché fait qu'il va y avoir un désintérêt de l'artiste et l'artiste va complètement perdre de sa cote. Cela fluctue aussi vis-à-vis de tout ce qui est la politique internationale, politique nationale. Pendant les élections présidentielles, c'est toujours des moments qui sont très délicats, les vendeurs ont peur de vendre à ce moment-là parce que les investissements de certains acheteurs ne vont pas forcément aller dans le sens du marché de l'art. Cela va aller plutôt dans des valeurs refuges qui vont être l'or ou l'argent. Il y a toute une fluctuation qu'il faut connaître et il faut être intéressé par tout ce qui est politique, nationale ou internationale. Il faut s'intéresser un peu à tout et pas forcément à l'histoire de l'art. »
Très jeune, Malo de Lussac parcourt les salles de vente aux enchères avec son grand-père, un passionné d’art. Celui-ci lui apprend à regarder un meuble, un tableau. À 14 ans, Malo de Lussac sait clairement qu’il veut devenir commissaire-priseur. Après des études d’arts plastiques, aux ateliers de Sèvres, il se dirige vers une école d’expertise gérée par des professionnels du monde de l’art qui transmettent leur savoir-faire. Il commence comme clerc, le principal collaborateur, du commissaire-priseur, puis, après sept ans dans cette fonction, il valide, par un examen en 2019, le statut de commissaire-priseur.
« C'est un examen qui est assez long et compliqué parce que vous passez donc d'abord un tour de salle. Il y a 25 objets. Vous avez deux minutes pour faire des fiches, connaître l'auteur, les techniques, faire une description complète de l'objet ainsi que son état. Au bout d'une heure et demie, vous rendez vos écrits et après vous passez des oraux. Ce sont des oraux de droit, déontologie, matériel industriel, comptabilité, gestion, anglais et enfin histoire de l'art. Après tous ces oraux, nous savons si oui ou non nous sommes reçus en tant que commissaire-priseur. Nous avons à peu près 25 objets. L'examen a lieu à l'intérieur de Drouot, et les objets, comme vous le savez, rentrent et sortent de l'Hôtel Drouot, il nous est arrivé pendant notre examen qu’un ou deux objets doivent passer en vente ou dans une exposition. Nous avons commencé avec 25 ou 26 objets, nous avons dû terminer avec 23 objets en salle. »
Dans son panorama de savoir-faire, le commissaire-priseur doit connaître une langue étrangère, plutôt l’anglais, maîtriser la comptabilité, la gestion, être féru d’histoire de l’art et s’intéresser au patrimoine et à la culture. Mais il n’est pas seul. Il y a tout un écosystème autour de lui.
« Vous avez des experts qui sont des spécialistes d'une période, d'un artiste, qui peuvent être sous la forme d'un cabinet d'expertise ou d'un comité. Vous avez des comités qui font foi, c'est-à-dire que même si vous demandez à un expert très spécialisé, c'est le comité qui aura toujours le dessus sur l'authentification d'une œuvre. J'ai des associés, l’un d’eux est très spécialisé en mobilier. Parfois, quand j'ai des difficultés sur un meuble parce que je ne sais pas si le meuble est italien, français ou hollandais, c'est lui qui va pouvoir m'aider à faire cette expertise. Ensuite, vous avez d'autres personnes, des photographes pour prendre des prises de vue, mes clercs pour faire les ventes aux enchères, mes transporteurs qui sont là aussi pour m'aider à transporter les objets. Mais vous avez aussi des propriétaires à qui je loue des propriétés pour faire mes ventes aux enchères. Il y a donc un écosystème qui est très polyvalent, très éclectique qui permet aujourd'hui de pouvoir organiser une vente de A à Z. »
Pour Malo de Lussac, son métier est aussi une façon de redécouvrir certaines époques, celle qu’il préfère est celle du Moyen Âge qui selon lui est assez méconnue.
« Le Moyen Âge est une période qui est assez longue, très peu connue parce qu'il y a eu beaucoup d'erreurs historiques au XIXe siècle. Cette période, nous sommes en train de la redécouvrir aujourd'hui. Elle passe du Ve au XVe siècle. Il y a presque 1 000 ans d'histoire et de création. Cela m'a toujours fasciné parce que c'est une période sur laquelle je suis assez sensible, parce qu'il y a des images religieuses, mais aussi des images profanes, des images de la vie quotidienne. Nous découvrons qu’au Moyen Âge, ils n'ont pas ce sérieux que nous leur avons donné au XIXe siècle, ce côté un peu chevaleresque. Ils ont aussi de l'humour, donc c'est assez drôle. C'est le début du papier, des livres et c'est quelque chose pour lequel je suis assez sensible. Dans mon étude à Amboise, comme Tours était vraiment un pôle de l'écriture à l'époque du Moyen Âge, j'essaie aussi de développer cette section. Le livre et les papiers, le papier, c'est formidable parce que c'est quelque chose que nous avons toujours utilisé. Par exemple, les papyrus égyptiens, nous en retrouvons encore aujourd'hui dans les tombeaux égyptiens. Le papier, c'est quelque chose qui reste, que nous arrivons à déchiffrer. Il y a encore des gens qui lisent des langues mortes. Dans ces cas-là, nous nous tournons vers des personnes qui savent parler encore des langues mortes et je trouve cela extraordinaire. »
Un commissaire-priseur voit entre 15 000 et 20 000 objets par an. C’est un métier d’expertise, mais pas comme les autres. Il doit être capable de reconnaître la valeur d’un objet, lors d’un inventaire, mais aussi apprendre à retracer son histoire.
« Pour expertiser un objet, nous partons toujours du général pour aller au particulier. Par exemple, nous allons essayer de voir à quoi va servir l'objet. Vous avez des objets du XVIIIe siècle qui ne sont plus du tout utilisés, maintenant, à notre époque, donc, nous allons essayer de connaître son usage. Après, nous allons chercher la matière, l'identifier, savoir s'il y a des éléments de datation que nous pourrions mettre sur l’objet. Si l'auteur n'est pas connu, essayez de le rapprocher par rapport à d'autres objets, d'autres personnes qui auraient pu créer ce genre d'objet. Nous allons voir dans les bibliothèques, les musées. Avoir de la curiosité, demander à quelqu'un qui en sait un peu plus que nous, parce que nous n’avons pas la science infuse, non plus. Mais il y a toujours des personnes qui sont très spécialisées dans certaines périodes, techniques, objets. C’est comme cela que nous essayons de déterminer la valeur de l’objet pour pouvoir ensuite le passer en vente aux enchères. »
Les collectionneurs d’art premier sont nombreux et cette expertise va au-delà des seuls masques africains qui fascinent par leur beauté et leur histoire.
« L'art premier est un art qui est très difficile parce que c'est un art qui peut être ancien et l’inverse. Vous pouvez retrouver des masques qui valent 30 euros comme, à côté, un masque qui vaut 1 million d'euros. Cette expertise est extrêmement difficile parce que vous avez une multiplication de masques aujourd'hui dans les ventes aux enchères et chez les particuliers. Ce qui est très intéressant, c'est que nous pouvons retrouver aussi des dessins qui peuvent témoigner de la vie d'une tribu, des photographies des différentes cérémonies, des armes, des objets rituels, des coiffes rituelles. C'est un art qui est compliqué. Il faut s’associer avec des personnes qui, elles, sont vraiment spécialistes, parce qu'il y a énormément de faux de ce côté-là. »
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