Il y a deux semaines, apiculteurs et scientifiques européens ont tiré la sonnette d'alarme : un essaim d'abeilles naines a été découvert à Malte, une première sur le Vieux continent. Apis florae, de son nom scientifique, est originaire d'Asie, s'est déjà répandue en Afrique de l'Est et au Proche et au Moyen Orient et est probablement arrivée accidentellement à Malte à bord d'un navire marchand.

Depuis la publication, le 21 août 2024, d’une étude dans la revue scientifique Journal of Apicultural Research, les apiculteurs en Europe sont en état d’alerte. Les scientifiques maltais, chinois et italien rapportent la première découverte d’un essaim d’Apis florae sur le Vieux continent. Cet essaim a été détruit après son identification par les autorités maltaises, mais les scientifiques estiment que la probabilité est grande que d’autres essaims ont déjà été créés à partir du premier, trouvé près d’un port de fret à Malte.

C'est une mauvaise nouvelle pour les abeilles domestiques, qui produisent le miel, mais aussi pour les plus de mille espèces d’abeilles sauvages en Europe. Car les abeilles naines, originaires d’Asie, sont porteuses « de nouvelles maladies et de nouveaux parasites qui pourraient affecter les abeilles européennes », constate Cédric Alaux, directeur de l'unité Abeilles et Environnement à l'INRAE, l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement. 

Le deuxième danger : la concurrence. Tout comme les abeilles européennes, leurs cousines venues d’Asie se nourrissent du nectar et du pollen de fleurs qui sont limitées dans un milieu donné. Si les abeilles naines arrivaient à s’imposer, cela pourrait provoquer la disparition des abeilles locales et, par ricochet, un véritable bouleversement des écosystèmes qui en dépendent. « Supplanter des espèces locales par des espèces exotiques qui ne vont pas jouer tout à fait le même rôle peut amener à des dysfonctionnements », alerte Philippe Grandcolas, directeur adjoint de l’Institut Écologie et Environnement du CNRS. « Peut-être que l’Apis florae préférera certaines fleurs et supplantera une abeille domestique qui, elle, était capable de polliniser également d'autres espèces de fleurs, lesquelles se trouveront de fait sans pollinisateurs ».

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Comment reconnaître une abeille naine ?

Comme sans nom l'indique, les abeilles naines sont plus petites que les abeilles européennes. Les Apis florae ne mesurent qu'entre 7 et 10 millimètres contre 12 millimètres pour les Apis mellifera, les abeilles domestiques d'Europe. Mais l'abeille naine est surtout reconnaissable à un signe distinctif : « Les deux premiers segments de son abdomen sont très rouges. Et sur la partie apicale, elle a des bandes veloutées claires et noires », détaille Benoît Geslin, maître de conférences à l’université de Rennes qui ajoute « un autre aspect très reconnaissable d'Apis florae : quand on s'approche, elles font un bruit très aigu. C'est leur manière d'effrayer les prédateurs ».

Le nid d’abeilles naines : « comme un coussin accroché sur une branche d’arbre »

S’il sera difficile d’identifier une abeille naine seule en train de butiner, les Apis florae sont des abeilles sociales qui vivent en colonie. Leur nid est bien reconnaissable : toujours situé dans un arbre, construit autour d’une seule branche. « Vous ne pouvez pas confondre un nid d’abeilles naines avec celui de frôlons asiatiques ou de guêpes », assure Mickaël Henry, directeur de recherches à l’Inrae qui travaille notamment sur l’écologie de l’approvisionnement des abeilles. « Les frôlons asiatiques, par exemple, construisent des nids bien fermés avec des matériaux comme des coupeaux de bois pour s’isoler de l’extérieur. Alors que les abeilles naines, au contraire, construisent un nid qui est complètement exposé. Ce nid fait environ vingt à trente centimètres de diamètre. Vous pourrez apercevoir une masse de petites abeilles agglutinées les unes aux autres. De loin, ça ressemble à un gros coussin rond, donc assez facile à distinguer dans notre environnement ».

Que faire si on trouve un essaim d'abeilles naines ?

Selon Cédric Alaux, qui dirige l’unité Abeilles et Environnement à l’Inrae, la sensibilisation de l’opinion publique européenne est primordiale pour avoir tenté d’éviter l’expansion des abeilles naines à travers le continent européen. En raison des menaces pour la biodiversité qui émanent de la présence de l’Apis florae, dont l’aire de distribution ne cesse de s’étendre, « la préconisation en termes de biosécurité, en Europe, mais aussi dans les autres pays où elle a été détectée, c'est de détruire les essaims », fait savoir l'écologue Benoît Geslin.

Mais attention : n'essayez surtout pas de détruire un nid vous-même ! Contactez le plus rapidement possible soit un apiculteur, soit vos autorités locales, type mairie ou pompiers. Ils se chargeront de confirmer qu'il s'agit bien d’abeilles naines et, le cas échéant, de la destruction de l'essaim. 

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